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Photo : VNP/CVN |
Au cœur du district de Gia Lâm, à Hanoï, le village de Kim Lan est le berceau d’une céramique raffinée, témoin d’un héritage remontant au VIIe siècle. Chaque pièce raconte une histoire, sculptée dans la terre et sublimée par le feu des fours traditionnels. Entre les mains des artisans, l’argile blanche et fine se transforme en objets du quotidien et en œuvres d’art, portant en elle la quintessence d’une mémoire vivante.
Noble et exigeant, l’art de la céramique de Kim Lan repose sur des techniques transmises de génération en génération. À l’instar de Dào Viêt Bình, président de l’Association de la céramique de Kim Lan, les artisans insufflent à chaque création un équilibre subtil entre esthétique et fonctionnalité. Leur talent s’exprime dans des pièces imposantes, qui se distinguent par leurs motifs sophistiqués, et qui non seulement ont établi des records nationaux, mais ont aussi renforcé la renommée de Kim Lan sur la carte de la céramique vietnamienne.
Une redécouverte historique
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Le village de Kim Lan est le berceau d’une céramique raffinée, témoin d’un héritage remontant au VIIe siècle. |
Photo : VNP/CVN |
Jouant un rôle majeur dans l’histoire de la céramique vietnamienne, le village de Kim Lan est un véritable musée vivant, gardien des secrets des anciens émaux. Les fouilles menées sur le site de Hàm Rông attestent de l’existence de cette activité dès le VIIe siècle, et ses productions étaient déjà considérées comme précieuses au VIIIe siècle. Les pots, jarres et marmites conservent encore l’émail à base de cendre de balle de riz du IXe siècle, florissant sous les dynasties des Ly (1009-1225) et Trân (1225-1400), témoignage d’un passé glorieux. Toutefois, au XVIIIe siècle, la poterie locale a progressivement décliné.
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Grâce à son argile blanche et fine, Kim Lan produit des pièces d’une qualité exceptionnelle. |
Photo : VNP/CVN |
Entre 1977 et 1978, les villageois ont entrepris de redonner vie à leur métier ancestral. Cette renaissance a conduit, dans les années 1990, à l’essor de près de 750 fours à charbon. Cependant, à partir des années 2010, la concurrence des produits étrangers a entraîné une diminution significative du nombre d’ateliers. Face à ces défis, plusieurs familles ont adopté des fours à gaz, permettant ainsi une modernisation et une relance de l’activité. Aujourd’hui, le village compte plus de 350 fours en activité, employant des milliers de travailleurs et générant environ 500 milliards de dôngs par an.
Les produits de Kim Lan se distinguent par leur simplicité, leur harmonie et leur grande fonctionnalité. Du grès artisanal aux articles utilitaires, les créations du village ne se limitent pas au marché domestique, mais s’exportent également vers le Japon et la République de Corée. Actuellement, Kim Lan compte 17 artisans reconnus, dont un “Artisan Émérite” et sept “Artisans de Hanoï”. Trois pièces confectionnées dans le village ont été inscrites au Livre des records du Vietnam.
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Motifs décoratifs d’une œuvre inspirée de la Victoire historique de Diên Biên Phu. |
Photos : Vietkings/CVN |
Aujourd’hui, au-delà de cet héritage, les artisans ont mis au point un émail doré - men hoàng kim -, dérivé de l’émail ancestral à la cendre de riz, conférant à la céramique une brillance miroitante rappelant le jade.
Par ailleurs, l’artisan Dào Viêt Bình confie que les céramistes locaux s’efforcent de restaurer l’émail vert céladon datant des dynasties des Ly et Trân, d’une couleur profonde semblable à l’eau d’un lac en automne.
Bien que certains échantillons soient encore conservés au Musée des beaux-arts du Vietnam, la formule de fabrication reste un mystère. Avec persévérance, les artisans poursuivent leurs recherches dans l’espoir de redonner vie à cet émail légendaire.
Essor d’un village aux sources séculaires
Longtemps menacée par la modernité et la concurrence industrielle, la céramique de Kim Lan a connu une renaissance grâce à l’initiative des artisans et au soutien des autorités locales. En mars 2024, sa reconnaissance en tant que patrimoine culturel immatériel national a marqué un tournant décisif, insufflant un nouvel essor à ce village d’exception.
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Photos : Vietkings/CVN |
Pham Van Nguyên, 50 ans, résidant dans le 2e hameau de Kim Lan, commune de Van Duc, souligne l’unicité de cette céramique, qui possède une rare capacité de luminescence sous la lumière. “Maîtriser cette technique exige non seulement de l’habileté, mais aussi des années d’expérience et une profonde compréhension des propriétés de l’argile, de l’émail et du feu”.
L’innovation technique, notamment l’utilisation de fours à gaz, a permis aux potiers de moderniser leur production tout en préservant l’authenticité de leur savoir-faire.
Selon M. Nguyên, le secret de la translucidité réside dans la sélection rigoureuse des matières premières et une cuisson précise. L’argile de kaolin doit être purifiée de toute impureté avant une cuisson à près de 1.300 °C.
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La translucidité unique des céramiques de Kim Lan, fruit d’une cuisson à très haute température. Photo : VNP/CVN |
Une fois cuite, la céramique devient translucide comme une ampoule ; une température inférieure produit une teinte jaunâtre ou opaque. Ce phénomène lumineux, gage de pureté et de maîtrise technique, caractérise la céramique de Kim Lan.
L’artisan ajoute que l’argile pure rétrécit d’environ 18% après cuisson, tandis que la céramique liquide coulée en moule peut se contracter jusqu’à 26%. Une mauvaise maîtrise de ces proportions peut entraîner fissures ou cassures. Chaque étape requiert donc une précision extrême pour garantir des produits d’une qualité exemplaire, portant l’empreinte du savoir-faire de Kim Lan.
Thê Duong - Dan Thanh/CVN