Des journalistes sont décédés pour l'idéal révolutionnaire

Dans les flammes de la guerre, des reporters de l'Agence Vietnamienne d'Information ont choisi la plume comme arme. Leur jeunesse sacrifiée témoigne d'une foi intacte et d'une fidélité absolue à l'idéal d'indépendance et de liberté qui résonne encore aujourd'hui.

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De jeunes reporters de l'Agence Vietnamienne d'Information rendent hommage aux héros morts pour la Patrie au cimetière des martyrs de Hô Chi Minh-Ville, le 27 juillet dernier. 
Photo : VNA/CVN

Au Vietnam, l’histoire du journalisme ne s’écrit pas seulement à travers des articles ou des photographies, mais aussi dans le sang et les larmes de ceux qui sont partis au front avec un stylo, un appareil photo et la conviction inébranlable de devoir servir la vérité révolutionnaire. Ces journalistes ont donné leur vie pour que la voix du peuple traverse les bombes, les forêts et les rivières. Leur destin, lié à la liberté, demeure un témoignage vibrant de l’adhésion aux idéaux révolutionnaires.

Du reporter au combattant

Parmi ces figures marquantes se trouve Phan Hoài Nam, né en 1940 dans l’ancienne province de Quang Nam (aujourd’hui la ville de Dà Nang, au Centre), fils du poète renommé Xuân Tâm, une plume reconnue du mouvement Thơ Mới (Nouvelle Poésie). Après le regroupement de 1954, il a poursuivi des études de journalisme en Union soviétique (aujourd’hui la Russie), puis de littérature à Hanoï. En 1966, au plus fort de la guerre, il a choisi de rejoindre le Sud comme reporter de l’Agence de presse de libération.

Il a dès lors dédié sa vie à l’écriture au cœur des combats. Il a vécu une passion avec une jeune docteure, ancienne élève du Nord envoyée en mission dans le Sud-Est. Les deux amoureux avaient prévu de se marier, mais ce jour-là n’est jamais arrivé.

Au-delà de son talent, ses collègues se souviennent de son humanité. Parmi eux, l’ancienne journaliste de guerre Trân Tô Nga se rappelle encore cette scène, dans la forêt, quand les bombes américaines pleuvaient : “Nam a fait écran de son corps et a murmuré : +S’il faut mourir, il vaut mieux que ce soit moi+”.

En 1968, durant l’offensive du Têt Mâu Thân (Nouvel An lunaire du Singe), il a été envoyé au front de Cân Giuôc, ancienne province de Long An (aujourd’hui province de Tây Ninh, dans le delta du Mékong). Cette fois, il n’a pas seulement couvert la guerre : il s’y est engagé directement, devenant chef de section d’une unité de guérilla. Sa dernière bataille, un corps-à-corps acharné contre les troupes américaines, a scellé son destin. Un article ultérieur a souligné son courage exceptionnel. Face à la peur, c’est lui qui a su galvaniser ses hommes, les poussant à tenir jusqu’au bout.

Le martyr Phan Hoài Nam (gauche) et son père, le poète Xuân Tâm, à Moscou (Russie) en 1962. Photo : Archives/VNA/CVN

Sa disparition a plongé sa famille dans une douleur silencieuse. Son père, Xuân Tâm, a porté ce deuil en secret pour protéger son épouse malade du cœur. Dans un poème bouleversant, il a écrit : “Thư bạn báo con hi sinh… Cha không tin… Nhớ con, Cha chỉ thấy một mình” (Tes camarades m’annoncent ta mort… Je refuse d’y croire… Depuis ce jour, je ne vois que la solitude). Longtemps, son corps est resté sans sépulture.

Ce n’est qu’en 1994 que la tombe du martyr Phan Hoài Nam a été retrouvée dans un cimetière de guerre de la province de Long An. Grâce à la détermination de Mme Nga et aux indications d’un expert en recherche de martyrs, la famille a pu identifier l’emplacement et ramener ses restes pour les inhumer au cimetière des martyrs de Hô Chi Minh-Ville.

Deux frères, un même sacrifice

La jeunesse vietnamienne découvre les grandes étapes de l’Agence Vietnamienne d’Information dans sa Salle des traditions, symbole de mémoire et d’engagement.
Photo : Vietnamplus/CVN

Dans une petite maison de la rue Trân Quôc Toan, à Hanoï, Nguyên Duc Dông évoque avec émotion ses deux frères tombés pour la Patrie : Nguyên Duc Yên et Nguyên Duc Thanh. Tous deux travaillaient à l’Agence Vietnamienne d’Information avant de partir au front.

Nguyên Duc Yên, l’aîné, travaillait à l’antenne photographique de l’Agence Vietnamienne d’Information (à l’époque située au 18 rue Trân Hung Dao, à Hanoï), et a rejoint le maquis en 1963. Six ans plus tard, en 1969, sa famille a reçu la terrible nouvelle de son décès alors qu’il était en mission. Après la réunification du pays en 1976, sa famille a entrepris un voyage vers le Sud, s’appuyant sur des indices et des lettres précieusement conservées pour retrouver sa sépulture. Grâce à l’aide des habitants locaux, ils se sont rendus dans le hameau 7, commune de Phuoc Lanh, district de Tiên Phuoc, dans l’ancienne province de Quang Nam. C’est là qu’un villageois avait enterré le martyr Nguyên Duc Yên, à l’orée d’une forêt, après une violente bataille.

Le cadet, Nguyên Duc Thanh né en 1945, a suivi le même chemin, entrant au service photo en 1965. Travailleur et généreux, il a été affecté au site d’évacuation T6B dans la commune de Phuong Cach, ancien district de Quôc Oai (aujourd’hui la commune de Quôc Oai, à Hanoï), avant d’être envoyé en 1968 à l’Agence de presse de libération. Le jour de son départ, il a serré son père et son petit frère dans ses bras, leur laissant quelques galettes de ration - un adieu qu’ils ne savaient pas être le dernier. Le 8 mai 1968, la famille a reçu la nouvelle de sa mort héroïque.

Nguyên Duc Dông garde le souvenir d’un frère attentionné, pédalant des kilomètres depuis l’établissement T6B pour lui rendre visite dans la commune de Hoài Duc à Hanoï, les bras chargés de petites douceurs et de conseils affectueux. Avant de tomber, M. Thanh avait écrit une lettre où il décrivait quinze jours de marche éprouvante : rizières immenses, ruisseaux et montagnes baignés de tirs et de bombardements, mais aussi la beauté indestructible de la patrie. Ce témoignage sincère, empli d’amour pour son pays et de tendresse pour sa famille, est aujourd’hui conservé à la salle des traditions de l’Agence Vietnamienne d’Information.

Pendant des années, sa tombe est restée introuvable. Finalement, grâce aux recherches et au soutien de spécialistes, ses restes ont été localisés dans un cimetière de Hà Tinh (Centre). Pour la famille, ramener ces deux frères au foyer, c’était enfin refermer une plaie ouverte depuis des décennies.

Ces destins individuels composent le portrait d’une génération vouée à l’idéal révolutionnaire. Journalistes de guerre de l’Agence Vietnamienne d’Information, ils n’étaient pas de simples témoins, mais de véritables soldats de l’information, conscients que chaque mot pouvait nourrir la lutte. Leur engagement dépassait la profession : il impliquait le renoncement à l’amour, à la jeunesse, à l’avenir. Aujourd’hui, les musées et les familles gardent leurs portraits comme autant de récits de courage et de foi. Leur mémoire rappelle que la vérité a un prix, parfois celui de la vie, et continue d’inspirer la presse vietnamienne.

Phuong Thanh - Dan Thanh/CVN

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