Les tunnels de Cu Chi font sensation dans les salles obscures

Sorti le 4 avril, Dia dao : Mat troi trong bong tôi (Tunnel : Le Soleil dans l’obscurité), signé Bùi Thac Chuyên, retrace l’héroïsme d’une unité de guérilleros pendant la guerre du Vietnam. Réalisme poignant, mise en scène immersive et souffle patriotique : ce film vietnamien, encensé par le public et la critique, pulvérise les records au box-office national.

>> Tunnels rafle le box-office, engrangeant près de 800.000 dollars en une seule journée

>> Tunnels : Soleil dans l’obscurité, secrets d’histoire et de tournage

>> Tunnels : Soleil dans l’obscurité suscite les circuits historiques à Hô Chi Minh-Ville

Le poster du film "Dia dao : Mat troi trong bong tôi" (Tunnel : Le Soleil dans l’obscurité) du réalisateur Bùi Thac Chuyên. 
Photo : CTV/CVN

Après seulement trois jours d’exploitation dans les salles obscures vietnamiennes, Dia dao : Mat troi trong bong tôi, titré en anglais Tunnel : Sun in the dark, avait déjà engrangé plus de 63 milliards de dôngs (au 7 avril). Le film a même dépassé des superproductions internationales comme Minecraft, le film ou A Working Man (Un homme qui travaille). Le 10 avril, il a franchi la barre des 100 milliards, devenant ainsi le premier film vietnamien historique sur la guerre à atteindre ce seuil.

Au 24 avril, les recettes cumulées ont dépassé les 156 milliards de dôngs, selon les données de Box Office Vietnam, une société qui observe l’activité des salles obscures du pays et analyse les statistiques de recettes des films. La production de Bùi Thac Chuyên se hisse ainsi parmi les plus grands succès du cinéma historique vietnamien.

D’une durée de 128 minutes, le film s’inspire de faits réels survenus en 1967, à la suite de l’opération Cedar Falls - une vaste contre-offensive américaine dans la région du “Triangle de fer” (Bên Suc - Cu Chi - Bên Cat). Il suit les pas d’une unité de 21 guérilleros basée dans les tunnels de la base militaire de Binh An Dông, au Sud.

Depuis sa sortie, "Tunnel : Sun in the dark" fait salle comble.
Photo : CTV/CVN

Sous les ordres de Bay Theo (interprété par Thái Hòa), la guérilla protège - en apparence - les équipements médicaux d’un hôpital de campagne. Mais leur véritable mission est stratégique : garantir le bon fonctionnement d’un réseau de renseignement dirigé par Hai Thung (Hoàng Minh Triêt), chargé de transmettre des informations confidentielles via ondes radio et d’infiltrer les communications ennemies. Repérées par les Américains, ces transmissions provoquent une intensification des campagnes de destruction des tunnels. Dans ce climat étouffant, une histoire d’amour naît entre Ba Huong (Hô Thu Anh) et Tu Dap (Quang Tuân), apportant une note de tendresse et de poésie au cœur du tumulte.

Dans la dernière partie, le réalisateur donne la parole aux véritables héros de Cu Chi. Leurs récits s’entrelacent avec des images d’archives, renforçant le sentiment que le film, aussi puissant soit-il, ne peut qu’esquisser la réalité d’une époque aussi violente qu’héroïque. Une séquence bouleversante qui ancre l’œuvre dans une réalité historique brutale mais profondément humaine.

Renforcer le patriotisme et la fierté nationale

Depuis sa sortie, Tunnel : Sun in the dark suscite un vif engouement. Médias, réseaux sociaux, critiques professionnels comme spectateurs, tous saluent son impact émotionnel et esthétique. Le scénario, la direction d’acteurs, la bande-son et la mise en scène sont unanimement loués.

 Bay Theo (interprété par Thái Hòa), chef de la guérilla. 

Dang Trân Cuong, directeur du Département du cinéma du Vietnam, écrit sur son compte Facebook : “Le film ne se contente pas de reconstituer une partie de l’histoire nationale, à la fois douloureuse et héroïque, il véhicule aussi des messages forts sur le patriotisme, le sacrifice et l’aspiration à la paix. C’est une œuvre dont notre 7e art peut être fier”.

L’écrivain Bao Ninh, auteur du célèbre roman Nôi buôn chiên tranh (La Tristesse de la guerre), salue, lui aussi, la sincérité et l’émotion du film. “Je trouve qu’il n’a rien à envier à des productions américaines comme +Il faut sauver le soldat Ryan+. Rien ne sonne faux, les acteurs jouent juste, et les dialogues sont criants de vérité. Pour quelqu’un qui a vécu la guerre, vu les bombardements, le rendu à l’écran est bluffant, vraiment particulier”, confie-t-il.

Le réalisateur Nguyên Huu Tuân souhaite que le film soit proposé pour représenter le Vietnam à la présélection de l’Oscar du Meilleur film international l’an prochain. Quant au réalisateur américain d’origine vietnamienne Charlie Nguyên, il estime : “Ça fait longtemps que je n’avais pas vécu une expérience cinématographique aussi forte. Ce film mérite d’être diffusé dans le monde entier, pas seulement au Vietnam”.

Le critique de cinéma Lê Hông Lâm abonde dans ce sens, estimant que cette production devrait être présentée dans un grand festival international.

Des scènes captivantes du film. 
Photos : CTV/CVN

Sur son compte Facebook, Ngoc Linh, une spectatrice hanoïenne, écrit : “Après avoir vu le film, j’ai mieux compris le sens du titre et la symbolique du Soleil, comme l’a expliqué Bùi Thac Chuyên : le Soleil dans l’obscurité représente l’aspiration à la paix”. Elle évoque aussi le témoignage de l’ancien l’Héros des forces armées populaires Tô Van Duc (qui inspire le personnage de Tu Dap), qui a raconté avoir bu du thé dans les tunnels en rêvant du jour où il pourrait le faire sous la lumière du soleil.

Ce film est d’un réalisme à couper le souffle. Il nous fait prendre conscience du bonheur de vivre aujourd’hui. C’est grâce à des films comme celui-ci, qui reconstituent l’histoire avec autant de force, qu’on mesure combien la paix est précieuse”, exprime Thùy Trang avec fierté à la sortie d’une salle obscure à Hô Chi Minh-Ville.

Une production assurée par un cinéaste de marque

Qu’il s’agisse de courts ou de longs métrages, diffusés à la télévision ou projetés en salle, et quel que soit le sujet, le nom de Bùi Thac Chuyên s’impose comme un véritable gage de qualité. Lors de l’avant-première de Tunnel : Sun in the dark à Hanoï, le 2 avril, le réalisateur a confié qu’il avait été profondément ému lors d’une visite de Cu Chi il y a 11 ans.

Situé à environ 60 km de Hô Chi Minh-Ville, ce site avait abrité pendant la guerre du Vietnam une base révolutionnaire que la plus grande puissance impérialiste ne pouvait pas faire tomber. Il s’agit d’un système de tunnels souterrains s’étendant sur 250 km et construits par les habitants eux-mêmes. “À ce moment-là, je me suis dit qu’il fallait absolument que je fasse un film sur cet endroit historique. Et j’ai aussi réalisé qu’il n’y avait pas encore eu de production cinématographique sur ces tunnels”, explique le cinéaste.

Tunnel : Le Soleil dans l’obscurité est le premier film sur l’histoire de la révolution vietnamienne à être financé par des fonds privés. Son budget de production s’élève à plus de 50 milliards de dôngs, dont une part importante a été consacrée à l’aménagement d’un studio de tournage où ont été fidèlement reproduits des tronçons de tunnels de 250 m (construits en six mois) semblables à ceux de Cu Chi. Le budget a également permis de mettre en place des scènes spectaculaires de bombardements, de combats, d’opérations de ratissage menées par les Américains avec chars et hélicoptères, ainsi qu’à la reconstitution des costumes, entre autres.

Bùi Thac Chuyên, réalisateur du film "Dia dao : Mat troi trong bong tôi".
Photo : VNA/CVN

Avec le soutien du ministère vietnamien de la Défense, Bùi Thac Chuyên a mobilisé un arsenal impressionnant de véhicules et d’armes utilisées par l’armée américaine pendant la guerre du Vietnam, ce qui a renforcé l’authenticité des scènes d’affrontement entre l’armée américaine et les guérilleros vietnamiens, rendant le film d’autant plus immersif et captivant. À savoir : des chars M-48 Patton, des blindés M113 ACAV, des hélicoptères UH-1 Iroquois, des vedettes rapides Swift Boats (PCF), des péniches de débarquement LCM-8.

Les scènes et les angles de prise de vue choisis par le réalisateur restituent avec un réalisme saisissant l’univers confiné et obscur des tunnels, à tel point que les spectateurs se sentent à plusieurs reprises oppressés, contraints d’inspirer profondément comme pour compenser le manque d’oxygène à l’écran. On assiste ainsi à des scènes où les tunnels essuient des pluies de bombes, où la poussière envahit l’espace, où des Américains relâchent des gaz toxiques à l’entrée des galeries, ou encore à celle d’un jeune guérillero asthmatique, luttant pour respirer dans un souffle rauque…

Dia dao : Mat troi trong bong tôi est plébiscité par le public comme “un film qui renforce le patriotisme”. Cette production devrait continuer à faire sensation tout au long du mois d’avril, coïncidant avec les célébrations du 50e anniversaire de la Journée de la libération du Sud et de la réunification nationale (30 avril).

Bùi Thac Chuyên, un gage de qualité

Le réalisateur-scénariste Bùi Thac Chuyên est né en 1968 à Hanoï. Il est formé à l’École de théâtre et de cinéma de Hanoï et devenu comédien au Théâtre dramatique du Vietnam en 1995. En 1997, il se réoriente vers une carrière de réalisateur et se fait remarquer avec Cuôc xe dêm (Course de cyclo nocturne), premier film vietnamien primé dans la catégorie “Courts-métrages & Cinéfondation” du Festival de film international de Cannes. En 2005, sa production Sông trong so hai (Vivre dans la peur) reçoit plusieurs distinctions nationales et internationales. En 2022, Tro tàn ruc ro (Cendres glorieuses), adapté de la nouvelle du même nom de l’écrivaine Nguyên Ngoc Tu, a remporté plusieurs prix, dont le Lotus d’Or au Festival du film vietnamien de 2023. Parallèlement à sa carrière de cinéaste, Bùi Thac Chuyên s’investit dans la formation des jeunes talents. En 2002, il fonde le Centre de soutien au développement des talents du cinéma (TPD), rattaché à l’Association du cinéma du Vietnam.

Linh Thao/CVN

Rédactrice en chef : Nguyễn Hồng Nga

Adresse : 79, rue Ly Thuong Kiêt, Hanoï, Vietnam

Permis de publication : 25/GP-BTTTT

Tél : (+84) 24 38 25 20 96

E-mail : courrier@vnanet.vn, courrier.cvn@gmail.com

back to top