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Le président du Consortium USTH, Jean-Paul Deroin (2e à droite), lors d’une Assemblée générale du Consortium, le 23 mai, à l'Université d'Aix-Marseille, en France. |
Photo : USTH/CVN |
Né en 2010 à la suite d’un accord intergouvernemental entre la France et le Vietnam, le Consortium USTH incarne une ambition commune : structurer une université d’excellence à Hanoï selon les standards internationaux. Constituée sous forme d’association à but non lucratif, cette structure regroupe des établissements d’enseignement supérieur, des organismes de recherche français, et progressivement, des partenaires privés.
“Les missions sont clairement définies dans nos statuts. C’est avant tout promouvoir l’Université des sciences et technologies de Hanoï (USTH) dans toutes ses activités auprès de nos membres”, rappelle Jean-Paul Deroin, président du Consortium. Ce rôle de soutien s’exerce aussi dans la réflexion stratégique : “Nos missions, c’est aussi, en concertation avec le rectorat de l’USTH, de réfléchir à de nouveaux partenariats”.
Le Consortium revendique aujourd’hui une trentaine de membres, “dont 22 d’universités, des écoles et des établissements de recherche, des organismes de recherche”, précise M. Deroin.
“Actuellement, l’USTH développe de nouvelles formations dans les domaines des mathématiques, de la pharmacie… Ce sont des points sur lesquels nous pouvons fortement accompagner son développement”, poursuit-il.
Interface institutionnelle stratégique
Mais l’action du Consortium dépasse le champ académique. Il agit aussi comme interface institutionnelle entre les deux gouvernements. “Nous sommes l’interlocuteur vis-à-vis des ministères, notamment de celui de l’enseignement supérieur et des affaires étrangères, qui nous soutiennent. C’est extrêmement important pour l’USTH”, insiste Jean-Paul Deroin.
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Le Pr. Jean-Paul Deroin, président du Consortium USTH. Photo : USTH/CVN |
Ce rôle s’exerce également à travers la participation directe au Conseil d’université, où siègent dix membres vietnamiens et dix membres français. “Je suis l’un des dix membres français du conseil d’université de l’USTH, proposé par l’ambassade de France. C’est aussi un rôle important du Consortium par rapport au fonctionnement global, aux informations et aux échanges”, précise le président du Consortium. Il souligne par ailleurs la volonté partagée avec le recteur Jean-Marc Lavest d’élargir l’implication de l’université dans les commissions de travail.
À la suite de la visite au Vietnam du président français Emmanuel Macron du 25 au 27 mai dernier, le Consortium a reçu la confirmation du renouvellement de sa subvention pour l’année à venir, lui assurant, malgré un contexte budgétaire complexe en France, un financement raisonnable pour poursuivre ses activités.
Dynamique par nature, le Consortium connaît un renouvellement constant de ses membres. Certains établissements le quittent, d’autres reviennent, comme l’Université Grenoble Alpes. Ce modèle souple accueille aussi bien de grandes universités de recherche, à l’image de Paris Cité, qualifiée de “moteur” de “phare” par M. Deroin, que des universités plus modestes engagées sur des thématiques ciblées : informatique, nanotechnologies, médecine…
Depuis deux ans, sous l’impulsion de son président, le Consortium renforce ses liens avec des établissements stratégiques. “Nous avons relancé des contacts avec l’Université Grenoble Alpes, et nous visons aussi à reprendre contact avec des organismes” français comme le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) ou le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), notamment autour des enjeux liés à l’hydrogène décarboné.
L’ouverture vers le secteur privé s’intensifie également. Sanofi, Mérieux, L’Oréal, Airbus, Vaeco… autant de grands groupes intéressés par les partenariats avec l’USTH, notamment dans la formation de futurs biologistes et pharmaciens. “Parce qu’en ce moment, on est plus près de la formation pour le futur. Quand on a, par exemple, aujourd’hui un département de pharmacie, bien évidemment, il est intéressant d’avoir une usine qui va fabriquer des vaccins”, commente le président du Consortium.
Le 26 mai dernier, la société vietnamienne VNVC et Sanofi ont signé un accord de coopération pour le transfert de technologie dans le domaine vaccinal, avec, dès le lendemain, le lancement des travaux d’une usine à Long An. Un projet emblématique de la coopération industrielle franco-vietnamienne qui illustre l’ancrage du Consortium dans les dynamiques d’innovation. “Ce sont des liens à creuser”, reconnaît M. Deroin.
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La délégation du Consortium USTH en visite de travail à l’USTH en mai 2023. |
Photo : USTH/CVN |
“Le Consortium a vocation à s’interroger sur l’avenir : enseignement, formation, partenariats… Aujourd’hui, il n’y a pas encore de membres issus de l’économie alimentaire, de la santé ou de l’industrie lourde. Mais leur implication implicite existe, comme Airbus par exemple”.
Pas figé, loin de là, le Consortium évolue avec son temps. Sa mission initiale - “favoriser cette université” - reste intacte, mais se double aujourd’hui d’une volonté d’ouverture et de diversification des synergies. “Le Consortium est là pour que l’USTH se développe au mieux et que ses membres y trouvent leur intérêt”, conclut-il.
Après plus d’une décennie consacrée à la consolidation des formations de Master et à la recherche doctorale, l’heure est désormais à l’élargissement de son action. “Il y a des masters, il y a des labos. C’était clair au début, mais il y a de nouveaux masters qui sont créés”, observe le président du Consortium, évoquant notamment les nouvelles filières en mathématiques, en biologie pour la santé ou encore en sciences pharmaceutiques.
Ce renouvellement démontre une dynamique continue que le Consortium entend accompagner étroitement. “C’est à nous maintenant de jouer un rôle majeur dans le développement au niveau bachelor”, affirme-t-il, soulignant ainsi un recentrage stratégique sur les premiers cycles, encore peu couverts par les coopérations internationales. Cette nouvelle orientation vise à structurer dès l’amont les parcours d’excellence à l’USTH, tout en renforçant la continuité entre licence, master et doctorat dans une logique de filières intégrées.
Un moteur pédagogique
L’empreinte du Consortium reste décisive sur le terrain pédagogique. Au-delà de la mobilisation d’universitaires français dans les enseignements, sa contribution s’est traduite par une politique doctorale ambitieuse. “Il y a eu à peu près 90 thèses qui ont été faites en France. Sur ces 90, je crois qu’il y a 80 thésards à peu près qui sont revenus, qui sont enseignants-chercheurs”, explique M. Deroin, visiblement fier du succès de cette politique, au point de mentionner son propre ancien doctorant.
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Cours de travaux pratiques à l’Université des sciences et technologies de Hanoï. |
Photo : USTH/CVN |
Cette réussite illustre l’un des objectifs fondateurs du Consortium : former une génération de “jeunes cadres vietnamiens dans la recherche et l’enseignement supérieur”. Toutefois, les conditions de financement évoluent : “Il faut poursuivre la politique de thèse peut-être sur un modèle un peu différent, car ce n’est pas forcément soutenable sur un temps long”, prévient-il.
Les difficultés de financement, tant du côté vietnamien que français, imposent une adaptation des dispositifs de soutien.
À l’heure d’évaluer les résultats, M. Deroin se montre à la fois lucide et confiant. “Le Consortium a contribué à la formation”, rappelle-t-il, tout en soulignant la nécessité de trouver un second souffle. Ce dernier pourrait venir de nouveaux partenariats, d’un élargissement vers le secteur privé ou encore de projets conjoints innovants avec des organismes de recherche. Mais les défis ne manquent pas : identification de ressources, fidélisation des établissements partenaires, adaptation des formats pédagogiques et maintien du niveau d’excellence dans un contexte international concurrentiel.
Le modèle initial n’est “pas figé”, affirme-t-il, et l’ouverture à “d’autres liens” apparaît comme une piste naturelle pour pérenniser la dynamique enclenchée depuis 2010. Dans cette perspective, le Consortium reste plus que jamais l’un des moteurs les plus stratégiques de l’USTH.
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Dô Thi Thùy Trang, directrice adjointe en charge des relations internationales à l’USTH. Photo : USTH/CVN |
Grâce au Consortium, les étudiants bénéficient directement de la structure unique du consortium franco-vietnamien. Grâce à ce partenariat stratégique, ils accèdent à des formations de haut niveau, à la fois localement et à l’international. Comme le souligne Dô Thi Thùy Trang, directrice adjointe en charge des relations internationales à l’USTH (ICO) : “Le consortium, est ici une réalité, la majorité des étudiants viennent des établissements partenaires”, au-delà des conventions intergouvernementales.
Chaque année, environ 100 étudiants internationaux sont accueillis, majoritairement français, mais pas exclusivement. Ils viennent suivre des cours entiers, effectuer des stages ou même s’inscrire à un cycle complet de licence à l’USTH. En retour, les étudiants vietnamiens bénéficient de mobilités sortantes facilitées, que ce soit dans le cadre de stages ou de doubles diplômes. L’accueil administratif personnalisé - visas, logement, intégration - joue un rôle déterminant dans leur réussite. “C’est vraiment un facilitateur de vie au quotidien”, se félicite Mme Trang.
Une stratégie ambitieuse
L’USTH se distingue par la co-construction rigoureuse de ses cursus avec les universités françaises membres du Consortium. Dès le master, six programmes sont co-habilités, dispensés intégralement à Hanoï, mais alignés sur les standards pédagogiques français. “Ce sont les programmes français, des universités françaises, des programmes vraiment très standards”, précise la directrice adjointe. Ils débouchent sur un double diplôme reconnu des deux côtés.
Depuis 2021, ce modèle s’étend au niveau licence avec un schéma “2+1” : deux années à l’USTH, une en France - ou l’inverse pour les étudiants français. Trois filières sont actuellement concernées : chimie, TIC et biotechnologie. Le choix de ces disciplines repose autant sur la solidité académique de l’université que sur leur attractivité pour les étudiants et leurs familles.
Le rayonnement de l’établissement se manifeste également par les enseignants-chercheurs étrangers - environ 140 par an - qui séjournent plus longtemps pour assurer une mission multiple : cours, recherche, encadrement. “Maintenant, ils vont rester un peu plus longtemps… et aussi pour travailler avec les enseignants-chercheurs de l’établissement concernant les sujets de recherche”. Cette évolution qualitative des missions souligne la maturité du partenariat et la montée en puissance de la recherche conjointe.
Le Consortium n’est pas un simple support : il incarne la volonté bilatérale de construire un modèle universitaire original. “La force de l’université, c’est vraiment son consortium”, insiste-t-elle.
En somme, l’USTH incarne une nouvelle génération d’établissements, où mobilité, excellence académique et diplomatie universitaire se conjuguent pour former un véritable pont entre la France et le Vietnam.
Le département des relations internationales joue un rôle central dans la gestion des mobilités, la coordination des projets internationaux et l’accueil des enseignants invités. “Environ 200 enseignants-chercheurs français interviennent plus d’une vingtaine d’heures par an”, précise Mme Trang.
Le nombre d’étudiants étrangers est en hausse, notamment en provenance d’Asie du Sud-Est, pour des programmes courts ou des stages. En combinant la gouvernance binationale, l’excellence pédagogique et l’ancrage local, le Consortium constitue une expérience unique en Asie. Il illustre comment une volonté politique peut se traduire par une architecture universitaire innovante.
Alors que l’USTH se prépare à franchir de nouveaux paliers, le Consortium apparaît comme le véhicule idéal pour déployer une stratégie scientifique ambitieuse au service des deux pays, et bien au-delà.
Diêu Thuy/CVN