“Village d’héritage agricole”, l’ambitieux projet d’une femme Muong

D’ethnie Muong, Ðinh Thi Huyên aspire à faire en sorte que les communautés ethniques minoritaires puissent se développer davantage et être fières de leur culture. Elle s’est ainsi lancée dans la concrétisationde son rêve : construire un “Village d’héritage agricole”.

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Nous rencontrons Ðinh Thi Huyên au village de Buot, dans la commune de Chiêng Yên, district de Vân Hô, province montagneuse de Son La (Nord), un jour de printemps. Si personne ne nous l’avait présentée, nous n’aurions probablement pas vu en la jeune femme vêtue d’un simple T-shirt et d’un jean, occupée à apporter des boissons aux invités, une directrice d’entreprise.

“Ici, nous l’appelons souvent la directrice aux +pieds nus+, car Huyên apparaît rarement en costume ou en robe. Elle est le plus souvent vêtue comme une agricultrice, une serveuse ou une livreuse”, explique en souriant Ngân Thi Oanh, une femme d’ethnie Thai.

Assise au pied de la maison communautaire sur pilotis - Agritage Hill, Ðinh Thi Huyên nous partage les rêves autour de son projet de construction du “Village d’Agritage” (abréviation de deux mots : Agriculture et Héritage). Née à Hòa Bình (Nord), liée à son village depuis l’enfance, elle a étudié dans une école internat pour les minorités ethniques de la province, où se rassemblent de nombreux élèves de différentes ethnies. Huyên a perçu chez elle-même et chez de nombreux autres membres des minorités ethniques un complexe d’infériorité, un manque de confiance en soi.

“Beaucoup d’entre nous, moi y compris, ont des doutes. Nous nous demandons souvent si être membre d’une minorité ethnique signifie être inférieur et que devons-nous faire pour nous développer en tirant parti de nos différences culturelles”, raconte-t-elle.

Agriculture bio et écotourisme

Ayant l’ambition de s’affirmer et d’apporter de la valeur à sa communauté, Huyên a déployé des efforts pour poursuivre des études à l’Université des sciences sociales et humaines de Hanoï et participer à un programme de formation organisé par l’ambassade des États-Unis au Vietnam. Au cours de ses études aux États-Unis, elle a eu l’occasion d’interagir avec de nombreuses femmes entrepreneures, acquérant ainsi une compréhension appro-fondie sur le fonctionnement des entreprises.

À la fin de sa formation, interrogée sur ses projets futurs, Ðinh Thi Huyên n’a pas hésité à exprimer le souhait de retourner au Vietnam en appliquant ce qu’elle avait appris sur le rôle des femmes et le modèle d’entreprises à petite échelle dirigées par des femmes. Son objectif était que les femmes des minorités ethniques puissent établir une base économique pour elles-mêmes et contribuer à la communauté. Huyên a choisi d’exploiter les différences culturelles pour aider au dynamisme économique des communautés ethniques minoritaires. Elle a décidé de fonder le Centre de coopération pour le développement du Nord-Ouest (TABA) avec comme vision de construire et de mettre en valeur l’écosystème d’agritage du Vietnam.

“La plus grande motivation pour moi de développer cette entreprise sociale est de voir les communautés ethniques avoir des opportunités d’emploi localement et avoir confiance en leur culture”, partage-t-elle.

Ðinh Thi Huyên (chemise bleue) accompagne les paysans dans un cours d’étude de la culture autochtone au service des touristes séjournant au “Village d’héritage agricole” dans le village de Buot.

Et c’est ainsi qu’a vu le jour le modèle de “Village d’héritage agricole” dans le village de Buot. “Celui-ci a été choisi pour développer ce modèle où les autorités locales, les entreprises et les agriculteurs s’engagent ensemble à pratiquer l’agriculture bio et à développer l’écotourisme. L’objectif est de présenter aux visiteurs la culture, la nature et les habitants de la région Nord-Ouest”, affirme Ðinh Thi Huyên.

Selon elle, lorsqu’une femme décide de participer aux activités économiques, cela montre qu’elle veut affirmer son rôle dans la famille et la société. “Malgré les difficultés, les femmes des minorités ethniques continuent de s’émanciper. Nombre d’entre elles sont devenues des guides touristiques chevronnées. Je souhaite qu’elles se libèrent un peu des obligations familiales pour être plus autonomes”, confie-t-elle.

Le village de Buot fait peau neuve

Auparavant, la vie des villageois de Buot était assez difficile, axée principalement sur l’autosuffisance, et pour gagner de l’argent, beaucoup d’entre eux devaient chercher du travail à l’extérieur. Cependant, depuis le déploiement du modèle de “Village d’héritage agricole”, leurs conditions de vie se sont nettement améliorées.

“Nous avons été formées en groupes de travail. Nombre d’entre nous n’avaient jamais quitté le village auparavant et ne connaissaient rien au tourisme ni à l’accueil des visiteurs. Maintenant, nous savons cuisiner des plats et accueillir de manière professionnelle les touristes”, informe Ngân Thi Oanh qui participe au projet depuis trois ans.

En particulier, la transition vers l’agriculture bio a aidé à réduire les coûts, les produits se vendent à des prix plus élevés, le niveau de vie des habitants s’est amélioré, et l’environnement autour du village est plus propre et plus beau qu’auparavant. “Nous pouvons maintenant vendre nos produits agricoles aux touristes, aux coopératives, et nous assurer des revenus stables de deux à trois millions de dôngs par mois”, ajoute-t-elle.

Évoquant les difficultés rencontrées lors de la création de ce premier modèle de Village d’héritage agricole au Vietnam, Ðinh Thi Huyên se souvient encore des premiers jours où elle frappait à chaque porte, tentant de persuader les habitants d’y participer. En plus de cela, le passage à l’agriculture bio a également présenté de nombreux obstacles, avec au début des problèmes de parasites et des pertes de récoltes. Même la formation des femmes sur la cuisine, l’accueil des touristes, etc. a exigé une détermination considérable.

“Il nous a fallu environ deux ans avec de nombreuses sessions de formation pour persuader les habitants. Désormais, nous sommes confiants en leurs capacités d’accueil des visiteurs sans le soutien du TABA”, indique-t-elle.

La jeune femme d’ethnie Muong souhaite que le modèle “Village d’héritage agricole” dévéveloppé au village de Buot sera étendu à d'autres localités du pays.  

Parlant des objectifs futurs, Ðinh Thi Huyên déclare que son centre continuera de collaborer avec les habitants afin de soutenir les activités touristiques, de transformer les produits agricoles de manière durable. Il s’agit aussi de créer des marques de spécialités de montagne telles que prunes confites, chè lam (bonbons de riz gluant aux noisettes et au gingembre), keo lac (bonbons aux arachides), lait de noix, huiles essentielles, etc., afin d’augmenter les revenus.

“Forts du succès du premier modèle de +Village d’héritage agricole+ à Buot, dans le futur, nous en multiplierons d’autres ailleurs avec le souhait d’accompagner le développement économique des communautés ethniques basé sur l’exploitation de leurs propres caractéristiques culturelles”, affirme avec enthousiasme la jeune femme d’ethnie Muong.

Texte et photos : Phuong Mai/CVN

 

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