Les clés d’un projet nucléaire réussi

Le projet nucléaire vietnamien est à une croisée des chemins. Le choix de la technologie, des partenaires et la formation des experts sont des défis complexes qui exigent une réflexion approfondie.

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Le nucléaire est souvent cité comme une réponse efficace aux défis énergétiques futurs.
Photo : AFP/VNA/CVN

Selon l’expert en énergie Dào Nhât Dinh, le nucléaire apparaît comme une alternative prometteuse aux énergies fossiles, en particulier grâce à ses niveaux de sécurité élevés et à ses faibles émissions de gaz à effet de serre.

“Face à l’épuisement progressif des ressources hydroélectriques et à l’instabilité des marchés énergétiques mondiaux, le Vietnam envisage de plus en plus le nucléaire comme un moyen de garantir sa sécurité énergétique à long terme et de réduire sa dépendance aux énergies fossiles”, souligne M. Dinh.

Selon lui, le choix de la technologie et de l’échelle de déploiement devra être pris avec soin pour garantir la réussite de ce projet ambitieux

“Les réacteurs nucléaires de 100 MW sont inadaptés aux besoins énergétiques actuels. Leur faible capacité de production ne justifie pas les coûts d’investissement élevés, surtout si l’on considère que les exigences en matière de sûreté et d’exploitation restent comparables à celles des réacteurs de plus grande taille”, estime l’expert.

D’après M. Dinh, le choix d’un réacteur nucléaire de 3e génération (réacteur III+) a été mentionné dans le plan de déploiement de l’énergie nucléaire du Vietnam pour le projet de Ninh Thuân. Le Japon lui-même utilise ce type de réacteur avec de nombreuses améliorations, et il est démontré qu’il est de plus en plus sûr.

De nombreux avantages

Les préoccupations concernant les déchets radioactifs et les combustibles usés après la combustion ne sont pas des problèmes insolubles.

“Il est impératif de s’engager résolument dans le développement de l’énergie nucléaire. En parallèle, il est indispensable de renforcer la formation du personnel, afin de pallier les départs et les ruptures de parcours observés ces dernières années”, insiste M. Dinh. Avant d’ajouter : “Le manque de personnel spécialisé dans le domaine nucléaire constitue un frein majeur à la mise en œuvre de projets ambitieux dans ce secteur. Des programmes de formation intensifs doivent être mis en place pour former les futurs experts vietnamiens. Un autre problème crucial est de trouver un partenaire à long terme pour le Vietnam dans le développement de l’énergie nucléaire et la fourniture de capitaux”.

Les experts du secteur énergétique s’accordent à dire que le moment est propice pour relancer le projet de développement de l’énergie nucléaire au Vietnam. En effet, contrairement aux centrales à charbon qui nécessitent d’importants espaces de stockage, les centrales nucléaires offrent une solution compacte et efficace, permettant de stocker plusieurs années de combustible dans un espace réduit.

Les études démontrent que l’énergie nucléaire présente un facteur de charge nettement supérieur aux autres sources d’énergie. Une centrale nucléaire de 1.000 MW peut produire en moyenne 92% de sa puissance maximale, contre 56% pour une centrale à gaz.

Les énergies renouvelables, comme l’éolien et le solaire, affichent des facteurs de charge encore plus faibles, respectivement de 35,4% et 24,9%. Cela signifie qu’avec une puissance installée donnée, une centrale nucléaire efficace est équivalente à deux centrales électriques à gaz, trois parcs éoliens ou quatre solaires.

Le Professeur associé-Docteur Vuong Huu Tân, ancien directeur du Département de la sécurité radiologique et nucléaire (ministère des Sciences et des Technologies), tout en reconnaissant le retard pris dans le domaine nucléaire, souligne les perspectives prometteuses qu’offre cette source d’énergie.

Le Vietnam a investi de manière significative dans la formation de ressources humaines qualifiées pour le projet de centrale nucléaire de Ninh Thuân. Grâce à des partenariats avec la Russie, le Japon et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), plus de 300 experts ont été formés, assurant ainsi un socle de compétences solides pour la mise en œuvre et la gestion de ce projet stratégique.

Le Vietnam a adopté une Loi sur l’énergie nucléaire en 2008, posant ainsi les bases juridiques du développement de ce secteur.

Petit réacteur modulaire

Un petit réacteur nucléaire à l’essai au laboratoire national de l’Idaho, aux États-Unis.
Photo : CTV/CVN

Lê Dai Diên, ancien directeur adjoint du Centre de formation nucléaire (Institut vietnamien de l’énergie atomique), souligne l’importance de préparer minutieusement la relance du projet de première centrale nucléaire. À son avis, le Vietnam doit prioriser la mise en place de mécanismes de financement solides, la formation du personnel hautement qualifié et le strict respect des normes de sûreté afin de garantir le succès de ce projet stratégique.

La mobilisation des financements pour le nucléaire nécessitera une expertise conjointe en politiques publiques et en finance. Par ailleurs, toute collaboration avec des partenaires étrangers devra s’appuyer sur un cadre juridique solide, intégrant à la fois la législation vietnamienne et les normes internationales en vigueur. À cet égard, la Loi sur l’énergie nucléaire, datant de 2009, nécessite une révision approfondie afin de s’adapter aux évolutions récentes du secteur.

Selon M. Diên, les petits réacteurs modulaires (SMR- Small Modular Reactor en anglais) apparaissent comme la technologie la plus prometteuse pour le premier projet nucléaire vietnamien. En effet, ces réacteurs, plus sûrs et moins encombrants que leurs prédécesseurs, présentent de nombreux avantages : un cycle de vie prolongé, des coûts de construction réduits et des délais de réalisation plus courts. Ces caractéristiques en font une solution particulièrement adaptée aux contraintes spécifiques du contexte vietnamien, notamment en termes de ressources humaines.

Pourtant, il s’agit pour l’instant de perspectives. En effet, selon l’AIEA, de nombreux modèles de SMR sont encore en phase de développement, avec des degrés de maturité technologique très variables.

M. Diên plaide en faveur du réacteur VVER-1200 (AES-2006) pour le projet de Ninh Thuân 1, en mettant en avant son exploitation réussie dans plusieurs pays et les avantages d’un transfert de technologie éprouvée.

Les experts du secteur évaluent que les premiers projets de SMR seront confrontés à des coûts de construction élevés en raison de leur caractère novateur. Bien que leur avenir s’annonce prometteur, avec des coûts de production d’électricité susceptibles de devenir compétitifs à moyen terme, leur déploiement à grande échelle ne devrait pas se concrétiser avant la seconde moitié du XXIe siècle. L’Indonésie, par exemple, envisage d’intégrer les SMR à son mix énergétique à partir de 2050.

Pham Tuyên - Huong Linh/CVN

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