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Une quinzaine d’années représentent une étape majeure dans la vie d’un individu, une période au cours de laquelle de nombreux projets se construisent. Pour Siu Un (domicilié dans le hameau de Tân Diêp 1, commune d’Ia Ake, district de Phu Thiên, province de Gia Lai sur les hauts plateaux du Centre), cette période a été celle d’une longue peine de prison. Son cas souligne la dureté des sanctions pénales, mais aussi les possibilités de réinsertion offertes par le Parti, l’État et la société. La décision de le libérer témoigne d’une volonté de lui permettre de retrouver sa place au sein de la communauté et de se reconstruire.
Propagande des forces hostiles
L’homme, le teint hâlé, garde encore en mémoire les événements qui ont marqué sa famille dans les années 2000. Il se souvient avoir été désigné, par des documents liés au Fulro (Front uni de lutte des races opprimées) et notamment aux figures de Ksor Kok et Rah Lan Nglol, comme responsable de certaines activités dans la région d’Ayun Pa, qui englobait alors l’actuelle commune d’Ayun Pa et le district de Phu Thiên, ainsi que dans la zone d’Ea H’leo. Ces accusations ont profondément bouleversé sa vie et celle de sa famille.
Manipulé par une idéologie séduisante et des promesses de changement, cet homme de l’ethnie Gia Rai a été incité à s’engager activement dans des actions illégales. La perspective d’un soutien international l’a encouragé à croire en l’infaillibilité de cette cause.
Nouvelle maison de Siu Un dans la commune d’Ia Ake, district de Phu Thiên, province de Gia Lai. |
“Condamné en 2021 à seize ans de réclusion criminelle pour des faits graves, j’ai longtemps cru en un dénouement rapide. Mais au fil des mois, puis des années, cette espérance s’est muée en une douloureuse réalité. Les visites de ma famille et le soutien bienveillant du personnel pénitentiaire ont été mes seuls réconforts dans cette épreuve”, dit-il, la gorge serrée.
Confronté à la souffrance de sa famille, il a entamé une profonde introspection et a décidé de se racheter. Ses efforts ont été reconnus par les autorités qui ont décidé d’abréger sa peine d’un an.
En entendant son mari évoquer cette étape décisive, Ksor H’Loi a été submergée par l’émotion, se remémorant les sacrifices qu’elle avait dû faire pour maintenir leur famille unie pendant son absence.
“Mon mari a été incarcéré alors que nos enfants étaient en bas âge. Pour le voir, je consacrais chaque centime gagné à l’achat de billets de train pour le Nord. Notre fille aînée portait les mêmes vêtements pendant des années, que je rapiéçais avec amour pour les lui faire tenir le plus longtemps possible”, a-t-elle déclaré, les yeux embués.
Libéré après quinze longues années, Siu Un a retrouvé les siens, mais le poids des années passées derrière les barreaux était lourd à porter. Ce long silence lui a permis de déconstruire les mensonges qui l’avaient conduit à s’engager dans la soi-disant “Secte protestante de Dega” et de mesurer l’ampleur de la souffrance qu’il avait infligée à sa famille et à lui-même.
L’histoire de Siu Un est malheureusement emblématique de ce qu’a vécu une partie de la population de Gia Lai. Le Fulro, organisation extrémiste, a mené une intense propagande pour recruter de nouveaux membres et déstabiliser la région. De nombreux habitants, comme Siu Un, ont été manipulés et entraînés dans des activités subversives.
Comme Siu Un, Y Bome de l’ethnie Ba Na, originaire du village de Hnap, commune de Kdang, district de Dak Doa, a réalisé, après avoir purgé sa peine, qu’il avait été manipulé par le Fulro en exil.
“Ils me harcelaient sur Messenger, me promettant monts et merveilles si j’adhérais à leur cause. Ils m’ont montré des images d’une église Dega à l’étranger, me faisant miroiter un avenir radieux. Mais tout cela n’était que mensonges. J’ai été dupé et je le regrette profondément”, se souvient-il.
Le regard perdu, Y Bome contemple les ruines de son passé. “La secte protestante de Dega n’était qu’une illusion, confit-il, amer. J’ai laissé ces extrémistes me manipuler, mettant en péril ma famille et ma communauté”.
Redevenir des citoyens utiles à la société
De retour au sein de leur communauté, Siu Un et Y Bome ont décidé de tourner la page. Grâce au soutien des villageois, ils ont pu reconstruire leur vie. Siu Un a bénéficié d’une aide précieuse pour se loger et se nourrir, tandis que les autorités locales ont mis en place des programmes d’aide à la production agricole, lui permettant ainsi de retrouver une certaine autonomie.
Initialement marqué par la honte et le regret, Siu Un a progressivement retrouvé sa place au sein de la communauté. En s’impliquant dans la vie religieuse du village, il a non seulement trouvé un réconfort personnel mais a également contribué à renforcer le tissu social.
Il collabore avec les agents de police et les autorités pour persuader les habitants de ne pas participer à des manifestations ou à des troubles.
Siu Un explique : “J’ai appris à être à la fois bienveillant et ferme. Mon expérience m’a permis de devenir un guide pour les jeunes générations, les aidant à éviter les écueils que j’ai moi-même rencontrés”.
Siu Un est un ardent défenseur du patrimoine culturel de son village. Il encourage activement à perpétuer les traditions ancestrales, telles que le tissage, la vannerie et la musique des gongs. En offrant une partie de ses terres pour la construction d’un lieu de culte à Tân Diêp, il contribue à renforcer le lien entre les habitants et leur histoire.
La province de Gia Lai a su concilier liberté religieuse et ordre public. Après avoir connu des dérives sectaires, elle garantit désormais la pratique légale des cultes, tout en veillant à ce qu’ils respectent les lois du pays et les valeurs de la communauté. L’initiative de Siu Un s’inscrit parfaitement dans cette dynamique.
Texte et photos : Phuong Nga/CVN