Conserver les maisons communes traditionnelles

Par manque de gestion et de matériaux de construction, les nhà rông - maisons communes traditionnelles des ethnies minoritaires du Tây Nguyên - risquent de disparaître. À Kon Tum, les efforts inlassables des autorités et populations locales les ont fait renaître de leurs cendres.

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Photo : CTV/CVN

Actuellement, en raison du manque de mécanismes de gestion et de matériaux de construction adéquats, ces maisons traditionnelles ont été remplacées par des bâtisses construites avec des matériaux modernes. Mais ces dernières ne conviennent pas aux attentes des habitants locaux, qui s’en désintéressent, ce qui, à termes, risque de faire disparaître peu à peu leurs traditions culturelles.

Conscients de ces défis, les services compétents de Kon Tum se coordonnent étroitement

avec les localités et les populations locales pour restituer les maisons communes des minorités ethniques des hauts plateaux du Centre, dans le but de préserver et de promouvoir leurs valeurs originales.

Nouvelles constructions

La joie se propage au sein de la communauté des Hà Lang (une branche de l’ethnie Xo Dang), qui résident dans le village de Dak De, commune de Ro Koi, district de Sa Thây. Ils ont pu finalement se réunir dans la nouvelle nhà rông traditionnelle de leur ethnie, plutôt que dans celle construite en matériaux modernes.

Les habitants de ce village, qui compte 204 familles avec plus de 800 personnes, se rassemblaient auparavant dans une maison de la culture qui, construite à l’époque en béton avec un toit de tôle, ne réussissait pas à recréer un espace culturel typique, décourageant les villageois à le fréquenter.

Fin 2023, ceux-ci ont reçu une assistance financière de près de 100 millions de dôngs provenant du Projet 6, dans le cadre du Programme national cible pour le développement socio-économique des régions ethniques et montagneuses, mis en œuvre par le Musée-Bibliothèque de la province de Kon Tum, pour restaurer ou reconstruire des maisons communes dans la localité. Ainsi, tous les villageois de Dak De se sont mobilisés pour la recherche de matériaux appropriés.

Né en 1950, A Thiu est l’un des quatre patriarches du village. Il s’est remémoré : "Pour trouver les matériaux nécessaires, les hommes les plus robustes sont partis en forêt chercher des bambous au service des cloisons, tandis que les femmes en bonne santé ont récolté des herbes à paillote pour la toiture. Le bois disponible a été utilisé pour les piliers".

Et de souligner : "Nous avons conseillé à nos habitants d’en exploiter seulement une partie, afin de garantir que les ressources naturelles ne soient pas épuisées. Des bambous ou de l’herbe à paillote ne doivent être utilisés que de manière limitée, sans être entièrement coupés. Cela permet aux nouvelles plantes de continuer à pousser et à se développer, assurant ainsi que le village disposera encore de matières premières pour les réparations futures des maisons traditionnelles".

Ainsi, les habitants de cette commune ont réussi à en construire trois en matériaux naturels. Les autorités locales comptent désormais encourager les villageois à se réunir de nouveau dans ces nhà rông. "L’objectif est de préserver et de promouvoir les valeurs traditionnelles de l’ethnie Hà Lang", a expliqué Mai Nhu Nam, président du Comité populaire de la commune de Ro Koi.

Nouvelle physionomie

Avant, les plus de 190 familles de l’ethnie Bahnar résidant dans le village de tourisme communautaire de Kon Jo Dri, commune de Dak Ro Wa, ville de Kon Tum, se rassemblaient fréquemment dans leur maison commune traditionnelle.

Photo : Du Toan/VNA/CVN

Situé au cœur du village, cet endroit est considéré comme l’âme de cette ethnie, là où s’organisaient de grands événements culturels. Cepen-dant, au fil du temps, la nhà rông s’est tellement détériorée que les habitants ont décidé de la restaurer début 2024.

Le projet a reçu la contribution de tous les villageois de Kon Jo Dri. Son patriarche, A Ngui, n’oubliera jamais les efforts des hommes et des femmes qui se sont acharnés à “parcourir des dizaines de kilomètres pour chercher des matériaux” puis ont "consacré plus de 2.000 jours de travail" à réparer ensemble leur maison commune. À présent, la restauration est achevée, et le résultat est à la hauteur des espérances !

Lors d’une visite dans ce village durant le Têt (Nouvel An lunaire) dernier, M. Xavier, venu de France, n’a pas caché son admiration pour les particularités ethniques de la communauté locale. "Les maisons communes revêtent une valeur culturelle vraiment unique", s’est exclamé le touriste, promettant de faire connaître cette destination à ses amis.

Au service de la restauration des nhà rông traditionnelles, le Musée-Bibliothèque provincial de Kon Tum a collaboré étroitement avec les autorités locales, en particulier avec les villageois qui aspirent à retrouver les maisons communes typiques de leur communauté et qui ont donc participé activement à leur reconstruction. Une célébration solennelle des nouvelles bâtisses a été organisée, suivant les rites traditionnels des minorités ethniques autochtones.

Valeurs à préserver

"Dans ces maisons communes, hauts lieux de partage, se reflète aussi la culture distinctive de notre communauté ethnique, à travers une variété d’activités festives et professionnelles telles que le tissage, les performances musicales, la décoration", a souligné Dô Thi Thanh Thuy, directrice du Musée-Bibliothèque de Kon Tum. Elle a également affirmé que "les contributions des habitants sont un élément crucial de la célébration des nouvelles +nhà rông+", une des fêtes traditionnelles à préserver à Kon Tum.

Selon les données du Service provincial de la culture, des sports et du tourisme, les 503 villages d’ethnies minoritaires comptent 479 maisons communes et maisons communautaires sur pilotis, dont 221 utilisent des matériaux de construction traditionnels tels que bois, bambou et chaume d’impérata cylindrique (une espèce de graminées).

"Les +nhà rông+ traditionnelles figurent parmi les patrimoines culturels exceptionnels des minorités ethniques de Kon Tum", a affirmé Phan Van Hoàng, directeur adjoint dudit Service provincial. Leur restauration favorisera la préservation des héritages qui leur sont étroitement liés, notamment des valeurs culturelles immatérielles telles que les fêtes, les métiers artisanaux, les croyances populaires, les gongs et les danses.

Actuellement, outre l’utilisation des matériaux de construction disponibles dans les forêts pour les nhà rông, certaines localités de la province ont planifié des zones de culture de matières premières. Par exemple, dans le district de Dak Glei, quatre sites sont destinés à l’herbe à paillote et cinq autres au rotin et au bambou. Ces zones garantiront suffisamment de matériaux pour la construction ou la réparation annuelle de maisons communes, contribuant ainsi à conserver durablement ces bâtisses traditionnelles, qui représentent l’âme des minorités ethniques autochtones du Tây Nguyên et de Kon Tum en particulier.

Du Toan - Hông Anh/CVN

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