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| Lors d’un cours numérique spécialement dédié aux seniors à Hô Chi Minh-Ville. |
| Photo : TT/CVN |
Dans un pays qui avance à grande vitesse sur la voie de la transformation numérique, les personnes âgées comptent parmi les plus exposées au risque d’être laissées derrière. La crainte de la technologie, le sentiment d’infériorité et la menace croissante des fraudes en ligne constituent autant de barrières qui freinent leur intégration.
Pour réduire concrètement ce fossé, Hô Chi Minh-Ville a lancé des sessions de formation spécialement dédiées aux seniors. Ces cours leur redonnent confiance, les aident à apprivoiser le smartphone, à utiliser les services digitaux essentiels et à naviguer en toute sécurité dans l’univers connecté d’aujourd’hui.
Transmission intergénérationnelle
Dans une petite salle de cours, des seniors se penchent attentivement sur l’écran de leur téléphone. À leurs côtés, de jeunes moniteurs les guident patiemment, étape après étape. Vainquant leur appréhension initiale, beaucoup apprennent rapidement à passer des appels vidéo, à effectuer des recherches d’information grâce à l’intelligence artificielle (IA) et, surtout, retrouvent le plaisir de créer du lien à l’ère du tout-numérique.
Ces ateliers sont l’émanation du projet “Citoyens numériques aux cheveux argentés”, une initiative créée par Phan Bao Thy. Son objectif : aider les personnes du troisième âge à s’intégrer avec assurance dans la vie numérique. Lancé en avril, le programme a déjà organisé plus de 30 classes, mobilisant 15 formateurs rémunérés et 160 bénévoles.
Chaque session, limitée à 10 ou 15 participants, est pensée pour s’adapter au rythme et à la psychologie de ce public, explique la fondatrice. L’idée lui est venue d’un constat personnel.
Elle s’est rendu compte que si les programmes nationaux d’alphabétisation numérique ciblent en priorité les enfants et les actifs, les seniors, eux, restent largement oubliés. Une inquiétude renforcée lorsqu’elle a dû accompagner ses propres parents.
“J’ai beaucoup aidé les miens. Lorsqu’ils ont voulu s’inscrire à des services publics ou demander une résidence temporaire, j’ai compris qu’il y avait un besoin criant”, confie Mme Thy. Et d’insister : “La transmission de ces compétences aux aînés ne peut pas reposer uniquement sur l’État”.
“En tant que jeune et accompagnatrice, j’ai créé cette structure pour pouvoir les soutenir plus en profondeur, plus longtemps et plus loin”, poursuit-elle.
Pour nombre de retraités, ces cours sont libérateurs. Ils n’osent pas toujours demander de l’aide à leurs enfants, par pudeur ou par peur d’être un fardeau.
Un soulagement pour les participants
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| Les cours permettent aux apprenants plus âgés d’assimiler plus facilement les connaissances numériques. |
| Photo : TT/CVN |
“Je pourrais solliciter mes enfants, mais ils sont occupés. J’ai donc été très heureux d’apprendre l’existence de ces cours, et j’ai décidé de m’inscrire”, témoigne Mme Quy, 65 ans, du quartier de Cho Lon.
Lê Hông Triêt, 60 ans, l’un des plus jeunes participants, se réjouit : “Les jeunes professeurs ont fait preuve d’un dévouement et d’une attention remarquables. J’ai 60 ans, mais dans la classe, il y a des élèves de 85 ans ! Tout le monde était motivé. J’ai trouvé le cours vraiment passionnant et vivant”.
“Ils sont venus me guider dans les moindres détails, me tenant la main pour me montrer où appuyer, comment ouvrir, comment m’exercer, du premier jour jusqu’à ce que je sois autonome et compétent”.
Les leçons vont bien au-delà de l’usage basique du smartphone. Les élèves découvrent une large palette de thèmes : intelligence artificielle, sécurité numérique, photographie, paiements dématérialisés, achats en ligne… La technologie devient ainsi une porte ouverte sur un nouvel horizon : rester connectés, se divertir, s’informer, mais surtout rompre l’isolement.
Trân Thi Thuy, 63 ans, explique que grâce à la formation, elle utilise désormais l’application Zalo pour appeler, envoyer des messages et des photos à ses petits-enfants et amis. Elle a même appris à maîtriser des outils d’intelligence artificielle.
“Quand je veux acheter un flacon de médicament avec des étiquettes en anglais, je prends simplement une photo ; l’IA le traduit en vietnamien et m’indique les usages et les effets. C’est tellement pratique ! Je peux aussi interroger ChatGPT pour trouver des informations sur n’importe quel sujet, s’enthousiasme-t-elle. Les personnes de mon âge devraient apprendre pour ne pas être marginalisées”.
Un “vaccin” contre les escroqueries
“Avant de participer aux cours du projet, je ne faisais et ne recevais que des appels des personnes enregistrées dans mon téléphone. Je ne répondais jamais aux numéros inconnus, par peur des arnaques”, se souvient Lê Hông Triêt.
Selon Phan Bao Thy, cette inquiétude est omniprésente chez les aînés. “Au-delà des problèmes de mémoire ou de manipulation des outils, les seniors font face à une barrière psychologique : la peur d’être dupés et la crainte de ne pas comprendre la technologie. Beaucoup préfèrent alors se couper du monde”, explique-t-elle.
Une inquiétude loin d’être irrationnelle, car la cyber-criminalité n’a jamais été aussi active.
“Nous avons documenté de nombreux cas où des seniors ont été incités à télécharger des applications douteuses ou à cliquer sur des liens suspects, exposant leurs données. Certains ont perdu leurs économies après un seul clic. Il est donc impératif d’enseigner la sécurité en ligne”, insiste Mme Thy. En conséquence, les formations intègrent désormais un volet crucial sur la protection des informations.
“Nous appelons cela un “vaccin numérique”, basé sur trois règles d’or : ralentir, vérifier attentivement et ne jamais effectuer de transfert d’argent. Nous rappelons constamment aux participants que le calme est le meilleur rempart contre les risques”, explique-t-elle.
Lê Hông Triêt raconte qu’il a failli être victime d’une tentative d’escroquerie téléphonique. Mais grâce au cours, il a appris à reconnaître ces pièges et est devenu extrêmement vigilant.
Le bénéfice le plus précieux de ces classes ne réside pas seulement dans l’acquisition de connaissances, mais dans le changement de mentalité profond qu’elles insufflent chez les seniors.
“Grâce à ces nouvelles compétences, je suis plus serein, plus proactif et je me sens plus en sécurité”, conclut M. Triêt.
Huong Linh - TT/CVN





