À 77 ans, un ex-professeur de chimie, cœur et âme au service des plus démunis

Chaque midi, sous le soleil de plomb qui s'abat sur la rue Lý Thuong Kiêt, Hô Chi Minh-Ville, devant un petit restaurant social sans enseigne, une longue file de personnes attend patiemment. Personnes âgées, handicapées, ouvriers, étudiants, travailleurs indépendants… Ils occupent l'espace d'un trottoir, se protègent du soleil, les yeux rivés sur la petite cuisine à l'intérieur, dans l'attente d'un repas complet pour seulement 2.000 dongs. Au milieu de cette foule apparaît la silhouette d'un homme aux cheveux blancs, vêtu d'une chemise blanche impeccable. Il porte lentement les plateaux de riz à chaque table, incline légèrement la tête en signe de remerciement, puis retourne à la cuisine pour continuer à préparer les plats.

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Le Professeur Le Ngoc Thach.

Les clients venant pour la première fois le prennent souvent pour le propriétaire du restaurant ou pour un gentil gardien âgé. Mais ceux qui sont habitués l'appellent par un nom plein de respect : "Thầy Thạch" (Professeur Thach). Il s'agit du Professeur-Docteur Lê Ngọc Thach (77 ans), l'un des éminents professeurs de chimie organique, ancien enseignant de la faculté de chimie de l'Université des sciences naturelles (relevant de l'Université nationale de Hô Chi Minh-Ville), qui s'est engagé auprès du restaurant social “Mây Ngàn 1” depuis plus d'une décennie. Non seulement il vient pour la forme, mais trois fois par semaine, il est présent tôt avant l'ouverture, les manches retroussées, travaillant en cuisine avec les autres bénévoles comme un serveur à part entière.

Ce professeur accompagne le restaurant social depuis ses tout premiers jours. Dès qu'il a appris que d'anciens élèves du lycée Petrus Ký (aujourd'hui lycée Lê Hồng Phong) fondaient un restaurant social à 2.000 dongs pour aider les personnes défavorisées, Thầy Thạch n'a pas hésité à les contacter pour apporter sa contribution.

M. Thach offre des repas aux personnes en situation précaire.

À 77 ans, l'ouïe du professeur Thach n'est plus parfaite à cause de la presbyacousie. Cependant, ce défaut ne l'empêche pas de se rendre chaque semaine dans la petite cuisine du restaurant social. Les manches retroussées, il sert les plateaux de riz, essuie les tables, verse les bols de soupe pour les clients en difficulté.

Désignant le tableau qui affiche les noms des bienfaiteurs ayant fait des dons au restaurant, Nguyen Minh Nghia, co-fondateur du restaurant social Mây Ngàn 1, évoque le professeur avec un respect particulier : "Quand le restaurant a ouvert en 2015, le professeur Thạch a été le premier à faire un don, et il a aussi été le premier non seulement à apporter un soutien financier, mais aussi à venir servir directement en tant que bénévole dévoué", a déclaré M. Nghia.

Certains clients, voyant le vieil homme aux cheveux blancs débarrasser les tables et servir l'eau, demandent : "C'est le propriétaire ?". Lorsqu'ils apprennent qu'il s'agit d'un professeur à la retraite, tous sont surpris. Il est rare qu'une personne ayant un tel titre universitaire choisisse de faire un travail manuel aussi simple et discret.

"Honnêtement, je ne savais pas que c'était un professeur. Il est toujours joyeux et poli comme un serveur professionnel. Ce n'est que plus tard, en écoutant les gens du restaurant raconter, que j'ai su qu'il avait enseigné et qu'il possédait un diplôme si élevé", a confié Mme Quỳnh, une cliente régulière.

M. Thach prépare les repas chauds pour les personnes en difficulté.

L'histoire du Professeur Thach servant discrètement des repas au restaurant à 2.000 dongs n'est qu'une petite partie de son long parcours caritatif. Sortant de la petite cuisine modeste, il retrouve son monde de connaissances, mais là aussi, il emporte toujours sa bienveillance avec lui.

Bien qu'il approche des 80 ans, il travaille sans relâche jour après jour. En dehors des heures de cours, il écrit des livres et mène des recherches, ce qui lui a permis de publier 14 ouvrages scientifiques, ainsi que de nombreux documents qu'il offre avec respect aux universités. L'action de donner de ce professeur ne s'arrête pas aux pages de livres ; il continue de partager avec l'argent qu'il a économisé pour sa retraite.

Programmes caritatifs

Il a discrètement retiré de son livret d'épargne un milliard de dôngs pour secourir les compatriotes touchés par le typhon Yagi, a fondé le prix Lê Van Thoi d'une valeur de 2 milliards et a participé à de nombreux autres programmes caritatifs…

Mais lorsqu'on l'interroge sur sa volonté de faire le bien, il sourit doucement : "Je donne parce que c'est ce que mon cœur désire. Un ou deux milliards de dôngs, c'est une somme importante pour quelqu'un qui travaille comme moi, mais comparé aux pertes subies par nos compatriotes après les inondations et les typhons, cette somme n'est qu'un grain de sable", a déclaré M. Thach. Cet homme a reçu l'Ordre du Travail de troisième classe, le Certificat de mérite du Premier ministre et de nombreux autres titres honorifiques. Cependant, le professeur affirme qu'il ne fait pas le bien pour ces distinctions. "J'ai pris l'habitude de me dévouer pour la société depuis mon jeune âge, donc le faire maintenant me semble tout à fait naturel", sourit M. Thach.

Au lycée, il n'a pas attendu d'être à l'aise financièrement pour penser à donner. En plus de ses études, la jeunesse du professeur a été liée à des voyages caritatifs avec la famille bouddhiste, se rendant dans des orphelinats, visitant d'anciennes zones de guerre, distribuant des cadeaux, nettoyant et aidant jusqu'à tard le soir.

Il nous confie, lorsque nous évoquons son passé, que ce sont les années passées aux côtés de son professeur qui ont forgé en lui la persévérance nécessaire pour poursuivre la science et se dévouer à la société jusqu'à aujourd'hui. Le tournant de sa vie est survenu lorsqu'il a terminé son année préparatoire à l'université avec un excellent examen, a été remarqué par le Professeur Lê Van Thoi et a été embauché dès sa première année à l'Université des sciences naturelles. Cependant, derrière cette grande générosité, il y avait une situation familiale loin d'être aisée. À une certaine époque, son maigre salaire rendait difficile de joindre les deux bouts, et l'étudiant Thach a dû se débrouiller de toutes les manières pour gagner sa vie et prendre soin de sa famille. Il a fabriqué de l'alun, concocté du dentifrice, expérimenté des produits chimiques… jusqu'à devoir se battre pour devenir vendeur de savon à Saigon afin de subvenir à ses besoins.

Ces jours de lutte pour gagner sa vie dès son jeune âge, jonglant avec divers métiers pour nourrir son rêve d'études, lui ont inculqué un style de vie simple et l'habitude de donner. Fort de cette expérience, il est entré dans la vie avec un capital de générosité, de sorte que tout au long de son parcours scientifique et humain, il n'a jamais cessé de partager. Le professeur Lê Ngoc Thach n'est pas seulement celui qui sert discrètement dans le restaurant social, mais aussi celui qui se dévoue sans relâche à la communauté avec toutes ses connaissances, son cœur et le reste de sa vie : "Tant que je suis en vie, je continuerai à travailler et à me dévouer pour la société. Je continuerai le bénévolat jusqu'à ce que mes forces me lâchent", a-t-il affirmé, comme un engagement total envers la vie.

Texte : Quang Châu/CVN

Photos : DT/CVN

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