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Artistes paysans de la troupe de "chèo" du village de Khuôc à Thai Binh (Nord). |
Photo : VNA/CVN |
Le vice-Premier ministre Trân Hông Hà a approuvé le 29 mars dernier la soumission du dossier visant à faire reconnaître l’art du chèo (théâtre populaire) par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) patrimoine culturel immatériel de l’Humanité. Pour cela, le Vietnam diversifie les représentations du chèo contemporain et encourage les jeunes à s’engager dans cette forme d’art.
Le chèo est un art traditionnel original qui joue un rôle crucial dans la vie spirituelle des Vietnamiens au Nord. Il est très populaire lors des activités communautaires et des fêtes traditionnelles, servant à exprimer la gratitude envers les génies pour les bonnes récoltes et la prospérité.
Selon plusieurs recherches, cet art trouve son origine au Xe siècle à Hoa Lu, l’ancienne capitale située dans la province de Ninh Binh (Nord), sous l’impulsion de Pham Thi Trân, une célèbre chanteuse de l’époque des Dinh (968 - 980). Il s’est ensuite répandu au Nord, en particulier à Hanoï et Hai Phong, ainsi que dans les provinces de Thai Binh, Hà Nam, et Hung Yên, avant de se propager dans la région septentrionale du Centre.
Conserver l'âme des chants
Bien que Ninh Binh soit le berceau initial du chèo, cet art vocal a connu un développement significatif à Thai Binh.
Haut lieu du delta du fleuve Rouge, Thai Binh est un lieu où convergent et sont promues les valeurs culturelles traditionnelles, notamment le chèo. Malgré les aléas de l’histoire, cette région conserve encore l’âme de nombreuses mélodies anciennes uniques de cet art.
On ne sait pas exactement quand le chèo a fait son apparition à Thai Binh, mais dès la seconde moitié du XIXe siècle, la localité comptait environ 50 troupes, notamment trois noyaux renommés : chèo Khuôc (village de Khuôc, commune de Phong Châu, district de Dông Hung), chèo Hà Xa (commune de Tân Lê, district de Hung Hà) et chèo Sao Dên (commune de Song An, district de Vu Thu).
Une scène de la pièce classique "Quan Âm Thị Kính" (Déesse de la Miséricorde). |
Photo : CTV/CVN |
Situé au bord de la rivière Tuôc, le village de Khuôc résonne souvent des mélodies du chèo. Après les travaux des champs, les paysans aiment entonner ces chants, même les plus jeunes. Presque tous les villageois savent le chanter, une passion qui commence dès le plus jeune âge. Le village préserve encore ses mélodies originales et est reconnu comme l’une des sept régions de chèo les plus réputées du Nord. C’est également un vivier de talents, fournissant des acteurs et des musiciens à de nombreuses troupes de chèo professionnelles, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la province.
Bùi Van Ro, l’“Artisan du Peuple” et ancien président du club de chèo traditionnel du village, excelle particulièrement dans les rôles de personnages âgés. Avec plus de 50 ans de dévouement à cet art, le chèo coule dans ses veines, et malgré son âge avancé, il consacre ses efforts quotidiens à l’enseigner aux jeunes générations.
Selon lui, le village de Khuôc possède 12 mélodies uniques qui ne se trouvent nulle part ailleurs. Des titres comme Ván cờ tiên (Jeu d’échecs féerique), Đường trường thu không (Improvisation en automne), Tình thư hà vị (Paroles d’amour) et Hề đơm đó (Le gars clown, un personnage récurrent du chèo) définissent le caractère distinctif du chèo Khuôc. Chanter ces mélodies requiert une profonde compréhension de cet art folklorique et de ses divers styles. Bien que certaines mélodies puissent sembler similaires, les techniques rythmiques, les percussions et les tambours des artistes du village les distinguent, les rendant encore plus difficiles à maîtriser.
Ces mélodies utilisent souvent plusieurs voix, des paroles aux significations multiples et des récits symboliques. Elles dépeignent la vie humble des agriculteurs, célèbrent les qualités personnelles et peuvent être satiriques et critiques envers les mauvaises habitudes, tout en dénonçant l’injustice et en promouvant l’amour, la tolérance et le pardon.
Un spectacle typique de chèo dure environ deux heures. En plus des spectacles traditionnels, il existe également des représentations contemporaines qui reflètent le contexte social et politique du pays.
Hề (Gars clown), un personnage récurrent du "chèo". |
Photo : VNA/CVN |
À ce jour, le village de Khuôc continue de présenter des pièces traditionnelles telles que Từ Thức gặp tiên (Tu Thuc rencontre une fée), Trương Viên, Lưu Bình - Dương Lễ, Quan Âm Thị Kính (Déesse de Miséricorde), Tống Trân - Cúc Hoa. Chaque pièce met en scène des personnages comme Hê, Dao, Lao et Mu, chacun portant un message spécifique pour le public.
Les artistes de chèo maîtrisent le chant, la danse et l’art dramatique, accompagnés de musiciens jouant d’instruments traditionnels tels que les tambours, le mõ (cloche en bois), le sáo (flûte en bambou) et le nhị (instrument à cordes).
Aujourd’hui, les quatre hameaux du village de Khuôc - Khuôc Bac, Khuôc Tây, Khuoc Dông et Khuôc Nam - abritent des clubs de chèo où plusieurs générations participent. Pendant les mois d’été et les week-ends, les artistes renommés du village continuent d’enseigner les rudiments du chant traditionnel aux enfants âgés de 6 à 15 ans.
Entre tradition et modernité
Autrefois, le chèo était souvent joué dans les cours des maisons communes, les pagodes et les maisons des familles nobles. La scène consistait souvent en un tapis déployé au milieu de la cour avec un rideau suspendu en arrière-plan. Les artistes jouaient sur ce tapis tandis que les musiciens étaient assis de chaque côté, entourés du public.
De nos jours, il est interprété sur des scènes surélevées équipées de systèmes de sonorisation et d’éclairage modernes. La tendance à la théâtralisation a conduit à la modernisation des pièces pour toucher un public plus large.
“C’est une opportunité exceptionnelle de promouvoir la culture vietnamienne à l’échelle mondiale. Le +chèo+ est profondément ancré dans l’identité culturelle du Vietnam. Cela encouragera les artistes, artisans et chercheurs à approfondir leurs connaissances et sensibilisera la communauté à l’importance de préserver et de promouvoir l’art du +chèo+”, a déclaré la Pr. agrégée Dr. Hà Thi Hoa, de l’Université nationale d’éducation artistique.
Synthèse de Thúy Hà/CVN