Nguyên Thanh Công, chef adjoint de l’Institut d’études du développement socio-économique de Hanoi. |
Hanoi prétend conserver fermement son rôle de centre politique, culturel et économi-que du pays. Une ambition démesurée selon vous ?
Ce n’est pas un secret : dans le monde entier, ce ne sont pas nécessairement les capitales qui constituent le centre économique de leur pays. Il en va ainsi pour Washington, aux États-Unis, par exemple. Au Vietnam, l’histoire millénaire de Hanoi en fait naturellement un centre politique, culturel et économique. C’est une réalité qui ne date pas d’hier. De fait, son ambition est tout à fait justifiée. Grâce à ses investissements dans de multiples domaines, la capitale constitue un pilier économique du pays et ce, pour de nombreuses années encore.
Du fait de sa position si particulière vis-à-vis des autres localités du pays, Hanoi a-elle besoin de mesures spécifiques pour assurer son développement économique constant ?
Évidemment. Pour moi, Hanoi doit s’orienter vers une économie du savoir, dite également économie de la connaissance. Cela veut dire que le développement doit se faire sur la base de connaissances et de technologies avancées. Le choix de ce modèle, loin d’être risqué ou hasardeux, devrait au contraire s’avérer durable et stable. C’est une manière pertinente de renforcer la sécurité et le bien-être social. Pour pouvoir conserver son rôle de «porte-drapeau» au niveau national et à tous les égards -administratif, politique, culturel et économique-, Hanoi ne peut que s’engager dans l’économie du savoir.
Mais, aujourd’hui, l’économie du savoir n’est-elle pas un objectif partagé par toutes les localités du pays ?
En effet, de nos jours, la tendance générale va au développement de l’économie du savoir. De ce fait, nombreuses sont les localités vietnamiennes qui se dirigent dans cette voie. Néanmoins, toutes n’ont pas suffisamment de moyens de le faire. L’économie du savoir est au sommet de l’économie de marché. Dans ce système, les marchandises et les services offerts proviennent essentiellement des connaissances acquises et des infrastructures disposant de hautes technologies. De fait, ce modèle demande de la créativité et une capacité à innover. Par la suite, il faut mettre en œuvre des politiques macroéconomiques prenant appui sur des connaissances scientifiques.
Il semblerait que pour le moment, seule Hanoi dispose de toutes les conditions nécessaires au développement de l’économie du savoir. Son atout principal est le nombre considérable de chercheurs scientifiques représentant les deux tiers du chiffre national.
Hanoi se distingue également par ses multiples universités et instituts de recherches, et sa main d’œuvre qualifiée. J’espère que dans les années à venir, la capitale fera le choix de développer une économie de la connaissance, et affirmer ainsi son rôle moteur dans l’orientation vers des choix économiques innovants.
Un cours de mécanique à l’Université d’industrie de Hanoi. |
Photo : Danh Lam/VNA/CVN |
Certes, c’est un projet intéressant dans l’avenir, mais ne reste-t-il pas des obstacles importants avant sa mise en place ?
En effet, l’économie du savoir reste un concept tout nouveau au Vietnam. Jusqu’à aujourd’hui, on a plus développé l’économie quantitativement que qualitativement. Le pays manque encore de politiques portant clairement l’économie de la connaissance dont la mise en place demande du temps. De plus, les politiques économiques actuelles, aussi récentes soient-elles, sont loin de répondre aux exigences de la réalité moderne.
Ces dernières années, Hanoi a cherché à appliquer de nouvelles politiques pour développer l’économie du savoir dans certains secteurs tels que les infrastructures, les télécommunications ou encore les ressources humaines… Pourtant, les résultats ne sont pas encore à la hauteur de nos attentes. De multiples obstacles restent à franchir. Dans l’ensemble, ces infrastructures et ces télécommunications mais aussi les universités et instituts de recherches demeurent encore insuffisants en nombre et bien souvent désuets. Un autre problème vient des conditions de travail des scientifiques, dont la médiocrité provoque une «fuite de la matière grise».
Quelles sont les améliorations que la ville doit adopter ?
Concernant le développement de l’économie du savoir, Hanoi a encore une longue route à parcourir. Cette innovation majeure doit être fortement soutenue par les autorités de la ville. Il faut mettre en place non seulement un cadre juridique mais aussi un ensemble de conditions favorables à l’essor des travaux scientifiques et technologiques. Par ailleurs, il faut faire en sorte que ces avancées soient rapidement intégrées dans la production. Enfin, il est essentiel que les politiques s’appuient sur les ressources humaines existantes et mettent en avant la formation d’une main-d’œuvre qualifiée.
Qu’est-ce que la Knowledge Economy ?
Selon le professeur académicien Dang Huu, la Knowledge Economy ou l’économie du savoir est un modèle dans lequel la création et l’application de connaissances nouvelles jouent un rôle décisif pour le développement économique, la production et l’amélioration des conditions de vie.
Un bel objectif pour le pays
L’année 2020 a été choisie par le Vietnam comme date-butoir pour son projet d’industrialisation. Ainsi, dans une résolution issue de son dernier Congrès (XIe mandat), le Parti communiste du Vietnam a déclaré qu’il fallait «accélérer les projets nationaux d’industrialisation et de modernisation parallèlement au développement de l’économie du savoir et à la protection des ressources naturelles». Ce bel objectif pour le pays ne pourra être atteint qu’avec une révolution complète dans les domaines des sciences et des technologies.