Elle est entrée 120 fois dans la plus grande grotte du monde

Un circuit d’exploration de quatre jours dans la grotte Son Đoòng coûte 3.000 USD/personne. Croyez-vous que l’on puisse y entrer 120 fois… en ne déboursant aucun centime ? Rencontre avec H’Anetta, une Vietnamienne d’ethnie Ê đê, la seule femme guide touristique de cette galerie souterraine, la plus vaste au monde.

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H’Anetta, une Vietnamienne d’ethnie Ê đê, est la seule femme guide touristique à Son Đoòng.  
Photo : CTV/CVN

H’Anetta, née en 1990, est guide touristique d’Oxalis Adventure, le premier voyagiste d’aventure au Vietnam. La grotte Son Đoòng se trouve dans le Parc national de Phong Nha - Ke Bàng, province de Quang Binh (Centre). Leur lien ? Oxalis est la seule agence de voyages autorisée à la faire visiter, un bon moyen de limiter le nombre de visiteurs. Et H’Anetta est devenue l’unique femme guide de cette plus grande grotte du monde.

H’Anetta a une petite taille et de grands yeux. Si elle ne souriait pas, elle semblerait plutôt froide et taciturne. Mais lorsqu’on aborde Son Đoòng ou son métier de guide touristique, elle dégage une forte énergie et un grand enthousiasme.

Métier d’hommes

Issue de l’ethnie Ê đê, H’Anetta vit avec ses parents dans la province de Gia Lai (hauts plateaux du Centre). Elle a eu la chance d’avoir été encouragée et soutenue énormément par sa famille dans les études. Après le bac, elle s’est engagée dans un cursus universitaire.

H’Anetta lors d’un périple à Son Đoòng. 
Photo : TT/CVN

Après avoir décroché un diplôme d’anglais à l’Université de Huê, implantée dans la province de Thua Thiên-Huê (Centre), elle a enchaîné sur un master en théorie et méthodologie de l’anglais. “En 2014, durant mes études, une de mes amis m’a informée qu’à Phong Nha - Ke Bàng, Oxalis recrutait des guides locaux pour ses circuits de découverte de grottes. En lisant cette annonce, je me sens un peu vexée par cette note +les hommes sont prioritaires+. Je me suis demandée pourquoi des emplois sont-ils réservés aux hommes ? J’ai donc décidé de changer les choses en posant ma candidature”.

En fait, Oxalis n’exclut pas complètement les femmes, mais il est arrivé souvent que seuls les hommes répondent aux exigences de ce métier d’aventure. Le dossier de H’Anetta a été accepté, la fille de 24 ans s’est alors lancée dans la préparation de l’entretien, “pour prouver que je n’ai rien à envier aux hommes”. Mais un gros défi lui était posé : elle ne savait pas nager alors que c’est une condition requise pour un guide d’aventure.

H’Anetta lors d'une pause-café dans la grotte Son Đoòng. Photo : TT/CVN

Le jour J, le recruteur était tout à fait convaincu par la jeune femme de 1 m 57 et 44 kg car elle a passé avec excellence toutes les épreuves, sauf la natation. L’équipe d’Oxalis Adventure a décidé de la soutenir pour combler cette lacune en lui trouvant une professeure américaine. Et juste après deux mois d’entraînement en rivière, H’Anetta a réussi le test et été recrutée, devenant en 2014 l’unique femme guide touristique des circuits d’exploration de grottes, tout en menant de front ses études de master à distance, qu’elle a achevées en 2015.

Un grand amour

Pourquoi a-t-elle décidé de changer de cap pour se tourner vers la carrière de guide touristique ? “C’est en raison de mon grand amour pour la nature, notamment pour les forêts et montagnes, le milieu où j’ai grandi”. En janvier 2015, H’Anetta est entrée pour la première fois à Son Đoòng en tant qu’assistante-stagiaire du guide principal.

La différence entre guide normal et guide d’aventure dans les grottes ? “En général, les deux se ressemblent car ils doivent considérer la sécurité des visiteurs comme la première des priorités et avoir les compétences nécessaires pour les satisfaire. Mais si l’on entre dans les détails, le métier de guide d’aventure est bien plus rude. Par exemple, pour assurer la sécurité des clients, il faut être formé rigoureusement d’un point de vue technique par exemple dans l’utilisation des baudriers, les techniques de secours médical d’urgence. Il faut aussi avoir de bonnes capacités physiques pour passer plusieurs jours en forêt...”.

H’Anetta (assise, 1re à gauche) dans la grotte Son Đoòng. 
Photo : TT/CVN

Tous les trois mois, H’Anetta et ses collègues doivent répéter les entraînements, et chaque année, à la fin de la saison touristique, elle suit des cours de formation destinés aux guides d’aventures.

Son Đoòng est très large et se divise en plusieurs zones aux reliefs différents. Chacune a été baptisée par les experts, par exemple “Watch out for dinosaurs !” (Attention aux dinosaures !), “Great wall of Vietnam” (Grande muraille du Vietnam), “Wedding Cake” (Gâteau de mariage), “Hand of Dog” (Main de chien).

H’Anetta a été très impressionnée lors de sa première expédition dans le site, notamment par la célèbre zone “Hand of Dog”, un bloc massif de stalagmites naturelles. “C’était tellement surréaliste ! J’y avais enfin mis les pieds. J’avais réalisé mon rêve”. Et depuis, elle est entrée 120 fois dans la plus grande grotte du monde.

La jeune femme parle avec passion de Son Đoòng, du Parc national de Phong Nha - Ke Bàng aux paysages paisibles et magnifiques. La rivière Son au mois de mars a une eau limpide et calme comme une bande de soie douce. Les nuages blancs à la dérive le long des montagnes de Ke Bàng. Les petits bateaux à moteur amenant les visiteurs dans les grottes. “Son Đoòng a une beauté magnifique, différente à chaque fois que nous y entrons. Son charme change en fonction des périodes et des tronçons. Parfois, l’air est transparent dans un bief, alors qu’il y a des brumes avec des gouttelettes de rosée dans un autre”.

H’Anetta (gauche) et la Miss Universe Vietnam 2017, H’Hen Niê, deux femmes Ê đê, à Son Đoòng en 2020. 
Photo : Hai An/CVN

H’Anetta ne trouve jamais monotone ce travail de guide. “Comment Son Đoòng peut-elle m’ennuyer. Car sa particularité est que peu importe combien de fois vous y entrez, vous trouverez toujours des impressions tout à fait différentes”.

Tourisme éco-responsable

En termes d’effectif et de nombre de clients annuels, Oxalis Adventure est la plus grande entreprise de voyages d’aventure en Asie du Sud-Est. Elle suit la voie du tourisme régénératif qui vise à améliorer le concept de durabilité en ajoutant un “plus” au résultat d’une expérience de voyage. Tout son personnel, dont H’Anetta, est conscient de la nécessité de protéger et de préserver l’environnement et les ressources naturelles. “Avant de travailler pour Oxalis, je ne faisais pas moi-même trop attention à la protection de l’environnement. Mais une fois employée, même quand je rentrais à la maison, je me sentais gênée de voir mon père fumer ou les gens autour de moi jeter des ordures un peu partout”.

Pour elle, les cadeaux envoyés par les touristes après leur voyage sont une véritable source d’encouragement, car ils montrent qu’ils se souviennent d’elle et qu’ils l’ont appréciée.

La beauté ineffable de la grotte Son Đoòng. 
Photo : VNA/CVN

La Vietnamienne d’ethnie Ê đê raconte que des touristes canadiens, qui avaient visité Hang Én (Grotte de l’hirondelle) à l’occasion des jours fériés du 30 avril - 1er mai 2015, ont écrit le 13 mai de la même année sur Trip Advisor : “Excellente expérience ! Nous avons fait un voyage de deux jours et une nuit à Hang Én. Ce circuit a été organisé par une entreprise pour qui la sécurité des clients et la protection de l’environnement sont au cœur des préoccupations. C’était génial de voir son personnel ramasser les ordures sur le chemin. Et H’Anetta, notre guide, a été géniale, sympathique, pleine d’humour et parle très bien anglais. Vous pourrez voir facilement sa passion pour le travail et les grottes. Après le voyage, nous avons eu un petit problème sur les billets de train, car cette période était celle des grandes vacances du Vietnam (30 avril - Journée de la libération du Sud et de la réunification nationale, ndlr). H’Anetta nous a accompagnés jusqu’à la ville de Đông Hoi (à 45 km de Phong Nha - Ke Bàng, ndlr) pour nous aider à résoudre nos difficultés...”.

C’est la larme à l’œil que la guide a raconté ce souvenir inoubliable datant pourtant de plus de sept ans.

Linh Thao/CVN

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