Rapt de lycéennes : Boko Haram exige un échange, le Nigeria refuse

Boko Haram a exigé lundi 12 mai dans une vidéo la libération de prisonniers du groupe islamiste en échange de celle des quelque 200 lycéennes enlevées mi-avril dans le Nord-Est du Nigeria, une demande fermement rejetée par le pouvoir nigérian.

En pleine mobilisation internationale pour sauver les adolescentes, Boko Haram a diffusé une nouvelle vidéo : elle montre une centaine de jeunes filles présentées comme faisant partie des lycéennes kidnappées. Filmées pendant une prière collective, elles auraient été converties à l'islam.

Dans cette vidéo, d'ores et déjà "examinée à la loupe" par les experts américains, le chef du groupe armé, Abubakar Shekau, parle pendant 17 minutes et apparaît souriant, en tenue militaire et une kalachnikov appuyée sur l'épaule. S'exprimant en arabe puis en haoussa (la langue la plus parlée dans le Nord du Nigeria), il revendique à nouveau le rapt massif de Chibok.

Capture d'écran de la vidéo de Boko Haram diffusée le 12 mai montrant des lycéennes enlevées par le groupe islamiste en train de prier, habillées en hijab, dans un endroit non précisé.
Capture d'écran de la vidéo de Boko Haram diffusée le 12 mai montrant des lycéennes enlevées par le groupe islamiste en train de prier, habillées en hijab, dans un endroit non précisé.  Photo : AFP/VNA/CVN

Au total, 276 lycéennes avaient été enlevées le 14 avril à Chibok, dans l'État de Borno (Nord-Est), l'un des fiefs de Boko Haram, parmi lesquelles 223 sont toujours prisonnières. Majoritairement musulman, cet État abrite néanmoins une communauté chrétienne importante.

Alors qu'il avait menacé de traiter les jeunes filles en "esclaves" dans une précédente vidéo, Shekau affirme cette fois avoir converti les otages à l'islam.

"Ces filles dont vous vous préoccupez tant, nous les avons en fait libérées (...) et vous savez comment on les a libérées? Ces filles sont devenues musulmanes", dit-il.

Non aux "conditions"

"Nous ne les libérerons qu'après que vous ayez libéré nos frères" emprisonnés par les autorités nigérianes, ajoute-t-il.

Shekau précise qu'un tel échange ne concernerait que "celles qui ne se sont pas converties" à l'islam, celles ayant accepté de devenir musulmanes étant devenues "des sœurs".

Le gouvernement a aussitôt opposé une fin de non-recevoir à cette exigence.

"Ce n'est pas à Boko Haram et aux insurgés de poser leurs conditions", a déclaré le ministre de l'Intérieur, Abba Moro. "Il n'est pas question d'échanger une personne contre une autre".

La nouvelle vidéo de Boko Haram montre environ 130 adolescentes assises à l'air libre sous des arbres, dans un lieu non-identifié, en train de réciter ensemble la "fatiha", l'une des principales sourates du Coran.

Les jeunes filles revêtues de longs voiles noirs et gris laissant seulement leurs visages découverts. Trois d'entre elles sont interrogées : deux disent qu'elles étaient chrétiennes et se sont converties à l'islam, alors que la troisième déclare qu'elle était déjà musulmane.

L'une des filles affirme, le regard fuyant et visiblement sous la contrainte, qu'elles ne sont pas maltraitées.

Mobilisation mondiale

Des experts américains "examinent à la loupe" cette vidéo, a indiqué lundi 12 mai la diplomatie américaine. Les États-Unis "exploiteront chaque indice pour voir comment nous pouvons retrouver ces filles", a déclaré la porte-parole du département d'État, Jennifer Psaki.

Rassemblement interconfessionnel le 11 mai à Durban, en Afrique du Sud, pour demander la libération des lycéennes enlevées par le groupe islamiste Boko Aram au Nigeria.
Rassemblement interconfessionnel le 11 mai à Durban, en Afrique du Sud, pour demander la libération des lycéennes enlevées par le groupe islamiste Boko Aram au Nigeria. Photo : AFP/VNA/CVN

Washington a dépêché au Nigeria une équipe d'experts civils et militaires pour l'aider à retrouver les lycéennes, alors que la mobilisation mondiale ne cesse de grandir.

Lundi 12 mai, la Maison Blanche a pour la première fois donné des détails sur la composition de cette équipe.

Parmi ces 26 personnes, "il y a cinq responsables du département d'État (...) et dix conseillers du département de la Défense qui étaient déjà au Nigeria" et qui ont reçu de nouveaux ordres de mission, a expliqué le porte-parole de l'exécutif américain, Jay Carney.

En outre, sept autres conseillers issus du commandement "Afrique" du Pentagone (Africom) ont été envoyés, ainsi que "quatre responsables du FBI spécialisés dans la récupération, les négociations et les mesures de prévention d'autres enlèvements", a ajouté M. Carney.

Boko Haram, dont le nom en langue haoussa signifie "L'éducation occidentale est un péché", a multiplié, depuis le début de son insurrection en 2009, les attaques contre les écoles. Mais l'enlèvement des lycéennes, suivi d'une revendication vidéo où Abubakar Shekau menaçait de les "vendre sur le marché" et de les "marier" de force, a scandalisé l'opinion internationale et suscité une vague de solidarité.

AFP/VNA/CVN

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