Des personnes manifestent à Lagos pour réclamer la libération des lycéennes enlevées par Boko Haram, le 5 mai. |
L'annonce de ces nouveaux rapts intervient alors que la menace de Boko Haram de vendre comme "esclaves" les lycéennes enlevées le 14 avril, contenue dans une vidéo, a suscité une indignation mondiale.
"Ils passaient de porte en porte à la recherche de filles (...) Ils ont pris de force huit filles âgées de 12 à 15 ans", a déclaré Abdullahi Sani, un habitant du village de Warabe, dans l'État de Borno (Nord-Est), où l'enlèvement des huit adolescentes a eu lieu dimanche soir 4 mai. Ces nouveaux rapts ont été confirmés par d'autres habitants.
Lundi 5 mai, le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, avait revendiqué le kidnapping de 276 lycéennes, dans un lycée de Chibok, également dans l'État de Borno, région d'origine de l'insurrection qui a fait des milliers de morts depuis son déclenchement en 2009.
Dans une vidéo obtenue lundi 5 mai, Shekau explique qu'il va "vendre (les lycéennes) sur le marché" et qu'elles sont traitées en "esclaves".
"Depuis le début, nous imaginions ce qui pourrait arriver à nos filles aux mains de de ces gens abominables. Aujourd'hui, Shekau a confirmé nos craintes", a déclaré Lawal Zanna, dont la fille figure parmi les captives.
L'enlèvement a provoqué une vive indignation dans le pays, où des centaines de parents des lycéennes enlevées s'étaient rassemblés jeudi 1er mai pour une marche de protestation, mais aussi à l'étranger, où il a fait la une de nombreux journaux.
"Totalement contraire aux enseignements de l'islam"
Mardi 6 mai, Al-Azhar, plus haute autorité religieuse de l'islam sunnite, a appelé Boko Haram à relâcher les lycéennes.
Dans un communiqué publié au Caire, Al-Azhar, siège de la prestigieuse université islamique du même nom, a souligné que faire du mal à ces jeunes filles est "totalement contraire aux enseignements de l'islam et à ses principes de tolérance", et appelé "à la libération immédiate" des lycéennes
"Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur cette preuve évidente de barbarie", a déclaré lundi 5 mai la sénatrice démocrate américaine Amy Klobuchar devant ses pairs.
Le chef de la diplomatie britannique, dénonçant des kidnappings "écoeurants", a indiqué que Londres apportait une "aide concrète" au Nigeria dans cette affaire.
Vendre les adolescentes s'apparenterait à un crime contre l'humanité, a prévenu l'ONU. Une "cruauté inimaginable", a dit Angelina Jolie à Paris.
Le leader de Boko Haram, Abubakar Shekau, ici dans une vidéo le 24 mars. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Au total, 276 lycéennes avaient été enlevées il y a trois semaines. Plusieurs dizaines ont réussi à s'enfuir mais plus de 220 seraient toujours aux mains des insurgés, selon la police.
Depuis l'attaque, les familles ont critiqué l'action de l'armée, qu'elles accusent d'avoir négligé l'affaire depuis le départ.
Les militaires assurent avoir lancé une vaste opération de recherches, notamment dans la forêt de Sambisa où Boko Haram a installé des camps fortifiés.
Emmenées à l'étranger ?
Les États-Unis ont proposé mardi 6 mai d'envoyer une équipe d'experts pour aider les autorités nigérianes à retrouver les lycéennes. Le secrétaire d'État américain John Kerry s'est entretenu par téléphone à ce sujet avec le président nigérian Goodluck Jonathan.
Le département d'État américain avait indiqué disposer d'informations selon lesquelles les adolescentes auraient été emmenées dans des pays voisins, se faisant l'écho de déclarations - non confirmées - de responsables locaux à Chibok, qui avaient affirmé récemment que les captives avaient été vendues comme épouses à des combattants islamistes du Cameroun et du Tchad.
Mais les autorités tchadiennes et camerounaises ont indiqué que les lycéennes n'étaient pas dans leurs pays.
Pour Enoch Mark, critique virulent du gouvernement depuis que sa fille a été enlevée, l'action de l'armée nigériane reste largement insuffisante.
Les insurgés de "Boko Haram ne sont pas des esprits ou des créatures extra-terrestres qui ne peuvent pas être suivies et maîtrisées", a-t-il déclaré.
Le président nigérian Goodluck Jonathan est soumis à une forte pression depuis le rapt, survenu quelques heures après un attentat à la voiture piégée revendiqué par Boko Haram dans les faubourgs de la capitale fédérale, Abuja, qui avait fait au moins 75 morts - l'attaque la plus meurtrière enregistrée dans la ville.
Goodluck Jonathan, affaibli par les critiques contre la corruption de son administration et son impuissance à juguler les violences, espérait que le Forum économique de l'Afrique, sommet commençant mercredi 7 mai à Abuja, mettrait en valeur les progrès économiques du pays et non ses graves problèmes politiques, sécuritaires et sociaux.
AFP/VNA/CVN