Hô Chi Minh-Ville
Professeure Ngoc Phuong : une vie pour la médecine et la justice sociale

La Professeure Nguyên Thi Ngoc Phuong, ancienne directrice de l'Hôpital Tu Du et pionnière de la fertilisation in vitro au Vietnam, est devenue une "fée" apportant le bonheur aux familles infertiles. Elle a également lutté sans relâche pour les victimes de l'agent orange/dioxine.

>> La Professeure Nguyên Thi Ngoc Phuong honorée par le prix Ramon Magsaysay

>> Une vie de combat pour faire entendre la voix des oubliés

À 81 ans, la Professeure Nguyên Thi Ngoc Phuong poursuit sans relâche son travail.
Photo : VNA/CVN

Née dans un pays en guerre, Nguyên Thi Ngoc Phuong a nourri dès son jeune âge un profond amour pour la médecine. "Ma famille vivait dans la pauvreté, et un jour, j'ai été gravement malade, au point de penser que je n'allais pas m'en sortir. Heureusement, un médecin m'a sauvée. Depuis ce moment-là, j'ai rêvé de devenir médecin, pour pouvoir à mon tour guérir les autres", confie la Professeure Phuong. Plus tard, une fois devenue médecin, elle a rejoint l'hôpital Tu Du à Hô Chi Minh-Ville.

Se souvenant du 30 avril 1975, cette professeure raconte qu'avant cet événement, la ville était plongée dans un tourbillon de confusion. Les habitants, terrorisés, hésitaient à sortir, et la plupart des médecins ainsi que des infirmiers, effrayés, ne se rendaient pas au travail. Certains tentaient de fuir. Cependant, l'hôpital restait plein de patients, dont des femmes sur le point d'accoucher ou nécessitant des interventions urgentes. Ne pouvant rester inactive, la Professeure Ngoc Phuong décida de se rendre à l'hôpital avec ses trois enfants, se mettant à disposition 24 heures sur 24. Malgré les combats violents à l'extérieur, elle et ses collègues continuaient de sauver des vies à l'intérieur des murs de l'hôpital.

Après la libération, la situation du pays était extrêmement précaire, et les ressources médicales faisaient cruellement défaut. La professeure, accompagnée de son équipe, luttait sans relâche pour soigner les malades. À cette époque, son mari avait prévu de partir en France avec leurs enfants. Au début, elle pensait que ce départ serait pour l'avenir de ses enfants, mais au dernier moment, elle prit la décision de rester. "Je n'ai pas pu partir. En France ou aux États-Unis, les médecins sont nombreux, mais ici, les patients ont un besoin urgent de soins. Je ne pouvais pas quitter mon pays, mes proches, mes amis. Il fallait que je reste auprès de ma terre natale", confie-t-elle en se remémorant ce choix décisif.

En 1979, lorsque son mari revint pour la convaincre de le suivre en France, elle choisit une nouvelle fois de rester. Peu après, elle se sépara de lui, qui partait chercher son bonheur ailleurs, tandis qu’elle élevait seule leurs trois filles tout en poursuivant sa carrière médicale. Elle estimait que, bien qu’elle n’ait pas pu participer activement à la lutte pendant la guerre, elle pouvait néanmoins contribuer à la paix en apportant son soutien à son pays à travers son travail.

Un parcours extraordinaire

Une fois sa décision prise, la Professeure Ngoc Phuong se consacra pleinement à sa carrière. En tant que directrice de l'hôpital Tu Du, elle travailla sans relâche aux côtés de ses collègues pour surmonter les défis, améliorer constamment les compétences médicales et introduire des techniques innovantes afin de sauver des vies. Peu à peu, l'hôpital Tu Du s'imposa comme une référence en gynécologie dans le Sud du pays.

La Pr. Nguyên Thi Ngoc Phuong avec des enfants victimes de l’agent orange/dioxine du Village de la paix à Hô Chi Minh-Ville.
Photo : VNA/CVN

Pendant cette période, la professeure entra en contact avec de nombreuses femmes souffrant d'infertilité. Le profond désir de ces patientes de devenir mères la poussa à développer la fécondation in vitro au Vietnam. Après plusieurs années d'apprentissage et d'efforts dans des conditions difficiles, le 30 avril 1988, les premiers bébés conçus par fécondation in vitro virent le jour au Vietnam. Ce fut un moment émouvant pour la professeure Phuong, les larmes aux yeux, heureuse d'avoir réussi à "créer des vies". En quelques mois, ses cheveux avaient blanchi de moitié, mais elle souriait, comblée par sa réussite.

Tout au long de sa carrière, elle fut témoin de nombreuses naissances d'enfants malformés, souvent en raison de l'agent orange/dioxine dispersé par les États-Unis pendant la guerre. La douleur profonde de ces enfants et de leurs familles la poussa à se battre pour obtenir justice pour les victimes. Elle et ses collègues fondèrent le "Village de la paix" à l'hôpital Tu Du, un lieu dédié aux soins des enfants handicapés, victimes de l'agent orange.

Pendant 40 ans, l'image de cette femme courageuse, parcourant le monde pour collecter des preuves et dénoncer les crimes des entreprises chimiques responsables des souffrances durables infligées à son peuple, marqua profondément les esprits à l'échelle internationale. Bien que cette lutte n'ait pas encore abouti à une victoire totale, en 2024, le nom de la professeure Nguyên Thi Ngoc Phuong fut honoré lors du Prix Ramon Magsaysay, souvent désigné comme le "Nobel asiatique", en reconnaissance de son dévouement sans relâche pour les victimes de l'agent orange/dioxine.

Nguyên Phuoc Lôc, vice-secrétaire du Comité du Parti et président du Comité du Front de la Patrie du Vietnam à Hô Chi Minh-Ville, félicite la Professeure Ngoc Phuong pour son prix Ramon Magsaysay, le 12 septembre 2024.
Photo : VNA/CVN

La Professeure Ngoc Phuong fut élue députée lors des VIIe, VIIIe et IXe législatures de l'Assemblée nationale (AN), et occupa des fonctions de premier plan, telles que vice-présidente de la VIIIe législature de l'AN et vice-présidente de la Commission des affaires étrangères de la IXe législature de l'AN. Elle apporta une contribution précieuse aux politiques de santé publique et initia le programme "Cô đỡ thôn bản" visant à réduire la mortalité et les complications obstétricales dans les régions les plus reculées. Ces dernières années, elle lança le programme "Semer des graines de bonheur", qui soutient les couples infertiles dans leur désir d'avoir des enfants.

À 81 ans, la Professeure continue de mener ses recherches et d'œuvrer avec une passion intacte. Elle se réjouit des progrès remarquables réalisés par son pays après 50 ans de libération. "Peut-être que ceux de ma génération comprennent mieux les épreuves et les succès de notre pays. Aujourd'hui, nous mesurons l'ampleur de ces réalisations et leur signification profonde. Pour ma part, si je devais recommencer, je ferais le même choix : rester et contribuer".

Thao Nguyên/CVN

Rédactrice en chef : Nguyễn Hồng Nga

Adresse : 79, rue Ly Thuong Kiêt, Hanoï, Vietnam

Permis de publication : 25/GP-BTTTT

Tél : (+84) 24 38 25 20 96

E-mail : courrier@vnanet.vn, courrier.cvn@gmail.com

back to top