>>Le métier de production de nuoc mam à Phu Quôc reconnu patrimoine national
>>Certificat d'indication géographique pour le nuoc mam de Phu Quôc
Une bouteille de "nuoc mam" de Phu Quôc, une spécialité de la province de Kiên Giang (Sud). |
Le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme a inscrit fin mai le métier de production de nuoc mam (saumure de poisson) à Phu Quôc, dans la province de Kiên Giang, sur la liste du patrimoine immatériel national. Cette reconnaissance permettra aux habitants locaux de mieux développer leur artisanat ainsi que de promouvoir un produit phare de l’île.
Une tradition séculaire
Nichée à l’extrême Sud-Ouest du pays, Phu Quôc est à environ 120 km de la ville de Rach Gia de la province de Kiên Giang. Elle est réputée pour ses plages de sable blanc bordées d’une eau turquoise et ses forêts tropicales. Elle bénéficie d’un climat doux presque toute l’année. Ses eaux profondes constituent des zones de pêche réputées, favorisant le développement de l’industrie de la pêche et du système portuaire. C’est grâce à ces conditions naturelles propices qu’a vu le jour cet artisanat traditionnel et prospère : la production de nuoc mam. Et l’on peut affirmer sans conteste qu’à Phu Quôc se trouve le meilleur nuoc mam du Vietnam !
Selon les archives, ce métier remonte à la fin du XIXe siècle lorsque la pêche à Phu Quôc se développa fortement et fut capable de subvenir aux besoins des près de 2.000 habitants. L’île possède une source abondante d’anchois qui constitue la matière première du nuoc mam.
Il y a plus de 200 ans, les pêcheurs les capturaient dans les eaux profondes au large, avec de grands filets. Étant donné que chaque voyage pouvait durer plusieurs jours, ils salaient les poissons afin de garantir leur fraîcheur. Ces derniers étaient ensuite marinés dans de grands fûts.
La salaison des anchois dans ces cuves en bois constitue un véritable art original des habitants insulaires de Phu Quôc. C’est pourquoi, en s’y rendant, les touristes auront l’occasion d’admirer ces fûts géants de couleur ocre installés dans d’immenses maisons que l’on appelle "nhà thùng" (maisons de fûts). Chacun compte 55 planches de bois d’une dimension de 2,2 m de long et de 20 cm de large. Les artisans fortifient la monture par des cordes de rotin. La température idéale des "nhà thùng" oscille entre 20o et 27oC, cruciale à la qualité, à la couleur ainsi qu’à la saveur du nuoc mam.
Selon la présidente de l’Association des producteurs de saumure de poisson de Phu Quôc, Hô Kim Liên, la confection de nuoc mam doit respecter scrupuleusement la méthode ancienne qui se transmet de génération en génération.
Pour une saumure d’excellente qualité, on fait mariner les anchois dans le sel selon un ratio de trois quantités de poissons pour une de sel. Le processus de fermentation dure entre 10 et 15 mois. Les premiers litres de la récolte, appelés nuoc mam nhi, sont considérés comme les meilleurs. Le liquide a une couleur acajou ou ambrée, une texture sirupeuse et un goût puissant. À noter que plus les mois passent, plus la sauce, très foncée au départ, commence à s’éclaircir et que son goût, commence lui aussi à s’atténuer.
Des ambitions internationales
Touristes étrangers visitant un atelier de fabrication de "nuoc mam" à An Thoi, dans le district insulaire de Phu Quôc. |
D’après l’Association des producteurs de saumure de poisson de Phu Quôc, ce métier s’est rapidement développé depuis 1945. En juillet 2013, le fameux condiment de l’île est devenu le premier produit vietnamien répondant aux critères de l’appellation d’origine protégée (AOP) européenne, dont la délivrance est soumise à trois conditions en termes d’origine, de qualité et de services.
À présent, Phu Quôc compte 100 "nhà thùng" qui se concentrent dans les quartiers de Duong Dông et An Thoi. D’ici 2025, l’île cible la confection de 12 millions de litres par an.
Le métier de production de nuoc mam à Phu Quôc est un patrimoine immatériel de grande valeur historique, culturelle et économique. Il contribue à créer des emplois ainsi qu’à assurer les conditions de vie des habitants insulaires.
Cet artisanat participe également à la croissance économique de la localité. En particulier, il est un de ses produits touristiques phares. En s’y rendant, les visiteurs ont l’occasion de découvrir les villages de métier traditionnel et l’odeur saisissante du nuoc mam.
Malgré les difficultés actuelles concernant notamment l’écoulement et la pandémie, Phu Quôc reste déterminée à renforcer le développement de la qualité de son nuoc mam. La localité ambitionne de déposer un dossier de cet artisanat auprès de l’UNESCO pour une reconnaissance future en tant que patrimoine immatériel mondial. Cela contribuera non seulement à préserver un métier centenaire mais aussi à valoriser l’identité culturelle autochtone de cette jolie ville insulaire.
Le nuoc mam de Nam Ô, cadeau de la mer
Le métier de fabrication du nuoc mam de Nam Ô, dans la ville de Dà Nang (Centre) a été reconnu en tant que patrimoine immatériel national en 2019. Un artisanat apparu il y a environ quatre siècles. Le village de Nam Ô dispose d’une centaine de foyers-producteurs de nuoc mam. Sa saumure de poisson est préparée de manière traditionnelle, suivant le ratio de 1 kg de sel pour 3 kg d’anchois. La production doit passer plusieurs étapes suivant les techniques ancestrales. Les villageois de Nam Ô font également savoir que la couleur du nuoc mam dépend de la taille des poissons utilisées. Les gros anchois donnent une couleur sombre alors que ceux de taille plutôt moyenne, une couleur miel. Chaque année, le village fabrique plusieurs milliers de litre de nuoc mam qui sont écoulés partout dans le pays.