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Organisé le 8 novembre dans le cadre du Festival Thang Long-Hanoï, au Temple de la Littérature, le colloque “Application du patrimoine dans la création“ a réuni chercheurs, artistes et créateurs autour d’une question centrale : comment faire en sorte que le patrimoine ne soit pas seulement conservé dans les musées, mais qu’il devienne une énergie créative au cœur de la vie moderne ?
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| Les artisans ne sont pas seulement des gardiens du savoir mais aussi des forces créatives indispensables. |
| Photo : VNA/CVN |
Le colloque a également marqué le lancement du projet “Change with Respect” (Changer avec respect), une initiative visant à établir un cadre de coopération équitable et éthique entre artisans, designers et communautés créatives au Vietnam. L’intérêt manifeste des étudiants, cher-cheurs et du grand public témoigne du désir de relier les valeurs traditionnelles au courant culturel contemporain.
Quatre axes essentiels
Le colloque a abordé quatre questions fondamentales pour l’avenir du patrimoine et de la création : la pensée de la conservation : passer d’une approche “statique“ à une approche “dynamique“ ; l’inclusion communautaire : placer la communauté d’artisans au centre des projets ; légalité et équité : aborder les droits de propriété intellectuelle et l’équité ; pratique éthique : définir la pratique créative responsable.
Selon la Docteure Mai Thi Hanh, vice-doyenne de la Faculté des industries culturelles et du patrimoine (de l’Université nationale de Hanoï), le patrimoine ne peut survivre que s’il est conservé dans un état dynamique, lié à la créativité. Elle souligne la nécessité de passer d’une conservation “figée et exposée” à une approche intégrée à la pratique et à l’innovation, permettant ainsi au patrimoine de se renouveler et de s’adapter au contexte moderne. Le patrimoine doit être considéré non pas comme un objet inerte, mais comme une matière vivante, sans cesse expérimentée, recréée et transformée.
Partageant cette vision, Trân Hoài, chef du Département des études patrimoniales (Université nationale du Vietnam - Hanoï), affirme le rôle central des artisans comme acteurs essentiels du réseau créatif patrimonial. Les artisans ne sont pas seulement des gardiens du savoir, mais des forces créatives indispensables. Tout projet appliquant le patrimoine doit s’appuyer sur leurs compétences afin de garantir l’authenticité et la profondeur culturelle des créations
Pour Nguyên Thi Lê Quyên, directrice du Centre de promotion et de diffusion du patrimoine culturel immatériel du Vietnam (VICH), le rayonnement du patrimoine provient de sa dynamique interne, de l’influence du contexte social et de l’intérêt de la communauté. Lorsque la société interagit et applique le patrimoine de manière responsable, les artisans trouvent une motivation nouvelle pour préserver et transmettre leurs savoirs.
L’entrée du patrimoine sur le marché de la création soulève toutefois des questions juridiques et éthiques, notamment en matière de propriété intellectuelle. Lê Tùng Son, enseignant à l’Université des sciences sociales et humaines (de l’Université nationale de Hanoï), s’interroge : comment garantir l’équité lorsque les savoirs traditionnels - biens collectifs d’une communauté - sont exploités commercialement par des individus ou des entreprises ?
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| Le patrimoine ne peut survivre que s'il est conservé dans un état dynamique, lié à la créativitié. |
| Photo : VNA/CVN |
La législation actuelle protège surtout les créations individuelles, alors que les connaissances traditionnelles appartiennent à un collectif et sont le fruit de générations successives. L’absence d’un cadre juridique et éthique clair peut conduire à une appropriation culturelle : exploitation lucrative sans partage, reconnaissance ni respect pour la communauté d’origine. Cependant, les experts considèrent ces défis comme des moteurs pour encourager des pratiques créatives responsables, où tradition et modernité coexistent et génèrent de nouvelles valeurs.
Responsabilité éthique dans l’innovation
Un exemple concret présenté lors du colloque est celui de l’artiste Trân Thao Miên, fondatrice de la coopérative Collective Sonson. Plutôt que de copier les motifs traditionnels, elle choisit de comprendre et d’appliquer les savoir-faire artisanaux anciens - tels que le tissage et la teinture - dans un langage de design contemporain. Ce processus de co-création entre artisans et designers permet de produire des œuvres d’une grande qualité esthétique, tout en intégrant l’histoire, l’esprit et les valeurs culturelles du patrimoine.
L’atmosphère du colloque s’est révélée dynamique et ouverte, attirant un large public d’étudiants et de chercheurs. Les débats ont témoigné de l’intérêt marqué des jeunes générations pour la renaissance du patrimoine dans la vie quotidienne.
Les intervenants se sont accordés sur un point fondamental : le patrimoine ne peut véritablement vivre que s’il est abordé avec créativité, respect et responsabilité partagée.
La création fondée sur le patrimoine ne consiste pas simplement à puiser l’inspiration, mais constitue un processus de collaboration équitable entre deux acteurs clés : les artisans, gardiens de la mémoire culturelle, et les créateurs, porteurs d’un souffle nouveau.
Ainsi, le patrimoine devient une source d’énergie collective, promettant un avenir où les valeurs traditionnelles seront réinventées, diffusées et déve-loppées durablement au sein de la culture contemporaine.
Xuân Lôc/CVN




