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Le dessinateur Clément Baloup. |
Photo : Châu Anh/Vnexpress/CVN |
Deux BD françaises, Mémoires de Viêt kiêu : Les lính thợ - immigrés de force et Mémoires de Viêt kiêu : Les engagés de Nouvelle-Calédonie, de Clément Baloup (scénario et dessin) et Pierre Daum (scénario), viennent d’être publiées en vietnamien sous les titres Kí ức Kiều bào : Lính thợ - Lao động Việt đến Pháp giữa Thế chiến II et Kí ức Kiều bào : Chân đăng - Phu mỏ người Việt ở Tân Thế giới.
La publication de ces romans graphiques s’inscrit dans le cadre d’un projet de développement de la BD au Vietnam, lancé par les Éditions Kim Dông en coopération avec l’Institut français de Hanoï.
Le destin mouvementé des soldats-ouvriers
Mémoires de Viêt kiêu : Les lính thợ - immigrés de force raconte l’histoire des ONS (Ouvriers non spécialisés), terme désignant les Vietnamiens enrôlés de force pour partir en France pendant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). À l’époque, environ 20.000 personnes ont été contraintes de se rendre en métropole pour travailler dans des usines, des ateliers ou dans les champs. En raison de la guerre, certains ont choisi de rester, d’autres n’ont pas pu rentrer au Vietnam, tandis que ceux qui y sont parvenus ont affronté de nombreux obstacles en raison de leur statut de “soldats-ouvriers”. Leur histoire est longtemps restée méconnue, tant au Vietnam qu’en France.
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Deux BD françaises traduites en vietnamien sont publiées par les Éditions Kim Dông. |
Photo : TN/CVN |
Cette BD redonne vie à ces parcours oubliés, mettant en lumière leurs contributions à l’économie française et leur soutien enthousiaste à l’Oncle Hô (Président Hô Chi Minh) et à la révolution vietnamienne pendant une période turbulente de l’histoire mondiale.
Quant à Mémoires de Viêt kiêu : Les engagés de Nouvelle-Calédonie, l’ouvrage ramène les lecteurs près d’un siècle en arrière, à l’époque où des milliers de paysans vietnamiens embarquaient à Hai Phong (Nord) pour rejoindre les colonies françaises dans les îles de l’Océanie. Ces hommes partaient comme travailleurs volontaires sous contrat de cinq ans, recrutés par des entreprises coloniales françaises. L’œuvre décrit leur vie dans les mines de nickel de ce département français d’outre-mer.
S’appuyant sur des recherches historiques, des archives, des entretiens et des notes personnelles, Clément Baloup et Pierre Daum ont recréé une réalité où passé et présent se rejoignent, à travers de vastes espaces allant du Vietnam à la France et à la Nouvelle-Calédonie. Profondément attaché au Vietnam et aux destins brisés de ses ressortissants, l’illustrateur Clément Baloup met sa sensibilité au service du souvenir de ceux qui ont dû quitter leur terre natale : les Viêt kiêu.
Double héritage culturel
Au sujet de ces deux BD, Clément Baloup confie : “J’ai beaucoup travaillé sur la couleur. J’ai eu la chance d’étudier les beaux-arts à Hanoï il y a 20 ans. Je me suis inspiré des couleurs de la peinture vietnamienne, notamment de la laque, pour insuffler à mes œuvres un esprit, une atmosphère légèrement vietnamienne. Les couleurs ne sont pas uniquement là pour embellir, elles permettent de dire si l’on est au présent, au passé, si le passé est doux, nostalgique, difficile ou douloureux”.
“Ce qui est intéressant pour moi, c’est que les Vietnamiens immigrés de force ont des descendants en France métropolitaine et en Nouvelle-Calédonie, où l’on retrouve des traces de la culture vietnamienne dans différents endroits. En Nouvelle-Calédonie, par exemple, le plat vietnamien le plus apprécié, ce sont les +nems+ (rouleaux de printemps)”, partage-t-il.
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Clément Baloup met sa sensibilité au service du souvenir de ceux qui ont dû quitter leur terre natale : les "Viêt kiêu". |
Photo : TN/CVN |
Clément Baloup privilégie des scènes où les personnages cuisinent des mets vietnamiens. “Pour moi, c’est un trait culturel très fort. Par exemple, les +Viêt kiêu+, même s’ils ne vivent plus au pays natal et parlent anglais ou français tous les jours, continuent de manger à la vietnamienne. Les scènes liées aux plats de ce pays d’Asie permettent d’ajouter aux sensations des lecteurs”.
Né en 1978 en France, Clément Baloup a un père vietnamien et une mère française. Après des études de design à Marseille, il a poursuivi sa formation aux beaux-arts à Angoulême et à Hanoï. Cette immersion dans deux cultures lui a permis de développer une sensibilité et un style unique. Fort de son double héritage culturel franco-vietnamien et de son intérêt profond pour l’histoire et la culture du Vietnam, Clément Baloup aborde ces sujets sous des angles variés : les différences entre les témoignages et les regards extérieurs, les dilemmes du destin des personnes migrantes ou encore les relations intergénérationnelles (parents-enfants).
De son côté, Pierre Daum, né en 1966, est un universitaire et journaliste français, spécialisé dans l’étude et la recherche sur les questions historiques de l’Indochine.
Linh Thao/CVN