>> Les gardiennes de l’esprit et de la vitalité du then
>> Lê Thi Luong ou l’histoire d’une artisane passionnée
>> Une vie meilleure pour les quilteuses
>> Hà Thi Vinh, l’artisane qui garde le feu pour la poterie de Bat Tràng
Mme Lan en pleine action lors de l’évènement mensuel “Rencontrez les quilteuses”. Photo : Mekong Quilts/CVN |
“Je suis née dans la ville de Dà Nang (Centre), mais j’ai déménagé juste après la fin de la guerre à Duc Linh”, raconte Vân Lan.
Il n’y avait pas beaucoup de travail, donc son père élevait des volailles et des cochons pour nourrir sa famille. À part les routes goudronnées provinciales, les membres de la famille se déplaçaient principalement sur des routes en terre dans le village. Heureusement, les inondations n’étaient pas courantes à Duc Linh, mais la vie était rude avec des sécheresses régulières et des coupures d’électricité fréquentes.
En 2000, le mari de Vân Lan est décédé dans un accident de moto, la laissant veuve avec quatre enfants. Deux de ses enfants ont abandonné l’école et son fils aîné est devenu dépressif car il ne trouvait pas de travail. Peu de temps après et contre toute attente, elle fut recrutée dans la première équipe de quilteuse de Mekong Quilt. Elle commença à travailler pour l’entreprise sociale à la fois dans son village mais aussi à Hô Chi Minh-Ville.
“Il m’a fallu 20 jours pour terminer un ensemble complet de couettes. Mais après environ six mois de formation et de pratique, j’ai pu terminer une parure de lit complète en seulement deux semaines”, se souvient-elle.
Au fur et à mesure que l’échelle de production de Mekong Quilts a augmenté, Mme Lan a été nommée cheffe de plusieurs équipes de quilteuses et a été régulièrement envoyée à travers le pays pour aider à la coordination et à la formation. Tous les produits Mekong Quilts comportent trois couches de tissu, et leur complexité nécessite que Lan prend également part aux contrôles qualité pour s’assurer qu’aucun défaut ne soit trouvé sur un produit avant qu’il ne soit remis au service expédition.
Elle souligne que les articles les plus complexes à confectionner sont ceux qui ont des formes et des motifs compliqués, notamment la collection de quilts pour bébés à motifs d’animaux : “Les pièces de tissus sur lesquels figurent les animaux doivent d’abord être terminées séparément pour ensuite venir compléter le produit final, ce qui prend presque trois fois plus de temps !”.
Succès d’une entreprise sociale
Pour elle et d’autres quilteuses, le temps passé et l’effort concédé pour terminer certaines pièces s’accompagnent parfois de douleurs physiques.
“Vous savez, pour nous les quilteuses, se faire percer le doigt par des aiguilles est une affaire presque quotidienne !”, dit-elle en riant. Elle est persuadée que le succès d’une entreprise sociale telle que Mekong Quilts réside dans des pratiques organisationnelles fondamentalement saines. Chacun est formé pour être performant dans ses propres rôles et tâches. “Le département couture, le département patchwork, le contrôle qualité, l’emballage, absolument tout le monde doit être coordonné !”, explique-t-elle. Cela garantit que les clients reçoivent leurs marchandises à temps et sans aucune mauvaise surprise.
Les mains agiles de Mme Lan sont en action sur une couette pour bébé. |
Photo : Mekong Quilts/CVN |
De manière inattendue, la pandémie de 2020 a contribué à renforcer l’amour de Vân Lan pour la fabrication de quilts et l’a aidée à réaliser l’importance de la créativité. Avec une grosse baisse du nombre de touristes, qui représentaient près de 85% de la clientèle de Mekong Quilts en 2020, elle s’est également retrouvée dans une position délicate pour continuer de créer de nouveaux produits correspondant aux compétences de ses équipes : “Nous avons fait de notre mieux pour innover, en créant des masques par exemple”.
Après la pandémie, Mme Lan a continué de développer d’autres styles visuels pour les produits de Mekong Quilts. Son groupe de travail de quilteuses à Duc Linh a vu une chute de ses effectifs de 26 artisanes à seulement 10, mais elle insiste sur le fait qu’un travail régulier et des revenus stables pour les quilteuses est primordial. Mme Lan est optimiste et espère que le tourisme continuera de se redresser au Vietnam pour aider Mekong Quilts à se développer.
“Nos quilteuses adorent leur travail. Nous espérons que l’esprit et l’amour du quilt et du patchwork rapprocheront les gens de notre art”, raconte Mme Lan.
Depuis fin juin 2023, le magasin phare de Mekong Quilts au 85 rue Pasteur à Hô Chi Minh-Ville, a lancé un nouvel événement mensuel où l’une des artisanes de Mekong Quilts fait une démonstration de quilting pour le plaisir des visiteurs et des amateurs de produits faits-main. En tant que première artisane à organiser ce type de rencontre en direct à Hô Chi Minh-Ville, elle est heureuse d’interagir avec des touristes malgré la barrière de la langue.
“Nous ne parlons peut-être pas la même langue, mais tout ce que je sais, c’est que nous partageons le même amour pour l’artisanat et les produits de qualité !”, conclut-elle avec enthousiasme.
Hervé Fayet/CVN