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| C’est l’étroit attachement pour le cocotier qui a poussé M. Bá à se lancer dans la fabrication d’instruments de musique à partir de cet arbre fruitier lié à la vie des habitants de Bên Tre. |
Âgé de 81 ans, Vo Van Bá, surnommé Ba Bá, est reconnu comme un artisan persévérant de la province de Bên Tre (Sud). Il s’est distingué en fabriquant des instruments de musique traditionnels à partir du cocotier, uniques en leur genre.
Trouver sa maison n’est pas une tâche ardue. Il suffit d’aller dans la commune de Nhon Thanh, ville de Bên Tre, province éponyme, et de suivre un petit chemin qui longe la rivière de Bên Tre.
M. Bá a produit environ 200 instruments de musique traditionnels, principalement des luths, mais n’en a gardé qu’une trentaine. Le reste a été soit vendu, soit offert à ses amis. Une centaine de ces créations a été généreusement donnée au Musée de la province. C’est l’étroit attachement pour le cocotier qui l’a poussé à se lancer dans la fabrication d’instruments de musique à partir de cet arbre fruitier lié à la vie des habitants de Bên Tre. Il est considéré comme leur “âme” et représente le pilier économique de nombreux foyers locaux.
Selon lui, la fabrication de luths à partir de cette ressource locale contribue à préserver l’identité culturelle tout en mettant en valeur l’importance des cocotiers dans la vie spirituelle de la communauté.
Passion dès l’enfance
Dès l’âge de 12 ans, le jeune Bá s’est plongé dans l’apprentissage du đon ca tài tu (chant des amateurs du Sud) et a fait la connaissance de nombreux instruments de musique. Sa soif de savoir ne s’est pas arrêtée là, car il a également pris l’initiative de se rendre chez un artisan voisin pour apprendre à les fabriquer. À l’âge de 15 ans, il pouvait déjà confectionner plusieurs luths simples en utilisant du bois de jacquier.
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| Le luthier Vo Van Bá et un luth fabriqué à partir du cocotier. |
Cependant, en grandissant, les circonstances l’ont contraint à mettre sa passion de côté. Il a dû se consacrer à ses études en électronique et a ensuite rejoint l’armée pour participer à la résistance contre les Américains. Après la libération du Sud et l’unification nationale en 1975, le jeune homme décide de donner libre cours à son amour pour la musique. Il reprend l’apprentissage du đon ca tài tu et s’oriente à nouveau vers la fabrication des luths.
Conscient de l’abondance des cocotiers et du fait que de nombreux objets usuels étaient confectionnés à partir de ce palmier, mais que les instruments de musique demeuraient absents, Bá se lança dans une expérimentation audacieuse en 2011. Il opta pour des troncs âgés de 60-70 ans, choisis pour leur robustesse et leur résistance éprouvée aux termites, qui leur conférait une séduisante teinte rouge miel.
De plus, diverses autres parties de l’arbre telles que la coque, la noix de coco, la spathe… furent mises à contribution. “Le bois de cocotier se prête à la fabrication d’une variété impressionnante d’instruments à cordes tels que đàn bâu (monocorde), đàn tranh (cithare à seize cordes), đàn nguyêt (luth lune), đàn kìm (luth à caisse ronde et à deux cordes), đàn cò (viole à deux cordes), guitare, mandoline, violon, et bien d’autres encore”. En outre, ses compétences en électronique se sont avérées d’une aide précieuse pour maîtriser la qualité sonore de ces instruments singuliers.
Des créations uniques
“La fabrication d’un luth prend en moyenne trois à quatre jours. Cependant, pour les instruments demandant des techniques plus complexes tels que le +đàn tranh+ ou la guitare, il faut une semaine à un mois”, affirme-t-il tout en montrant un luth assez complexe dont la production a nécessité plus d’un mois. Ce dernier est conçu à partir de bois de cocotier, de quao (Stereospermum neuranthum), de corne de buffle et de peau de python.
En plus des instruments courants qui requièrent des techniques de fabrication simples, M. Bá a réussi à créer deux luths géants. Le premier, conçu à partir d’un gros pied de cocotier, mesure 2,5 m de haut, avec une caisse de résonance mesurant 1,1 m de long et 60 cm de diamètre. Un habitant de Binh Duong (Sud) a manifesté le désir de l’acheter pour la somme de 150 millions de dôngs, mais M. Bá a catégoriquement refusé de le vendre.
Le deuxième est un đàn bâu de plus de 2 m de long, avec une sculpture représentant la carte nationale du Vietnam. “Je tenais à cette grande taille pour affirmer au monde que le +đàn bâu+ est un produit authentiquement vietnamien”, explique-t-il fièrement. Ses créations ont été présentées dans plusieurs expositions à l’étranger et dans le pays.
Lors du Festival de cocotier de Bên Tre 2012, 27 pièces divisées en 10 catégories ont été exposées et reconnues par le Livre Guinness Vietnam comme “La première collection d’instruments de musique traditionnels fabriqués à partir de cocotier au Vietnam”.
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| Vo Van Bá joue du "đàn cò" (viole à deux cordes), fabriqué à partir d’un pied de cocotier. |
M. Bá se réjouit : “J’ai accueilli des touristes d’une dizaine de pays comme États-Unis, Angleterre, France, Allemagne, Australie, République de Corée, Chine, Japon, Inde, Laos... désireux de les voir et de les étudier directement. En particulier, il y a eu deux chanteurs suisses qui sont venus me demander d’en jouer sur scène avec eux”.
D’après Nguyên Van Bàn, directeur du Service de la culture, des sports et du tourisme de la province de Bên Tre, les créations de M. Bá sont véritablement uniques au Vietnam. “La chose la plus précieuse, c’est qu’ils sont fabriqués à partir de bois de cocotier, l’arbre emblématique de notre province. De plus, ces pièces sont hautement appréciées par les chercheurs en termes de créativité artistique et d’esthétique”, souligne-t-il.
Malgré son âge avancé, M. Bá demeure animé par le désir de transmettre son savoir-faire à la jeune génération. Il se dit “prêt” à former gratuitement ceux qui souhaitent apprendre la lutherie afin de préserver et de perpétuer cet artisanat traditionnel.
Texte et photos : Linh Thao - Phúc Hâu/CVN
