Après M. Montebourg et Mme Filippetti, c'est Benoît Hamon qui a annoncé lundi 25 août sur France 2 qu'il ne "participerait pas" à l'équipe Valls 2, dévoilée mardi 26 août. À une semaine de la rentrée scolaire, M. Hamon a, comme ses anciens collègues, présenté son départ comme un choix personnel, cinq mois à peine après sa nomination.
Arnaud Montebourg, le 25 août à Pa |
"Il aurait été incohérent, alors que j'ai exprimé un désaccord avec un point important de la politique économique et sociale du gouvernement, que je reste au gouvernement", a expliqué M. Hamon, qui a toutefois assuré rester dans la majorité. Il a assuré que la rentrée se ferait dans de bonnes conditions malgré ce départ précipité.
Après un week-end agité par les déclarations anti-austérité de M. Montebourg, le couperet est tombé dès lundi 25 août : le Premier ministre a présenté à François Hollande la démission de l'ensemble du gouvernement, après 147 jours à Matignon.
Manuel Valls, reçu lundi 25 août au matin par le chef de l'État et puis en fin de journée, est désormais chargé de constituer d'ici mardi 26 août une "équipe en cohérence avec les orientations" que François Hollande "a lui-même définies pour notre pays". Il a passé la journée à recevoir un à un à Matignon les ministres démissionnaires.
Le prochain gouvernement se fera donc sans Arnaud Montebourg : celui-ci a assuré avoir dit au Premier ministre qu'il "reprenait sa liberté" faute d'être entendu sur la nécessité selon lui, de "proposer des solutions alternatives" à la politique d'austérité menée en France, mais a assuré avoir quitté M. Valls "en bons termes". Il se retrouve désormais avec pour seul mandat celui de conseiller général de Saône-et-Loire.
"La présidentielle est la seule élection à laquelle j'envisage de me représenter un jour", confiait M. Montebourg il y a environ un an.
Ce sera aussi sans Aurélie Filippetti : l'ex-ministre de la Culture a pris les devants, disant n'être "pas candidate à un nouveau poste ministériel" car elle préfère "la loyauté à ses idéaux" au "devoir de solidarité" gouvernementale, dans une lettre au duo Hollande-Valls. "Faudrait-il désormais que nous nous excusions d'être de gauche ?", interroge-t-elle.
Drôle de destin, alors que ce sont ces trois ministres qui avaient activement manœuvré pour que M. Valls accède à Matignon.
Selon une source gouvernementale, "Matignon cherche également des noms pour remplacer Christiane Taubira" à la Justice. Le nom de Bertrand Delanoë, l'ex-maire de Paris, circulait comme à chaque remaniement.
"Grande colère" de Hollande
L'ex-ministre de l'Éducation nationale Benoît Hamon avant de confirmer qu'il ne participerait pas au gouvernement Valls 2 sur France 2 à Paris, le 25 août |
Photo : AFP/VNA/CVN |
François Hollande n'a pas dit un mot sur cette phase critique. Il s'est exprimé, sous une pluie battante, à l'île de Sein (Finistère) pour le 70e anniversaire de la Libération du pays, rendant hommage à la Résistance de l'île face à l'Allemagne nazie. Dans la soirée, il a prôné "effort", "courage" et "abnégation" dans un discours commémorant la Libération de Paris et appelé à restaurer la "compétitivité" de la France.
Qui a pris la décision d'une démission ? Selon l'Élysée, elle a fait l'objet d'un "consensus absolu" entre les deux hommes. En tout cas, pour Manuel Valls, il s'agit de se démarquer de l'époque Ayrault, marquée par de multiples "couacs". Selon un conseiller gouvernemental, François Hollande "a poussé une grande colère" aux Comores samedi 23 août, au moment de la parution de l'interview de M. Montebourg dans Le Monde, alors qu'il avait publiquement minimisé la portée de ces propos.
L'ex-secrétaire d'État aux relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, s'est dit "confiant" sur le fait que la majorité "restera très largement majoritaire" à l'Assemblée nationale.
Emmanuelle Cosse, la numéro un d'Europe Écologie-les Verts a toutefois prévenu que sur la question d'une participation des écologistes au gouvernement, "les conditions étaient encore moins réunies aujourd'hui qu'en avril", au moment de la formation du gouvernement Valls. "On ne nous l'a pas proposé", a-t-elle également précisé.
"Crise de régime" pour Bayrou
La ministre de la Culture, Aurélie |
Arnaud Montebourg, invité d'Europe 1 lundi 25 août peu avant l'annonce de la démission du gouvernement, avait persisté dans sa critique du cap fixé par François Hollande, assurant toutefois qu'il ne se plaçait pas "dans l'hypothèse" d'un départ.
Aux commandes depuis le printemps d'un grand pôle ministériel économique, Arnaud Montebourg, 51 ans, a multiplié au cours de sa carrière politique les coups d'éclat.
Dimanche 24 août, à Frangy-en-Bresse, il avait reconnu avoir demandé à François Hollande une "inflexion majeure de notre politique économique", après avoir, samedi 23 août dans Le Monde, demandé de "hausser le ton" vis-à-vis de l'Allemagne, quand François Hollande, mercredi 20 août, déclarait ne pas vouloir de "face à face" avec Berlin.
M. Montebourg représentait, avec Benoît Hamon, la caution de gauche du gouvernement. Il avait d'ailleurs pris du galon avec le gouvernement Valls en élargissant son portefeuille à l'économie, outre le Redressement productif qu'il détenait depuis mai 2012.
L'implosion du gouvernement intervient après des résultats économiques désastreux - avec notamment une croissance nulle au 1er semestre - et peu avant les chiffres du chômage (publiés mercredi 20 août).
Plusieurs responsables politiques de tous bords ont envisagé lundi 25 août une dissolution en réponse à la crise gouvernementale, telle la présidente du Front National Marine Le Pen.
Luc Chatel, secrétaire général de l'UMP par intérim, a qualifié de "grave" la "crise politique ouverte par la démission du gouvernement". Même constat pour le président du MoDem, François Bayrou, pour qui la France n'est "pas loin de la crise de régime".
François Hollande s'attendait à une rentrée difficile, c'est encore pire. Elle a débuté lundi 25 août à 09h00 avec la démission spectaculaire de Manuel Valls et de son gouvernement, en réponse aux très vives critiques émises dimanche 24 août, lors de la Fête de la rose de Frangy, par Arnaud Montebourg et Benoît Hamon contre la politique du chef de l'État. Immédiatement reconduit dans ses fonctions par le président de la République, le Premier ministre s'est attelé à la composition de son deuxième gouvernement.
AFP/VNA/CVN