Robin King Austin (2e à droite) avec l’équipe de Fedex, l’un des sponsors de la Vina Capital Foundation, lors d’une campagne menée dans le delta du Mékong. |
Photo : VCF/CVN |
Il y a neuf ans, comme de nombreuses épouses qui suivent leur moitié à l’autre bout du monde, Robin King Austin quitte les États-Unis pour rejoindre son mari, à l’époque directeur exécutif d’une entreprise à Hô Chi Minh-Ville.
En seulement quelques mois, elle décroche un poste de directrice de développement à The Eats meets West Foundation (organisation non gouvernementale venant en aide aux personnes défavorisées d’Asie avec des programmes consacrés à la santé et à l’éducation). Sa mission est alors de collecter des fonds pour différents programmes, mais elle s’intéresse rapidement à l’un d’entre eux en particulier: les opérations chirurgicales pratiquées sur les enfants atteints d’anomalies cardiaques congénitales.
Coûts élevés
De fait, ces dernières coûtent excessivement cher (en moyenne 2.500 dollars), et les parents de milieu modeste ont rarement les moyens de dépenser de telles sommes. Pourtant, la vie future des enfants est en jeu dans de nombreux cas, et peu ont accès à des soins remboursés (voir encadré). De même, si les associations caritatives sont très présentes au Vietnam, peu œuvrent dans ce domaine spécifique. Seules face à la maladie, de nombreuses familles saignent leurs économies et se retrouvent sans rien.
C’est dans ce contexte pour le moins désastreux que Robin King Austin décide d’agir à son niveau et de chercher des soutiens et des partenaires. Elle rencontre ainsi en 2005 un homme d’affaire, Don Lâm, directeur général du groupe Vina Capital, spécialisé dans la gestion de biens et de développement immobilier au Vietnam, en qui elle trouve un allié de choix. En octobre de la même année, ils lancent une campagne de collecte de fonds «Un cœur pour les enfants», afin de financer plus de 500 opérations. Les patients qui en ont bénéficié mènent aujourd’hui une vie normale. Une première opération réussie pour l’Américaine.
Cependant, chaque année, sur environ 1,5 million de naissances au Vietnam, on évalue à 8.000 le nombre d’enfants atteints de cardiopathie congénitale. Face à l’ampleur de la tâche, fin 2006, Robin et Don Lâm décident de poursuivre leur action et créent la VinaCapital Foundation (VCF), organisation à but non lucratif, dont la mission est d’aider les jeunes défavorisés via des projets liés à la santé et l’éducation. Son activité principale est une fois encore la collecte de fonds, auprès d’organismes publics et privés, et de particuliers. La priorité est toujours accordée aux opérations cardiaques pour les enfants défavorisés. Robin King Austin est chargée de gérer le VCF.
Désormais, ce programme porte le nom de Heartbeat Vietnam (Battement de cœur). Cinq ans après sa fondation, il a permis de sauver 2.657 enfants et dans 50 villes et provinces du pays. Uniquement sur l’année 2011, 736 opérations ont été réalisées, le chiffre le plus important enregistré jusqu’à présent.
Soins post-opératoires
Toutefois, toutes les histoires ne connaissent pas une fin heureuse. Hông Thao était domiciliée dans la ville de Nha Trang (Khanh Hoà, Centre). Quand Robin King Austin la rencontre, elle a une quinzaine d’années et reste alitée toute la journée. Son cas est extrême. Le coût de l’opération s’élève à 6.500 dollars et les médecins sont très pessimistes. Robin parvient tout de même à convaincre quelques donateurs et les autorités de la province de Khanh Hoà. À raison. L’opération réussit et Thao peut enfin revivre normalement. Cependant, comme si le sort l’avait désignée coûte que coûte, quelques mois plus tard, Thao commence à avoir des problèmes hépatiques. Sa famille ne peut l’emmener à l’hôpital, et les herbes médicinales que lui procurent ses proches aggravent sa santé. Elle finit par succomber.
Vina Capital Foundation a réussi à attirer l’attention de certaines stars du showbiz, notamment l’actrice Ngô Thanh Vân (droite) qui a fait en 2012, un don de 121.000 dollars. |
Photo : DNSG/CVN |
Selon Robin King Austin, le manque de suivi est en cause dans cette tragédie. Et le cas n’est pas isolé. Quelques semaines plus tard, afin d’assurer un contrôle indispensable des soins post-opératoires, elle ouvre un fonds dédié. «L’enfant est atteint dès la naissance. Même si l’association prend en charge l’opération, les familles dépensent donc énormément pendant des années pour soigner leur progéniture. Il est donc très difficile pour elles de débourser de nouveaux frais (examens, scolarité) par la suite», explique-t-elle.
Pour réduire le temps d’attente, Robin King Austin cherche également des fonds pour acheter de nouveaux équipements aux hôpitaux de province. Enfin, elle est en contact avec des médecins américains pour mettre en place des formations spécialisées à distance à destination de médecins vietnamiens de différentes localités. Ces derniers pourront ainsi mieux examiner les jeunes patients, réaliser des opérations et un suivi post-opératoire. Une manière intelligente d’agir, qui s’avère toutefois toujours insuffisante. Les jeunes atteints de cardiopathie congénitale sont encore 20.000 à attendre une prise en charge réelle.
Soins remboursés pour les enfants de moins de six ans
Depuis 2011, le ministère du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales a proposé au gouvernement de subvenir aux frais d’opération cardiaque des enfants démunis. Ainsi, les frais d’opération des enfants moins de six ans sont désormais couverts par la sécurité sociale. Des aides gouvernementales sont également octroyées aux enfants entre 6 et 16 ans, issus de milieux défavorisés, orphelins de père et de mère, ou dont les parents sont en prison et qu’aucun tuteur n’a pris en charge.
Hoàng Hoa/CVN