>>Vers un label du tourisme de Huê
>>À pied d’œuvre pour le Festival de Huê 2012
Pagode Thiên Mu. |
Du côté de Huê la belle, ça s’agite depuis quelque temps. Pensez donc, l’arrivée d’une quarantaine de troupes artistiques venues d’une trentaine de pays au Festival de Huê 2012, qui se tiendra du 7 au 15 avril prochain, ça ne s’improvise pas ! Et en plus cette année, profite pour célébrer le 325e anniversaire de la décision, par le seigneur Nguyên Phúc Thái, de choisir Phú Xuân (ancien nom de Huê actuel) comme capitale du Đàng Trong (Centre et Sud du Vietnam – 1687-2012)... C’est dire qu’il y a de quoi faire frémir la vénérable cité qu’elle soit impériale ou interdite ! Parce que là, pas question de faire dans l’à-peu-près dans une ville dont les fastes d’antan dépassaient tout ce que l’imagination peut supposer…
Couleurs et parfums…
J’aime bien Huê ! Contrairement à beaucoup, je l’ai découverte pour la première fois du haut de la selle de ma moto, lors d’une épique traversée du Vietnam avec mon ami et complice Tuân…
Il faisait une chaleur à faire se liquéfier les tuiles des palais impériaux. Nous étions en train de bouillir sous nos casques et Huê nous a offerts l’abri de ses frondaisons le long de la route qui suit la Rivière des Parfums. Tiens, en voilà un joli nom qui sent bon la lavande et le serpolet ! Moi, je m’attendais à humer des fragrances comme celles que l’on inhale du côté de Grasse. Peine perdue, de parfums il ne reste que l’histoire qui nous dit que les médecins traditionnels de la Cité impériale venaient y cueillir des herbes médicinales pour leurs potions et pilules…
Mais bon, je n’allais pas faire la fine bouche en passant le pont Tràng Tiên (autrefois pont Clemenceau) devant le spectacle que m’offraient les dizaines de bateaux à têtes de dragon qui glissaient sur une eau luisante du bleu du ciel d’été. D’ailleurs, ce pont est déjà un festival à lui tout seul. Et, une fois n’est pas coutume, je vais vous dévoiler un de ces petits secrets que je garde jalousement pour en profiter tout seul égoïstement !
Le pont Tràng Tiên à Huê. |
Si vous êtes de passage à Huê par une belle nuit étoilée (mais les nuits striés d’éclairs orageux ne sont pas mal non plus), montez à la terrasse de l’Impérial Hotel, semblable à une tour de guet aux couleurs de dragon qui surplombe les quais. De là, en dégustant votre boisson nocturne favorite, vous pourrez à loisir admirer la féerie de lumières que vous offre le vieux pont. Un régal pour les yeux, un plaisir pour l’âme, quand la farandole des couleurs danse avec les néons des immenses enseignes du marché chinois de l’autre côté de la rivière…
Maintenant que vous savez, si un jour je vous y croise, je ne manquerai pas de me faire inviter à partager ce moment autour d’un verre amical !
Terre et ciel…
Huê, comme tout le monde un jour ou l’autre, je l’ai aussi abordée par le train de nuit. Par cette voie-là, Huê nous la joue vieille coquette qui sait se faire désirer ! Car pour l’atteindre, il faut beaucoup de persévérance…
En effet, pour moi l’aventure commence déjà à la gare de Hanoi, quand on s’installe dans le compartiment-couchette du train qui entreprend de parcourir vaillamment de nuit les centaines de kilomètres qui séparent la capitale d’aujourd’hui de la capitale d’autrefois. Là, tout est incertain : incertains les compagnons de nuit que l’on va rencontrer pour partager les 4m² de notre studio ferroviaire, incertain le temps que mettra le train pour traverser plaines et vallons, incertain le sommeil qui nous bercera au rythme, tout autant incertain, du roulis et du tangage des voitures... Et justement c’est cette incertitude qui donne la saveur à ce voyage qui nous emmène à coup sûr au bout de la nuit, mais nous ne savons pas dans quel état !!!
Ensemble de monuments de Huê, patrimoine mondial de l’UNESCO. |
Huê, bien sûr, je l’ai aussi admirée depuis la voûte céleste, alors que le nez de notre avion commençait à piquer vers son aéroport. C’est sans aucun doute la façon la plus confortable et la plus rapide de renouer avec elle, à condition d’accepter quelques turbulences, parfois des valises qui tardent à défiler sur le tapis roulant et d’avoir une voiture qui nous attend pour rejoindre la ville à une quinzaine de kilomètres.
Et puis, une fois, j’ai gagné le droit de m’y reposer après une longue route en voiture par la piste Hô Chí Minh depuis Hanoi ! Voyage fatiguant mais magnifique, loin de l’agitation trépidante de la route Mandarine, dans un paysage hors du temps, qui donne au voyageur le sentiment de l’instant présent…
Comme le papillon vers la lumière, il ne se passe pas une année sans que je revienne à cette ville affable, où les étudiantes osent encore porter cet áo dài (robe traditionnelle vietnamienne) blanc qui offre à la sortie des lycées un spectacle de fleurs de cerisiers éparpillées au vent mutin. J’aime me promener le long des quais, entre chien et loup, quand les guinguettes ouvrent leurs quinquets et que les amoureux se cachent dans l’ombre complice. J’aime l’aura de mystère qui s’échappe de la vieille citadelle quand on la parcourt à vélo. J’aime passer à l’aube la porte Ngo Môn de la Cité impériale, alors que la rosée ourle encore les fleurs des frangipaniers pour, dans le silence, mettre mes pas dans les traces de ceux qui ont vécu ici. J’aime Huê pour son calme, sa sérénité, ses traditions... J’aime Huê pour être ce qu’elle est !
Et festival ou pas, des millions de personnes aiment et aimeront aussi Huê...
GERARD BONNAFONT/CVN