De vrais pros !

Enseignement ! École ! Apprentissage ! Des mots qui font frémir des millions d’enfants dans le monde, soit d’inquiétude anticipée face aux examens à venir, soit de joie devant le plaisir des découvertes futures. Au Vietnam comme ailleurs…

>>La formation professionnelle en quête d’attrait
>>Enseignement professionnel, mode d’emploi
>>La formation professionnelle doit être fonction des besoins du marché
Les fêtes des débuts d’année sont passées, et déjà les sacs à dos emplis de livres et cahiers ont repris le chemin des écoles. Mais alors que les enfants occidentaux se préparent déjà aux vacances de février, les petits vietnamiens devront attendre fin mars pour trois jours de vacances, avant de plancher de nouveau sur toutes les matières qui feront d’eux une tête bien faite dans un corps bien portant. Même pas grave comme dirait le titi aux genoux écorchés par une chute intempestive lors d’un chapardage de mangues ! Ici, aller à l’école est une fierté plus qu’un devoir !

L'expérience fait le maître.


Métier demain…

Quand, à la sortie de son école maternelle, je bavarde avec les petites copines de ma fille, il m’arrive parfois des questions d’adulte. Notamment la fatale : «Que veux-tu faire quand tu seras grande ?». À question incongrue, réponse adaptée : docteur, maîtresse d’école, chanteuse, danseuse, marchande, comme papa, comme maman ! Que puis-je attendre d’autres de regards enfantins qui ne perçoivent le monde qu’à travers les modèles familiers qui bercent leur enfance !? Que savent-elles, ces bouts de chou, de toutes les possibilités que leur offre la vie ?
En uniforme à la couleur de leur collège ou de leur lycée, ils sont des millions à transhumer deux fois par jour pour acquérir le savoir si cher à cet estimable Confucius. Mais tous, par goût ou capacités, ne deviendront pas lettrés… Et heureusement, car comme disait ma grand-mère : il faut de tout pour faire un monde ! Et même un lettré doit se nourrir, se vêtir, se loger…, et dans notre société de consommation il existe bien d’autres tentations que celles de l’esprit, qui exige du savoir-faire autant que du savoir-penser ! Et pour savoir faire, il faut faire le plus tôt possible, car comme dit ce proverbe vietnamien : «L’expérience fait le maître»…
Et justement, si de nombreux établissements accueillent des enfants pour les former à un métier particulier dans les grandes villes ou dans les campagnes, on voit aussi fleurir des initiatives privées qui veulent donner aux enfants meurtris par la vie une chance de renouer avec celle-ci dans de bonnes conditions. Et à ce propos, j’ai en mémoire une adresse dans le centre de Hanoi.

Nombreux, au Vietnam, sont les centres qui accueillent des jeunes déshérités
ou handicapés pour les doter d’un métier.


Apprentissage aujourd’hui !

De prime abord, la maison ne paye pas de mine. On la repère déjà au fumet de café fraîchement torréfié qui s’en échappe comme pour inviter le promeneur à entrer dans le petit estaminet qui s’ouvre sur la rue. Un pas ou deux dans la pièce et je suis accueilli par un sourire d’adolescente…
Non, je ne viens pas pour acheter du café. Oui, je viens pour déjeuner ! Ma guide improvisée me mène à une salle en étage, où une dizaine de tables tendent leurs chaises à des convives. Et toujours des sourires, toujours des adolescents…
Tandis que je dévore à belles dents un savoureux repas, le maître des lieux vient me saluer. Égoïstement je l’accapare pour en savoir plus sur cette surprenante demeure où semblent régner des adolescents. Et je découvre alors l’histoire extraordinaire de deux personnes qui, depuis la fin des années 80, accueillent des enfants des rues et leur offrent la chance d’apprendre un métier, soit dans la restauration, soit dans les transports. Et ma présence dans ce restaurant pédagogique (comme le nommer autrement), comme celle de mes congénères de salle à manger, permet à de futurs maîtres d’hôtels ou cuisiniers d’affiner leur art…
L’initiative est belle, mais elle n’est pas unique. Nombreux, au Vietnam, sont les centres qui accueillent des jeunes déshérités ou handicapés pour les doter d’un métier. Je pense à cette célèbre école de boulangerie et pâtisserie où de nombreux touristes viennent «s’engourmandiser», je pense à ces ateliers de broderie où les mêmes touristes viennent s’enthousiasmer devant les fins travaux à l’aiguille, à tous ces lieux où des enfants perdus retrouvent leur dignité en apprenant un métier.
Bien sûr, l’enseignement professionnel au Vietnam, qui est à l’honneur dans cet hebdomadaire, ne peut pas se résumer à ces seuls engagements au service des plus défavorisés. J’aurais pu évoquer les édifices ocres et jaunes qui poussent au milieu des rizières pour abriter des cohortes d’étudiants en agriculture, horticulture et sylviculture. J’aurai pu vous ouvrir les portes de ces nombreuses écoles dédiées aux métiers du tourisme, vous faire visiter les pépinières de métallurgistes et de mécaniciens, glisser un œil du côté des écoles d’arts et d’artisanat…, mais c’est l’éclairage que je voulais apporter en témoignage à cet apprentissage de la vie.
Loin d’être un pro, je ne suis qu’un modeste amateur !

Gérard BONNAFONT/CVN

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