Haïti : les sinistrés tentent de fuir Port-au-Prince

Des milliers d'Haïtiens, terrifiés à l'idée d'un nouveau séisme, tentaient le 16 janvier de quitter Port-au-Prince, où la distribution de l'ade internationale, enfin engagée, suscitait de dangereux mouvements de la part d'une foule affamée.

Quatre jours après le tremblement de terre de magnitude 7 qui aurait fait plus de 50.000 morts, des rations alimentaires ont été distribuées pour la première fois dans le centre de la capitale haïtienne : un hélicoptère américain a jeté une demi-douzaine de petits cartons dans un stade où une foule a sorti les machettes pour se les arracher.

Les cartons contenaient chacun une dizaine de rations alimentaires. L'hélicoptère est reparti aussitôt, au grand dam des sinistrés du séisme du 12 janvier. "Je pensais qu'ils viendraient vraiment nous aider. Et ils ne se sont même pas posés", se désolait un père de famille, qui dort dans le stade depuis l'énorme tremblement de terre, que l'ONU a qualifié de pire désastre de son histoire.

Dans le plus grand bidonville de Port-au-Prince, les habitants se sentaient abandonnés en dépit de la mobilisation internationale en faveur d'Haïti. "On manque de tout, d'eau, de nourriture. Les seuls camions qui passent ici sont remplis de morts", entendait-on.

À mesure que les sauveteurs parvenaient à sortir de la capitale, l'ampleur de la catastrophe commençait à se manifester plus clairement dans l'ensemble du pays. Le président René Préval a répété le 16 janvier l'estimation du bilan fourni la veille par les autorités : au moins 50.000 morts, 250.000 blessés et 1,5 million de sans-abri.

Il a précisé que, sur les 15.000 corps enterrés, 7.000 l'avaient été dans des fosses communes.

Alors que le sol était encore agité le 16 janvier par une secousse de magnitude 4,5, les habitants qui le pouvaient fuyaient la capitale, dont les quartiers les plus dévastés prenaient des allures de ville fantôme.

À la sortie de Port-au-Prince, une barricade formée de pneus en feu, de débris et d'au moins 4 cadavres bloquait la route de Carrefour, où des habitants manifestaient pour exiger le retrait de piles de cadavres en décomposition.

Selon l'ONU, Carrefour, une ville de 334.000 habitants proche de l'épicentre du séisme, est à moitié détruite mais ne serait pas la plus touchée. D'après l'ONU, 80 à 90% des bâtiments de Léogâne, plus à l'ouest, ont été endommagés. Dans cette ville de 134.000 habitants, entre 5.000 et 10.000 personnes auraient été tuées. Une autre ville, Jacmel, serait à moitié dévastée.

Les autorités haïtiennes sont désemparées. "Le gouvernement a perdu ses capacités de fonctionnement mais il ne s'est pas effondré", a cependant assuré le président René Préval, qui a transféré le siège de son gouvernement dans un commissariat proche de l'aéroport de la capitale, que les États-Unis ont été officiellement chargés de faire fonctionner.

Dans une interview à l'AFP, M. Préval s'est félicité de l'aide internationale mais a reconnu que "le problème, c'est la coordination", les autorités parvenant difficilement à acheminer les secours une fois qui s'entassent à l'aéroport.

La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton, arrivée à Port-au-Prince pour rencontrer M. Préval, a rejeté les critiques sur la désorganisation des secours. "Ce n'est pas juste, ce n'est pas juste", a-t-elle lancé.

Les recherches pour retrouver des rescapés se poursuivaient au moins jusqu' hier, a affirmé le 16 janvier un responsable des secours américain, qui a précisé que ses compatriotes avaient sauvé "au moins 15 personnes".

L'ONU restait aussi concentrée sur la recherche des survivants, a indiqué la porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires, Elisabeth Byrs.

AFP/VNA/CVN

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