Après avoir reporté - en signe d'apaisement durant les négociations diplomatiques en cours - un grand rassemblement prévu le 29 décembre à Abidjan, le leader des "jeunes patriotes" pro-Gbagbo a signifié que l'heure de l'affrontement était proche, à l'issue d'un mois de crise née de la présidentielle du 28 novembre.
"Au-delà du 1er janvier, moi Charles Blé Goudé et les jeunes de Côte d'Ivoire, allons libérer le Golf Hôtel les mains nues", a-t-il lancé devant quelques milliers de partisans.
Reconnu président sur le plan international, Alassane Ouattara est retranché avec son gouvernement dans cet hôtel de luxe soumis à un blocus des forces pro-Gbagbo. Le "Golf" est protégé par des éléments de l'ex-rébellion alliée à Ouattara et par les 800 Casques bleus de la mission onusienne, l'Onuci.
Au lendemain d'une attaque contre un convoi de l'Onuci, au cours de laquelle un Casque bleu a été blessé, l'ONU a accusé la télévision d'État RTI, contrôlée par le régime Gbagbo.
Selon Alain Le Roy, chef des opérations de maintien de la paix aux Nations unies, la chaîne relaie des "appels à la haine" contre cette force de quelque 9.000 hommes, dont le président sortant a exigé le départ.
Alors que la crise post-électorale a été marquée par des violences meurtrières, l'ambassadeur nommé par Ouattara aux Nations unies, Youssouf Bamba, a sonné l'alarme. "Nous sommes à deux doigts d'un génocide. Il faut faire quelque chose", a-t-il exhorté, demandant à l'Onuci de protéger les civils.
Au moins 173 personnes ont été tuées selon l'ONU autour de la mi-décembre. Le gouvernement Gbagbo a évoqué un bilan de 53 morts depuis fin novembre, dont 14 membres des Forces de défense et de sécurité (FDS, loyales au sortant).
Pas d'intervention militaire "pour le moment"
Dans ce contexte intérieur très tendu, l'Afrique de l'Ouest a cependant privilégié la négociation, même si elle se préparait à une éventuelle opération militaire pour chasser Gbagbo.
"Nous discutons toujours", a déclaré le chef de l'État nigérian Goodluck Jonathan, président en exercice de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao, 15 pays).
Mandatés par l'organisation régionale, les présidents béninois Boni Yayi, sierra-léonais Ernest Koroma et capverdien Pedro Pires étaient venus voir Gbagbo le 28 décembre à Abidjan pour lui adresser un ultimatum : céder le pouvoir ou prendre le risque d'une intervention armée ouest-africaine.
Les émissaires "y retournent le 3 janvier", a annoncé Jonathan devant la presse, après un entretien avec Koroma et Pires dans la capitale fédérale nigériane Abuja.
"Quand il y a une dispute, c'est le dialogue qui résout tous les différends, ce dialogue est en cours", a expliqué le président Jonathan.
Une intervention militaire "semble, heureusement, écartée pour le moment", a déclaré Jorge Borges, secrétaire d'État capverdien aux Affaires étrangères. L'usage de la force restait toutefois possible puisque les chefs d'état-major des pays de la région se sont réunis les 28 et 29 décembre à Abuja pour évoquer le dossier ivoirien.
Selon un haut responsable militaire, la réunion était notamment consacrée à "la question de la logistique". "La Cédéao souhaite envoyer une force de 2.000 à 3.000 hommes", a indiqué une source diplomatique, tout en s'interrogeant sur sa capacité à y arriver.
AFP/VNA/CVN