Mais ce n'est pas tout : notre homme sert d'interface pour diffuser l'image du Vietnam à travers le monde. Il s'agit de Du Thanh Khiêm, directeur de l'Institut d'enseignement de promotion sociale de la Communauté française Woluwe-Saint Pierre Bruxelles.
Depuis plus d'une décennie, Du Thanh Khiêm fait la navette entre la Belgique, son pays de résidence, et le Vietnam, son pays natal. Tantôt il fait partie de la délégation de la Belgique en visite au Vietnam, en qualité de citoyen belge, tantôt il y revient en tant que simple enfant du pays désireux de se ressourcer. Quelque soit le rôle qu'il joue, Khiêm s'efforce d'apporter quelque chose de bien au pays qui l'a vu naître et grandir.
Né en 1951 à Quang Tri (Centre) de parents commerçants épris pour les études et le savoir, Khiêm a appris par coeur les conseils prodigués par son père, ce dès sa plus tendre enfance : "Il faut voyager à travers le monde pour acquérir de nouvelles connaissances scientifiques afin de devenir un homme utile".
Bien décidé de mettre en pratique ces paroles, Khiêm est parti en Belgique poursuivre ses études en 1974. En 5 ans, il est diplômé dans 4 disciplines. Mais son choix se tourne vers le français, pour lequel il se passionne, et qui rapidement devient un passe-partout lui permettant de s'ouvrir les portes de nouveaux horizons.
Préservation et valorisation de la culture vietnamienne
Pour l'heure, Du Thanh Khiêm est l'unique étranger directeur d'un institut de l'éducation en Belgique. Avec plus de 30 ans d'expériences, il ne mentionne même plus qu'il a donné des cours à de nombreuses générations d'élèves, figurant aujourd'hui au sein des délégations diplomatiques. Ce succès ne doit cependant rien au hasard : "Pour en arriver là où je suis, il m'a fallu travailler 5 fois plus que mes collègues. Je ne compte plus les fois où je suis allé au bureau à 08h00 du matin pour rentrer chez moi à 22h00. Travailler dans un pays développé subit assez de pression", raconte Khiêm.
Du Thanh Khiêm est quelqu'un de simple. Il n'a pas d'allure d'un officiel, ni d'un riche Viêt kiêu. Il s'habille simplement, comme la plupart des Vietnamiens. Vivant en Belgique, un pays développé et occupant un poste très important du secteur éducatif, Khiêm a néanmoins su garder ses habitudes : faire de la cuisine vietnamienne le week-end. Son caractère un peu spécial et son surnom de "campagnard" ont conquis ses amis étrangers, qui sont ainsi devenus intimes. Ils l'apprécient, entre autres, pour son décalage avec un monde qui tourne de plus en plus vite. Ce sont eux qui ont aidé Khiêm à organiser la Soirée gastronomique du Vietnam en Belgique, en novembre 1993, pour laquelle 3 cordons-bleus venus du Vietnam ont cuisiné des plats vietnamiens traditionnels comme le pho ou encore le poisson cuit au nuoc mam . Cette initiative, qui a été couronnée de succès, a poussé Khiêm à organiser la Semaine de la gastronomie vietnamienne en Belgique en mars 1996, ce qui lui a permis de faire de nouvelles rencontres et de nouer des relations avec des experts chevronnés dans divers domaines.
En novembre 1997, Khiêm s'envole pour participer au 7e Sommet de la Francophonie au Vietnam, où il figure parmi les 4 membres de la délégation de Belgique. À cette occasion, il persuade ses amis de rester quelques jours au Vietnam afin de visiter et d'enseigner les techniques professionnelles à l'École du tourisme de Hanoi, qui permettra de procéder au jumelage entre cet établissement et l'École de l'hôtellerie et du tourisme de Liège.
De retour en Belgique, Khiêm profite de toutes les relations qu'il a nouées pour demander de l'aide au secteur du tourisme du Vietnam. Ses amis ne peuvent refuser la sincérité d'un Vietnamien pour son pays natal. Pour réaliser son projet, Khiêm frappe à la porte des officiels du gouvernement pour solliciter le budget destiné à financer les frais de déplacement et de bouche des membres revenant aider le Vietnam. Sa bonne volonté et sa responsabilité conquièrent rapidement le gouvernement belge qui accepte sa proposition et lui donne ce qu'il demande.
En juillet 2004, lors de ses vacances d'été, Khiêm effectue son premier retour officiel au Vietnam avec des enseignants et le "roi de la gastronomie" belge, Pierre Fonteyne, président d'honneur à vie des Maîtres-cuisiniers de Belgique. Ils donnent ainsi des cours de cuisine européenne, d'hôtellerie, d'art floral et des leçons de français. Depuis, chaque année, à l'occasion des fêtes de Pâques, Khiêm pose sa valise au Vietnam avec Pierre Fonteyne. Ils ont depuis ouvert des cours d'hôtellerie à l'attention de plusieurs employés de l'École du tourisme de Hanoi, mais également des organismes du Parti et du gouvernement. Cette année ne fait pas exception à la règle : une délégation des enseignants de l'Institut Woluwe est venue donner des cours aux employés de la Maison des hôtes du gouvernement à Hanoi, du 5 au 16 avril, grâce aux concours de Wallonnie-Bruxelles Internationale.
Khiêm est aussi un homme qui connaît profondément la culture vietnamienne. Il possède, chez lui en Belgique, un véritable "trésor" d'archives sur son pays natal. Il a, pêle-mêle, des vieilles cartes et de vieux manuscrits qu'on ne peut trouver ailleurs.
Dans un tout autre domaine, ce Viêt kiêu atypique cherche aussi à préserver la race de chien H'Mông, que l'on trouve uniquement dans quelques province de la haute région du Nord. Actuellement, Khiêm prépare un projet avec le Comité populaire de Hanoi pour la Grande cérémonie du Millénaire en octobre prochain.
Ayant découvert de nombreux pays à travers le monde, Du Thanh Khiêm n'en oublie néanmoins pas ses racines lorsqu'il évoque le souvenir d'un plat très populaire du Centre du Vietnam, une spécialité de sa terre natale, Quang Tri, bien qu'il l'ait quitté depuis plus de 30 ans maintenant : le poisson pêché dans les rizières et cuit avec la peau de kumquat, le tout avec du riz et dégusté sous une pluie battante. Plusieurs personnes lui ont demandé pourquoi il dépense tant de temps et d'argent à faire des choses futiles. Aucune réponse ne leur est parvenue, mais lui estime que c'est ce qu'il doit faire. Et Du Thanh Khiêm est très heureux comme ça !
Huong Giang/CVN