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À l’heure où le marché mondial de l’art connaît un développement fulgurant, où de nombreux artistes asiatiques sont devenus les cibles favorites de collectionneurs et d’investisseurs, celui du Vietnam reste étrangement absent, comme endormi.
Le marché national de l'art reste comme endormi. |
Selon les experts, pour que le marché national de l’art sorte de sa torpeur, il faut que les Vietnamiens s’intéressent à l’art, qu’ils deviennent de réels connaisseurs, la très grande majorité ayant en effet une sensibilité artistique limitée. Il faut aussi qu’ils perçoivent l’intérêt de l’art d’un point de vue économique. L’art doit devenir un signe ostentatoire de richesse culturelle et matérielle.
D’après Nguyên Dinh Thành, de l’université Paris-Dauphine, de nombreux citadins sont prêts à dépenser de grosses sommes pour acheter des iPad, iPhone et autre MacBook dernier cri, mais rares sont ceux prêts à débourser la même somme pour l’acquisition d’une œuvre d’art.
Pour le peintre Vi Kiên Thành, directeur du Département des beaux-arts, de la photographie et des expositions, vice-président de l’Association des beaux-arts du Vietnam, le marché de l’art est le fondement du développement durable des beaux-arts. Cela doit être le plus important objectif du secteur pour ces dix prochaines années, de concert avec l’amélioration de la qualité des œuvres. «S’il n’y a pas de marché national de l’art, les beaux-arts vietnamiens ne pourront se développer et continueront d’être affectés par le marché de l’art étranger. Depuis des années, les services de gestion sont conscients de ce problème. Il faut prendre des mesures, des politiques pour voir émerger un vrai marché national de l’art, avec de nombreux connaisseurs, des acheteurs. Il faut aussi attirer le public dans les galeries d’art», insiste-t-il.
Une œuvre passée au crible par deux amateurs d’art. |
Photo : Thanh Tùng/VNA/CVN |
D’après Vi Kiên Thành, «cela nécessitera le soutien, la coordination et le consensus de toute la société. Le rôle de l’État, en particulier, est extrêmement important».
Un point de vue partagé par le Dr Tu Manh Luong, directeur du Service des sciences, des technologies et de l’environnement (ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme). «Pour la création d’un marché de l’art, la première phase nécessitera la régulation de l’État à travers des mécanismes et politiques d’investissement dans les beaux-arts».
Pour sa part, le Pr.-Dr. Nguyên Dô Bao précise : «L’État devra stimuler ce marché par des privilèges fiscaux et d’autres mesures favorables aux activités d’investissement, de mécénat et de parrainage par de grandes entreprises. En particulier, l’État devra soutenir la présence de l’art dans la vie, par exemple dans les médias, ou dans le cadre d’expositions...». Récemment, des foires d’art ont eu lieu, attirant des centaines d’acheteurs. Mais ces événements ont toujours été organisés par des organismes privés.
Démocratiser l’art
La majorité des Vietnamiens achètent principalement des tableaux sans réelle valeur artistique, à prix modique, dans un but purement décoratif. Pour soutenir l’Art avec un grand A, certains proposent de faire appel aux milliardaires (en dôngs) et autres nouveaux riches. «Pour stimuler le marché de l’art, des œuvres de valeur doivent être vendues. Et seuls les riches sont à même d’acquérir des œuvres de milliers voire dizaines de milliers de dollars. Ce sont eux qui peuvent donner un second souffle aux beaux-arts nationaux», considère le peintre Nguyên Duc Hoà.
Une solution qui semble réaliste, mais jugée «insuffisante» par Vi Kiên Thành. «Ce ne sont pas seulement les riches ou les entreprises privées qu’il faut mobiliser, mais tous les citoyens», juge-t-il.
Pour aimer les beaux-arts, les apprécier, il faut d’abord les connaître, et cela passe donc par l’acquisition d’un minimum de culture en la matière. En France, le musée du Louvre organise souvent des formations qui s’adressent aux professionnels du monde de l’éducation, du secteur social (animateurs, éducateurs, directeurs de centres, relais…), salariés ou bénévoles d’associations, dans le cadre scolaire ou hors temps scolaire, ainsi qu’aux personnes travaillant dans le secteur de la formation, de la médiation culturelle.
Le Vietnam ne manque pas d’artistes peintres qui ont acquis à la fois l’ingéniosité de l’art asiatique et une connaissance subtile des maîtres occidentaux. |
Photo : Thanh Tùng/VNA/CVN |
Au Vietnam, on devrait aussi s’engager en faveur de la diffusion et de la valorisation de l’art. L’art n’est ni une question d’intellectuels, ni de puristes, ni réservé à une certaine élite. «Il est évident qu’il est temps d’impliquer toute la société dans la reconstruction du marché de l’art vietnamien», estime Vi Kiên Thành.
D’après un expert en art, de nombreux étrangers considèrent que le Vietnam ne manque pas d’artistes peintres qui ont acquis à la fois l’ingéniosité de l’art asiatique et une connaissance subtile des maîtres occidentaux. Cela signifie que le pays pourrait devenir un marché de l’art reconnu, même si actuellement les toiles vietnamiennes ne sont pas très cotées à l’international. Il faut juste impulser le mouvement. «Si celles-ci ne jouissent pas d’une grande valeur, il n’y aura pas d’investissement, et les investisseurs étrangers continueront de négliger les tableaux vietnamiens. Un vrai problème si nous voulons nous intégrer sur le marché mondial et développer nos beaux-arts», affirme cet expert en art.