Plutôt que d’encourager à détruire pour le plaisir, le jeu SPARX cherche à apprendre aux adolescents à faire face à la dépression, sur la base d’une méthode thérapeutique dite comportementale et cognitive (CBT).
Tout aussi important, ses concepteurs ont voulu créer un outil ludique et captivant pour des patients souvent réticents à demander conseil, ou agacés par les recommandations des adultes.
La directrice de Metia Interactive, Maru Nihonih. |
Dans le monde imaginaire présenté par SPARX, le joueur entre dans la peau d’un avatar qui détruit les pensées négatives avec des boules de feu pour sauver le monde du désespoir et du pessimisme.
Directrice du projet, Sally Merry, pédo-psychiatre à l’université d’Auckland, explique que cette approche peu conventionnelle séduit les ados car elle leur permet de faire face à leurs problèmes par eux-mêmes et à leur rythme.
«On n’est pas obligé de traiter des difficultés psychologiques de manière effroyablement sérieuse», dit-elle. «La thérapie ne doit pas forcément être déprimante en elle-même, on peut aussi s’amuser».
Parmi les pays riches, la Nouvelle-Zélande est un de ceux qui arrivent régulièrement en tête en matière de suicide chez les jeunes, selon des études internationales. Et Sally Merry veut rendre plus accessible le traitement à cette maladie. «La dépression chez les jeunes est un phénomène international. C’est fréquent et la plupart du temps, on ne la soigne pas», indique-t-elle. Or la dépression s’accompagne souvent, chez cette classe d’âge, d’échec scolaire et d’un isolement social.
Dans le monde imaginaire présenté par SPARX, le joueur entre dans la peau d’un avatar qui détruit les pensées négatives avec des boules de feu pour sauver le monde du désespoir et du pessimisme. |
Souvent les jeunes «ont juste l’impression qu’ils se sentent mal et ils se disent qu’ils doivent faire avec. SPARX et la CBT montrent qu’on peut faire autre chose qu’accepter cela», selon la psychiatre.
Le jeu vidéo compte sept niveaux d’une quarantaine de minutes chacun --une durée similaire aux traditionnelles consultations avec un praticien-- et s’adresse aux adolescents âgés de 13 à 17 ans.
Aidé par un guide, le joueur évolue au sein des différents niveaux, qui à chaque fois apportent au joueur des clés pour mieux gérer la colère, résoudre les conflits ou apprendre à se relaxer avec des exercices de respiration. Au fil des étapes, l’univers dans lequel il avance devient plus lumineux et moins menaçant.
Pour Maru Nihoniho, directrice de Metia Interactive, qui a travaillé sur ce programme, la difficulté était de rendre le jeu suffisamment captivant pour que le jeune apprenne des choses sans s’en rendre compte sur le moment. «Nous devions garder en tête les objectifs thérapeutiques, tout en concevant un véritable jeu», raconte-t-elle.
La conception a pris quatorze mois, en s’appuyant sur les souhaits d’un groupe test d’ados. Il a fallu cependant limiter leurs demandes de combats sanglants et de coups de feu gratuits.
«On savait qu’il ne pouvait pas y avoir de tirs à cause de la nature du jeu. Si bien qu’au lieu d’avoir des personnages qui tuent avec des mitraillettes ou des bombes, l’avatar a le pouvoir de foudroyer les pensées négatives pour les convertir en idées positives».
Les résultats d’un essai clinique publiés en début d’année dans le British Medical Journal montrent que ce jeu vidéo est aussi efficace pour lutter contre le spleen que des consultations en tête à tête avec un psychothérapeute.
SPARX a suscité l’intérêt des États-Unis, du Canada, de l’Australie et de la Grande-Bretagne, ainsi que d’autres pays non anglophones qui veulent le traduire.
Sally Merry voudrait le rendre accessible dans les établissements scolaires, chez les médecins ou dans les centres d’accueil pour adolescents en difficulté ou même sur Internet. Elle envisage aussi d’élaborer une version destinée aux adolescents homosexuels.
Et même pour les jeunes qui souffrent d’une grave dépression, ou d’une maladie mentale, le jeu peut les aider à oser demander de l’aide. «Ca ne va pas guérir tout le monde», note-t-elle. «Mais lorsque le jeu ne guérit pas, il peut pousser l’utilisateur à aller chercher de l’aide».
AFP/VNA/CVN