Le Pakistan est en proie à une vague extrêmement sanglante d'attentats perpétrés essentiellement par les talibans alliés à Al-Qaïda, qui a tué plus de 4.600 personnes ces quatre dernières années.
Un homme a d'abord fait exploser sa voiture piégée pour ouvrir une brèche dans le mur d'enceinte de la résidence du général de brigade Farrukh Shahzad, commandant-adjoint des Frontier Corps (FC), une unité paramilitaire rattachée à l'armée, a expliqué Hamid Shakil, un officier de la police de Quetta, capitale de la province du Baloutchistan.
Puis, un kamikaze à pied a lancé deux grenades avant de faire exploser sa bombe dans l'enceinte de la résidence, endommageant considérablement la maison.
"Vingt-quatre personnes ont péri", dont l'épouse du général Shahzad, deux enfants et 11 soldats membres des FC chargés de la sécurité d'un convoi qui attendait leur supérieur devant sa maison, a indiqué Hamid Shakil. Au moins 82 autres personnes, dont le général Shahzad et un de ses enfants, ont été blessées, a-t-il poursuivi.
Il y a une dizaine de jours, les Frontier Corps du Baloutchistan ont participé à l'arrestation de Younis al-Mauritani, principal chef des "opérations extérieures" d'Al-Qaïda, menée par les services de renseignements de l'armée pakistanaise, l'ISI.
Ehsanullah Ehsan, le porte-parole du Mouvement des Talibans du Pakistan (TTP), qui a fait allégeance à Al-Qaïda, a revendiqué le double attentat-suicide de mercredi dans un entretien téléphonique, en représailles à l'arrestation d'Al-Mauritani et de deux complices.
L'armée a rendu cette arrestation publique le 5 septembre et insisté sur le fait qu'elle a été réalisée avec "l'assistance technique des services de renseignements américains".
Al-Mauritani est "un cadre important et membre de l'état-major d'Al-Qaïda, lié aux menaces récemment mises au jour visant l'Europe", a indiqué un responsable de services de renseignement occidentaux, sous couvert de l'anonymat.
Al-Mauritani avait été chargé "personnellement" par Ben Laden "de cibler les intérêts économiques des États-Unis, dont des gazoducs et des oléoducs, des centrales électriques mais aussi des pétroliers, à l'aide de bateaux rapides bourrés d'explosifs dans les eaux internationales", précisait le 5 septembre l'armée.
Cette prise a constitué un nouveau revers pour Al-Qaïda, après la mort de Ben Laden, tué le 2 mai à Abbottabad, à moins de deux heures de route au nord d'Islamabad, par un commando de soldats américains héliporté clandestinement.
L'arrestation d'Al-Mauritani constitue aussi un net réchauffement des relations entre Islamabad et Washington. La Maison-Blanche avait d'ailleurs aussitôt chaudement félicité les forces de sécurité pakistanaises.
Depuis le raid d'Abbottabad, les relations entre les États-Unis et le Pakistan, leur allié-clé dans leur "guerre contre le terrorisme" depuis fin 2001, s'étaient sérieusement dégradées, en particulier entre l'ISI et la CIA, qui avaient quasiment cessé de collaborer.
De hauts responsables à Washington accusaient Islamabad --et notamment l'ISI et l'armée-- de complicité pour expliquer que Ben Laden ait pu se terrer plusieurs années dans une ville-garnison non loin de la capitale. Et Islamabad reprochait à Washington de ne pas l'avoir averti de ce raid héliporté nocturne, que l'armée pakistanaise et l'ISI ont vécu comme une humiliation et une brimade.
Les zones tribales du Nord-Ouest, mais aussi certaines dans le Sud-Ouest, sont le bastion des talibans pakistanais et le principal sanctuaire dans le monde d'Al-Qaïda.
À l'unisson de Ben Laden en personne, les talibans avaient décrété le jihad à Islamabad pendant l'été 2007 pour son soutien à Washington, et lancé leur campagne d'attentats.
AFP/VNA/CVN