Quand un Américain ouvre une galerie de peinture vietnamienne

En trois ans d’existence, la galerie de l’Américain Craig Thomas à Hô Chi Minh-Ville est devenue un lieu incontournable d’expositions pour les artistes locaux.

Ces jours-ci, la galerie de Craig Thomas, dans le 1er arrondissement de la capitale économique, attire plus d’amateurs d’art qu’à l’accoutumée. Pour fêter son 3e anniversaire, le lieu accueille actuellement une exposition de plusieurs peintres vietnamiens comme Dô Tuân Anh, Luong Luu Biên, Pham Huy Thông.

Craig Thomas (au milieu) et son assistante Xuân

Lors du vernissage, le directeur de la galerie a surpris l’assemblée en s’exclamant, non sans émotion : «Heureusement, aujoud’hui, notre galerie existe encore». Il faut dire que Craig Thomas s’est beaucoup investi dans ce lieu.

Du droit à l’art, il a fait le grand saut

Craig Thomas est né dans l’État de l’Alabama (aux États-Unis), son père étant un ancien vétéran de la guerre du Vietnam. Diplômé du département de droit de l’Université Emory à Atlanta, il a fait des études pour obtenir une licence de littérature à l’Université Auburn. Il est venu pour la première fois au Vietnam en 1995. «La plupart des Américains entendent parler du Vietnam et désirent connaître la vie du pays. C’est comme ça que je suis venu», se souvient-il.

Mais s’il est venu au départ par curiosité, le provisoire est presque devenu définitif, car Craig Thomas vit et travaille ici depuis déjà 17 ans. À ses débuts, avec sa formation en droit, il a travaillé comme consultant dans plusieurs entreprises et investisseurs étrangers à Hô Chi Minh-Ville et à Hanoi. Il vivait alors aisément. Mais un jour il en a eu marre. Il a décidé de tout abandonner pour choisir un métier bien moins fastidieux : les beaux-arts, un domaine pour lequel il n’avait jamais fait d’études. «Quand j’étais consultant en droit, j’avais travaillé comme gestionnaire dans une galerie du 1er arrondissement. J’adore les tableaux, la peinture, ce travail m’a fasciné. Peu de temps après, j’ai tout quitté pour ouvrir ma propre galerie. C’est ainsi qu’est née la Craig Thomas Gallery», se souvient-il.

Un marché de la peinture encore timide

Après trois ans de fonction-nement, la galerie accueille pour le moment uniquement des peintres vietnamiens. Mais, selon Craig, ils ont tous leur style de création. Lê Kinh Tài, Liêu Nguyên, Lim Khim Ka Ty, Nguyên Thuy Hang, Nguyên Lê Manh, Nguyên Thê Hùng, Bùi Tiên Tuân, Bùi Thanh Tâm sont désormais des habitués de ce lieu d’exposition parmi tous ceux qui s’y sont succédés depuis 2009.

L’entrée de la galerie de Craig Thomas.

Néanmoins, le marché de la peinture au Vietnam est encore peu développé et la galerie peine à survivre. L’argent qu’elle reçoit des peintres, qui restent plus ou moins de temps en fonction de leurs moyens, lui permet tout juste de se maintenir à flot. Selon Craig Thomas, «Rares sont les Vietnamiens qui s’intéressent à la peinture, et les collectionneurs étrangers qui connaissent et reconnaissent les valeurs de la peinture vietnamienne sont peu nombreux». Les responsables des galeries au Vietnam doivent donc être patients.

Malgré ces difficultés, Craig se montre déterminé. Récemment, il a invité Xuân Mai Ardia, une Italienne d’origine vietnamienne diplômée de l’Université de Londres, spécialisée dans l’histoire de l’Art et l’Archéologie, à s’occuper de la sélection et de la supervision du lieu. Avec l’aide de cette experte, la galerie Craig Thomas est en voie de professionnalisation, elle attire de plus en plus les collectionneurs locaux et étrangers, et ses activités artistiques bénéficient d’une renomée croissante.

La peinture est devenue une véritable passion pour Craig Thomas. Aujourd’hui, il désire même élargir son champ d’action pour se consacrer au développement de la peinture vietnamienne. «Je me sens Vietnamien. Chaque fois que je rentre dans ma famille aux États-Unis, j’ai l’impression de n’être qu’en voyage. Quand j’y reste trop longtemps, le Vietnam me manque, et j’ai envie d’y retourner. Ici, j’ai mes amis, mes confrères et ma galerie, même si elle ne marche pas encore comme je le voudrais,» a ajouté Craig Thomas.

Diêu An/CVN

 

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