D'ores et déjà, la chancelière allemande Angela Merkel, sous pression d'une opinion très inquiète, a annoncé le 14 mars un moratoire de trois mois sur l'allongement de la durée de vie des réacteurs nucléaires du pays, élément majeur du programme de sa coalition conservateurs-libéraux.
Le parlement avait décidé à l'automne d'allonger de 12 ans en moyenne la durée de vie des 17 réacteurs nucléaires du pays, alors qu'ils auraient dû s'arrêter vers 2020.
La Suisse a annoncé de son côté la suspension de ses projets de renouvellement de centrales nucléaires, en l'attente d'éventuelles "normes (de sécurité) plus strictes".
"Ce qui se passe au Japon est manifestement un accident nucléaire très grave (...) et le risque de grande catastrophe ne peut être écarté", a estimé le 14 mars la ministre française de l'Environnement, Nathalie Kosciusko-Morizet, lors d'une réunion avec ses homologues de l'Union européenne (UE) à Bruxelles.
Le Japon a officiellement demandé l'aide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et des États-Unis.Mme Kosciusko-Morizet a dans le même temps refusé de "tomber dans l'emballement", faisant valoir que l'accident au Japon était le résultat d'une situation extrême, avec un énorme tremblement de terre, doublé d'un tsunami gigantesque.
Malgré tout, le ministre autrichien de l'Environnement, Nikolaus Berlakovitch, dont le pays a rejeté l'atome en 1978, a réclamé des "tests de résistance pour les centrales nucléaires" de toute l'Europe, qui compte au total 153 réacteurs.
"Sont-elles résistantes aux tremblements de terre ? Comment fonctionnent leurs systèmes de refroidissement des réacteurs ?", s'est-il inquiété.
"Nous comprenons les angoisses et nous (les ministres européens) devrons tirer toutes les conséquences de cet accident, notamment déterminer si l'énergie nucléaire est ou n'est pas une énergie maîtrisable", a souligné de son côté Nathalie Kosciusko-Morizet.
La France compte le parc nucléaire le plus important de l'UE avec 19 centrales et 58 réacteurs.
L'énergie de l'atome, du fait de ses faibles émissions en CO2, semblait jusqu'à récemment avoir le vent en poupe en Europe en raison du réchauffement climatique, de l'envolée des prix des hydrocarbures et de la raréfaction attendue du pétrole. Mais avec la situation au Japon, le vent du côté des opinions risque de tourner.
"La catastrophe au Japon suscite beaucoup d'inquiétude en Italie", a souligné à Bruxelles la ministre italienne Stefania Prestigiacomo. L'Italie a abandonné le nucléaire en 1987. Or elle "veut entrer dans le système nucléaire européen", a précisé Mme Prestigiacomo.
Son homologue polonais Janusz Zaleski a abondé dans ce sens. "La Pologne est en train de travailler à son projet nucléaire et les événements au Japon vont provoquer une discussion", a-t-il souligné.
La Commission européenne a convoqué pour hier à Bruxelles une réunion des ministres de l'Énergie de l'UE, des autorités nationales de sûreté nucléaire et des industriels du secteur pour tirer les premières leçons de la situation au Japon et envisager des mesures.
La Commissaire en charge du Climat, Connie Hedegaard, s'est toutefois montrée réaliste. "L'énergie nucléaire est une réalité et ce sera le cas pendant un certain temps", a-t-elle souligné.
AFP/VNA/CVN