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Parmi les 54 ethnies constituant le tissu culturel vietnamien, les Muong comptent près de 1,5 million de personnes, vivant principalement dans la province de Hoà Binh (Nord) et certaines localités montagneuses de Thanh Hoá (partie nord du Centre).
Le + thây Mo+ (chaman), grand connaisseur en rites et coutumes. |
Photo : VNA/CVN |
Ce groupe ethnique représente plus de 60% de la population de Hoà Binh. Il a sa propre langue, et c’est essentiellement par voie orale qu’est transmis de génération en génération son patrimoine culturel.
Pratique rituelle essentielle de la vie spirituelle des Muong, le rituel Mo Muong reflète leurs concepts relatifs aux êtres humains, à la nature et à l’univers. Ses vers et rimes sont utilisés dans 23 rituels de cette minorité. La pratique est classée en trois catégories : Mo Nghi lê (Cérémonie), Mo Kê chuyên (Narration) et Mo Nhom (Description). En particulier, l'expression particulière et complète de la valeur fondamentale et intrinsèque du Mo Muong est le rite Mo Tang lê (Funérailles) avec des dizaines de milliers de vers récités pendant 12 jours et nuits. Cette tradition funéraire traditionnelle des Muong est considérée comme l’évènement le plus complet de cette ethnie. Les chercheurs estiment qu'il est nécessaire de trouver un moyen pour faire vivre ce rite et le perpétuer dans la vie des Muong.
Mo tang lê, l’épopée la plus complète des Muong
D'après le chercheur Dang Hoành Loan, ancien directeur adjoint de l'Institut de musique, le Mo Muong est l’une des trois plus importantes activités religieuses des Muong. La cérémonie du Mo se déroule au sein de la communauté, dans chaque famille, en suivant un certain rituel.
Le Mo Tang lê nous fournit le concept le plus complet de cette ethnie sur la relation entre les gens et le monde : Muong Troi (Ciel), Muong Ðât (Terre) et Muong Nuoc (Eau).
Selon les experts, le maître de la cérémonie est le thây Mo (chaman), grand connaisseur en rites et coutumes, qui connaît par cœur des milliers de vers Mo. Dans la société Muong, le thây Mo est un expert du folklore et une personne réputée dans toute la communauté.
Les vers et rimes sont divisés en roóng Mo ou cát Mo (connus dans la littérature sous le nom de chapitres et épisodes). Chacun a son propre thème et ils sont récités dans une série de rituels des funérailles.
Spectacle de gongs Muong, l'une des activités du rituel +Mo Muong+. |
Photo : QDND/CVN |
Actuellement, de nombreuses récitations de Mo sont conservées, et il en existe trois principales publiées à grande échelle. Selon le collectionneur Bùi Thiên, il faut 23 jours consécutifs pour réciter 115 chapitres Mo et plus de 44.000 vers Mo.
L'ouvrage en trois volumes Mo Muong du chercheur Bùi Van Noi liste plus de 22.000 vers Mo. Le livre Mo Muong Hoà Binh, publié en 2010 par le Comité populaire de la province de Hoà Binh, en dénombre 22.500.
L'"Artisan Émérite" Bùi Huy Vong a confié que personne ne savait exactement quand la pratique rituelle du Mo Muong et le Mo étaient nés. Le Mo Muong est associé à de nombreux rituels et croyances, véhiculant l'esprit de solidarité, de la famille, de la communauté et de la nation, contribuant à la protection et au raffinement de la culture Muong durant toutes les périodes historiques.
Valeurs matérielles et immatérielles
De plus, le Mo Muong contient des valeurs matérielles précieuses. Certains objets liés à cette pratique tels que la "poche" de Monsieur Mo Muong, ou des antiquités (haches de pierre, de bronze, morceaux de tambours de bronze, de lave, d’os et crocs d'animaux féroces) sont transmis de génération en génération. Par ailleurs, les objets de culte représentent une grande valeur culturelle et spirituelle dans la culture Muong.
Actuellement, l'héritage culturel du Mo Muong fait face à de nombreux défis, notamment sur le plan culturel. Sa préservation et sa transmission se font essentiellement oralement. Les artisans (Monsieur Mo, thây Mo, Monsieur Tluong) qui détiennent les connaissances du Mo, ayant une riche expérience et une grande maîtrise de son exécution, sont âgés, et les jeunes qui souhaitent reprendre le flambeau sont peu nombreux.
Bùi Thi Niêm, directrice du Service de la culture, des sports et du tourisme de la province de Hoà Binh, a souligné qu'actuellement, l’ethnie Muong organisait toujours le Mo pour les défunts. Cependant, le nombre de chapitres Mo est réduit au minimum.
"Nous devons trouver un moyen de faire revivre le +Mo tang lê+, en faisant en sorte que ce rituel se perpétue. Conserver ce rite permettrait aussi de garder l’art du chant de +Mo Muong+. Nous aurons alors une base solide pour montrer les valeurs littéraires, les pratiques sociales et les arts du spectacle de l’ethnie Muong afin de constituer un dossier +Mo Muong+ à soumettre à l’UNESCO pour sa reconnaissance en tant que +patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente+", a affirmé le chercheur Dang Hoành Loan.
Quê Anh/CVN