La lycéenne Nguyên Thi Hiên transportant du bois ramassé en forêt pour le vendre au marché. |
Originaire de la commune de Kim Thành, district de Yên Thành, province de Nghê An, Nguyên Thi Hiên est de la 4e génération d’une famille misérable dont la mendicité était l’unique moyen de joindre les deux bouts. Une vie humiliante dont elle s’est péniblement défaite grâce à l’école.
Il y a dix ans, la frêle fillette - elle ne pesait que 32 kg - ramassait tous les jours du bois en forêt pour le revendre 5.000 dôngs le fagot aux marchés de Gam et Rôc, allant parfois jusqu’à mendier avec sa mère les jours difficiles. Ses maigres économies suffisaient à peine à l’aider à soigner ses parents malades. Son enfance a aussi été marquée par une épidémie de choléra qui a décimé de nombreux villageois pauvres de Dông Luôc.
S’émanciper en tant que femme autonome
Travailleuse assidue, elle n’hésitait pas à braver tous les jours, jusqu’à l’usure, soleil et pluies pour ramasser du bois de chauffage même si elle n’en tirait guère de profits et que sa famille continuaient de croupir dans la misère.
Voulant à tout prix gagner sa vie autrement, trouver un emploi moins rude, plus gratifiant et plus intéressant aussi, elle sollicite six sào (1 sào = 360 m²) de rizières auprès de Truong Ngoc Long, chef du village de Dông Luôc, commune de Kim Thành. «Je vous emprunte les plants et les engrais. Je cultive le riz dans vos champs. Une fois récolté, je vous paie la quantité que vous souhaitez», insiste-t-elle auprès du notable qui finira par accepter après avoir refusé la proposition. Et voilà la jeune fille fièrement surnommée «fille dorée» par les villageois de Dông Luôc dans la peau d’une agricultrice.
«À la rentrée scolaire, devant la classe, j’ai vu une fillette maigre avec un visage barbouillé portant des vêtements en lambeaux. Émue par sa situation, j’ai persuadé ses parents de la scolariser», se souvient Bùi Thi Hà, son institutrice de première année à l’école primaire (équivalent du CE1 dans le système français).
Elle reçoit une récompense du journal Tuôi Tre (Jeunesse) pour ses bons résultats scolaires. |
Durant les trois années passées au lycée, elle se distingue dans son école et dans tout le district en remportant à trois reprises le prix d’encouragement de biologie de Yên Thành. En 2005, lors du concours d’entrée à l’université, elle obtient une excellente note qui lui permet de s’inscrire à la Fac de médecine de Thai Nguyên et de faire un pas de géant vers son rêve.
Enfin, le bout du tunnel
En 2011, son parcours universitaire est sanctionné par un diplôme de licence avec la mention assez bien et d’un statut de jeune membre du Parti communiste vietnamien.
Non satisfaite par ses résultats, elle se présente au concours des médecins permanents de la Faculté de Hanoi mais échoue à cause de seulement 0,5 point. Elle sollicite alors un emploi à la Polyclinique de Cua Dông, dans la ville de Vinh, province de Nghê An, où Nguyên Xuân Kiên, président du conseil d’administration de l’hôpital, lui signe un contrat à durée indéterminée qu’elle refuse finalement pour se rendre à Hô Chi Minh-Ville.
Nguyên Thi Hiên (en blouse blanche) au chevet de personnes âgées de Dông Luôc. |
Photo : TT/CVN |
Ses premiers pas dans la tumultueuse mégalopole furent tout sauf facile. Elle se trompait toujours de rue et ne quittait jamais son vieux plan de la ville. Finalement, elle ne tarde pas à prendre ses repères, partageant son temps entre des heures supplémentaires dans un hôpital privé et une formation en autodidacte. Fin 2011, elle suit une formation d’ophtalmologie à la Faculté de médecine de Pham Ngoc Thach avant de participer en mars 2013 au concours d’entrée de la Faculté de médecine de Hô Chi Minh-Ville pour obtenir une agrégation conduisant deux années plus tard au doctorat.
N’oubliant pas d’où elle vient, elle consacre souvent ses week-ends à des activités philanthropiques à Cu Chi, district suburbain de Hô Chi Minh-Ville, et dans les localités voisines : Huê (Thua Thiên-Huê, Centre), Binh Thuân (Centre) et An Giang (delta du Mékong).
«Je n’ai même pas de temps pour le shopping. Mes temps libres me suffisent à peine à faire mes courses», confie-t-elle.
De temps à autre, elle retourne dans sa province natale (Nghê An) pour s’occuper des personnes âgées de Dông Luôc et leur offrir des médicaments.
Quê Anh/CVN