>>L'Italie menace l'Europe d'un "plan B" si elle n'est pas aidée
>>Des migrants entre gendarmes français et policiers italiens
Les États membres ont levé le 18 juin tous les obstacles au lancement formel de l'opération, prévu le 22 juin à l'occasion d'une réunion des 28 chefs de la diplomatie à Luxembourg.
Le plan opérationnel de cette mission baptisée "EU Navfor Med" et dirigée par un amiral italien a été adopté. Les contributions en navires, dont des frégates et peut-être des sous-marins, en hélicoptères, avions patrouilleurs et drones sont suffisantes, et la mission pourra commencer à se déployer "une semaine après la décision", a expliqué un responsable européen.
Des militaires se tiennent sur le pont d'un navire de la Marine belge, le 18 juin au large de la Sicile, dans le cadre de l'opération Triton. |
L'UE a promis d'agir fin avril après une nouvelle tragédie en Méditerranée dans laquelle 800 migrants sont morts noyés au large de la Libye lorsque leur chalutier a chaviré.
EU Navfor Med est censée s'attaquer aux bateaux utilisés par les trafiquants qui exploitent la détresse des migrants en les envoyant en haute mer au péril de leur vie.
Mais en l'absence d'un feu vert du Conseil de sécurité des Nations unies à l'usage de la force dans les eaux libyennes, l'opération sera limitée à ce stade à une surveillance à distance des côtes, d'où partent la grande majorité des migrants qui tentent de gagner l'Italie. L'objectif est d'améliorer la collecte et le partage de renseignements sur les réseaux de passeurs.
"Les navires, avions et drones seront déployés dans le sud de la Méditerranée pour collecter du renseignement et préparer les phases futures", a expliqué le responsable européen le 18 juin.
"Mais on a vocation à aller plus loin", a assuré un diplomate, tandis qu'un second a décrit "une première phase" destinée à "préparer une montée en puissance".
D'autres sources soulignent qu'en l'absence d'un mandat clair du Conseil de sécurité, qui demande lui-même un consentement préalable des autorités libyennes, l'opération est à ce stade "coincée" et réduite à patrouiller loin des côtes, avec une efficacité limitée.
Pas une opération humanitaire
"Nous sommes plutôt optimistes qu'in fine, il y aura une résolution du Conseil de sécurité" permettant d'arraisonner les navires suspects, de couler les embarcations des passeurs voire de bombarder leurs caches sur la côte, a affirmé le responsable européen.
L'UE entendait notamment s'attaquer aux puissants bateaux-mères utilisés par les trafiquants pour tracter en haute mer les radeaux de fortune surchargés de migrants, ensuite laissés à la dérive par les passeurs, qui délèguent ainsi aux garde-côtés italiens la tâche de les secourir et de les amener sur les rivages européens.
La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, espère que les négociations actuelles entre factions rivales en Libye aboutiront rapidement à la formation d'un gouvernement d'unité nationale, qui pourrait ensuite unanimement présenter sa requête à l'ONU. De nouveaux pourparlers sont prévus les 21 et 22 juin à Skhirat, au Maroc, a assuré le responsable européen. "Il n'y a pas de certitude absolue, mais de bonnes perspectives", selon lui.
En attendant, les responsables européens reconnaissent que la présence accrue de bâtiments militaires en Méditerranée, qui ont l'obligation de secourir toute embarcation en difficulté, risque de créer un appel d'air "dans les premières semaines"
Les capitales s'inquiètent de voir donc affluer encore plus de migrants prêts à tout pour gagner l'Europe, sur des embarcations toujours plus précaires depuis les côtes libyennes. Elles se sont donc assurées que les personnes repêchées pourront être déposées en Italie. "L'objectif très clair, c'est que ce n'est pas une opération humanitaire pour secourir des migrants, mais pour lutter contre les passeurs", a insisté la source diplomatique.
Les Européens ont aussi triplé les moyens des missions maritimes de sauvetage italienne et grecque, Triton et Poséidon, mais ils se déchirent sur l'accueil de 40.000 demandeurs d'asile, alors que Bruxelles les pousse à mieux les répartir au sein des 28. La Commission européenne aimerait aussi faire venir 20.000 réfugiés syriens de pays tiers, pour éviter qu'ils ne choisissent la périlleuse voie maritime.
AFP/VNA/CVN