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"La présente mise en accusation (du chef de l'État) ne repose sur aucun fondement juridique", indique la Haute cour constitutionnelle dans son jugement mis en ligne le 13 juin : "La demande est rejetée comme non fondée". La décision de la Haute cour constitutionnelle est ridicule", a déclaré dans une toute première réaction à chaud Pierre Houlder, le porte-parole du MAPAR, le parti de l'ex-homme fort du pays Andry Rajoelina, majoritaire à l'Assemblée, qui avait voté la destitution le 26 mai.
"Je demande à tous de respecter l'État de droit", a réagi le président en fin de journée, dans une allocution télévisée : "Je ne tolèrerais pas un autre atteinte à cet État de droit". "Chacun a pu tirer des leçons de cette situation qui vient de se terminer. J'ai compris beaucoup de choses pour corriger (ce qui) devrait être corrigé, pour trouver toutes les solutions en réponse aux aspirations du peuple qui m'a fait confiance", a-t-il poursuivi, dans une allusion aux critiques violentes sur sa gestion.
Hery Rajaonarimampianina, président de Madagascar, le 24 mai 2014 à Pretoria, en Afrique du Sud. |
"Je lance un appel à tout le peuple sans exception, y compris ceux qui font partie de l'opposition, pour préserver l'intérêt supérieur de la nation, se donner la main pour développer notre patrie à tous, dialoguer, collaborer et consolider la solidarité nationale", a-t-il déclaré.
La suite des événements, a expliqué le président du parti de Hery Rajaonarimampianina (HVM), Rivo Rakotovao, "dépend maintenant du comportement des députés. La dissolution de l'Assemblée nationale n'est pas une obligation mais si les députés persistent à faire barrage au développement, alors il appartient au président de la République de prendre la décision finale".
Réponse d'Augustin Andriamananoro, vice-président du MAPAR : "La solution du problème de Madagascar maintenant est de demander l'avis du peuple par une élection présidentielle anticipée".
"Le peuple va se lever"
En fait, le chef de l'État affronte deux adversaires politiques en même temps, ses deux prédécesseurs, qui n'ont pas digéré d'avoir été exclus de la dernière élection présidentielle de 2013, sous la pression de la communauté internationale. Le Premier est Marc Ravalomanana, démocratiquement élu puis renversé en 2009 par un coup d'État du second, Andry Rajoelina, resté au pouvoir jusqu'en 2013 sans jamais avoir été élu.
Un policier contrôle la circulation devant la Haute cour constitutionnelle de Madagascar, le 10 juin à Antananarivo. |
Marc Ravalomanana vient tout juste d'être libéré de son assignation à résidence, où il avait été placé à son retour d'exil en octobre 2014, pour être revenu au pays sans autorisation et avoir mis en cause la légitimité du chef de l'État. Ses députés ont voté la destitution de M. Rajaonarimampianina. Les élus fidèles à M. Rajoelina, majoritaires au parlement, ont également voté la destitution.
M. Rajoelina avait pourtant soutenu M. Rajaonarimampianina à la présidentielle, pensant probablement en faire son homme de paille. Mais le président a vite pris ses distances, refusant notamment de nommer le Premier ministre désigné par M. Rajoelina. Face à l'offensive de l'opposition, le pouvoir n'est pas resté inerte. Mardi, le gouvernement a fait couper huit des quinze émetteurs relais de la radio et télévision d'Andry Rajoelina, VIVA, pour "violation des textes en vigueur".
VIVA réplique depuis en diffusant en boucle un spot affirmant: "Stop, cela suffit, le peuple va parler, le peuple va se lever !". L'enjeu de la bataille est important. Les donateurs internationaux, qui avaient fui en 2009, commencent tout juste à revenir, et l'économie sinistrée par les années de crise reprend quelques couleurs.
Une nouvelle période d'instabilité pourrait mettre à mal ce fragile sursaut, dans ce pays où plus de 90% de la population survit avec moins de deux dollars par jour, et qui occupe la quatrième place mondiale en terme de malnutrition chronique.
La communauté internationale, qui s'est beaucoup investie pour régler la crise politique et pour organiser les élections de 2013, redoute ouvertement cette situation tendue : "Il faut avouer que la stabilité politique est un contributeur au développement, et c'est surtout ça qui nous inquiète pour l'avenir", a déclaré le 12 juin la représentante de la Banque mondiale à Madagascar, Coralie Gevers.