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Le chè lam, l’une des spécialités qu’offre la province de Bac Ninh (Nord). |
Photo : CTV/CVN |
Dans l’ancien Vietnam, la popularité d’un aliment se mesurait à sa fréquence dans le trésor des locutions, proverbes et chansons populaires. À ce sujet, le bonbon (keo) est en position d’infériorité. Il semble que les adultes n’aient pas l’habitude de sucer les bonbons, réservés plutôt aux enfants. En général, les variétés de bonbons sont susceptibles de satisfaire le goût populaire et pas celui des couches supérieures.
Néanmoins, la canne à sucre originaire du Bengale s’est très tôt introduite au Vietnam et dans le Sud de la Chine (au nord du Yang-tseu-kiang), dont le climat assez chaud permettait sa culture. Sous la domination chinoise des Ngô (IIIe siècle après J.-C.), les Vietnamiens durent leur offrir du sucre comme tribut. Au XVIIe siècle, les bateaux hollandais achetèrent du sucre à Hôi An (Centre). En 1795, les seigneurs Nguyên du Sud prêtèrent de l’argent aux habitants pour la fabrication du vesou destiné au troc contre des armes originaires des pays occidentaux.
Une quinzaine de bonbons
Avec le sucre, les Vietnamiens fabriquaient surtout des gâteaux, des potages doux (chè) pour le dessert, des fruits confits (mut)... La liste des bonbons, peu abondante, se limitait à une quinzaine. Certaines spécialités font encore la réputation d’une région. La ville royale de Huê détient la palme nationale avec une sorte de nougat au sésame appelé mè xung. De nombreuses localités du Nord (Hung Yên) et du Centre (Thanh Hoa...) produisent le chè lam, gros bonbon gluant (cuit à petit feu dans du vesou et aromatisé avec du gingembre). Les confiseurs ambulants de Hanoï fabriquaient des bonbons de sucre soufflé ayant la forme d’oiseaux ou d’autres animaux (appelés keo gà, littéralement bonbons de coq), ainsi que des sucres d’orge à la surface identique à la peau d’une poule plumée (keo da gà). Ils séduisaient également les enfants par une sorte de sucre d’orge qui pouvait s’étirer et qui de ce fait portait le nom de keo kéo (bonbon étiré).
Fabrication de bonbons à l’occasion du Têt traditionnel. |
Photo : CTV/CVN |
De petits vendeurs circulaient dans les rues pour vendre des keo bôt (bonbons à la farine de riz) et des keo vung (bonbons à la farine de riz au sésame), dans d’anciennes boîtes de biscuits en fer blanc.
Sur les marchés ruraux, les bonbons ronds (keo bi = bonbons en forme de bille, keo ca, keo dan = bonbons en forme d’aubergine, de balle) faisaient les délices des bambins.
Un métier transmis de père en fils
Le bonbon de riz germé (keo mach nha ou keo ma) est populaire en ville comme à la campagne. Il s’agit d’une sorte de maltose obtenu par l’arrêt brusque de la germination du riz gluant suivi de la cuisson et du filtrage. Les vendeuses ambulantes l’échangeaient volontiers contre les longs cheveux des femmes enlevés par le peigne. Ils servaient à rembourrer le turban des femmes peu chevelues ou fabriquer de fausses «queues de coq» (đuôi gà), sorte de mèche de longs cheveux que les femmes laissaient dépasser de leur turban et qui constituait leur suprême élégance.
Le village d’An Phú, près de Hanoï, possède depuis 300 ans le secret de la fabrication d’un fameux bonbon de riz germé. Les familles ne le transmettent qu’aux fils et non aux filles, de peur que celles-ci se marient avec des hommes originaires d’autres villages.
Certains bonbons étaient considérés comme un luxe pour le Têt ou les grandes occasions, par exemple les dragées ovales composées de graines d’arachide enveloppées de farine sucrés (keo trung chim), les nougats aux arachides (keo lac) dont la variété keo sìu Trìu Châu a fait la réputation de Nam Dinh depuis près d’un siècle et demi.
(Mai 1998)