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Michel Temer prête serment devant les députés brésiliens, à Brasilia, le 31 août. Photo : AFP/VNA/CVN |
Il lui faut relancer une économie en récession tout en ménageant la base hétérogène de partis ayant permis son ascension. En coulisses, l'ombre du méga-scandale de corruption du géant public pétrolier Petrobras continuera de peser.
Une économie déprimée
M. Temer, ancien vice-président de la dirigeante de gauche, a promis mercredi 31 août "de remettre le pays sur les rails".
Mais dans ce pays de 206 millions d'habitants plongé dans la pire récession des 80 dernières années, avec 12 millions de chômeurs, la partie n'est pas gagnée.
Des analystes interrogés par l'AFP s'accordent à dire que le plus grand défi à relever est de passer d'une économie reposant sur une large intervention de l'État à un modèle plus libéral incluant privatisations et sévère ajustement budgétaire.
M. Temer a déjà annoncé vouloir freiner les dépenses, flexibiliser le marché du travail et réduire le coût des retraites.
"L'impeachment de Rousseff retire un élément d'incertitude politique qui a pesé sur l'économie, mais Michel Temer fait face à des défis importants dans l'instauration des réformes nécessaires, comme celle de la prévoyance sociale, qui exigeront un consensus politique loin d'être assuré", a prévenu le 1er septembre l'agence américaine Moody's Investors Service.
"La priorité est de réorganiser les comptes publics", affirme quant à lui Harold Thau, analyste chez Técnica Consulting.
"Il n'y a plus les conditions pour continuer à dépenser plus que ce que l'on perçoit ou d'augmenter les impôts", souligne-t-il.
Des partis fragmentés
À 75 ans, M. Temer est une pièce permanente de l'échiquier du pouvoir brésilien. Mais la popularité de l'homme fort du PMDB (centre droit) est au plus bas (14%) et il est arrivé au pouvoir sans la légitimité des urnes.
Manifestation en faveur de l'ancienne présidente Dilma Rousseff, à Sao Paulo, le 1er septembre. |
Il a construit son gouvernement sur une équipe économique prestigieuse et sur le "centrao", le grand centre : majoritaire au Parlement, c'est un groupe conservateur sur le plan politique et libéral en matière d'économie.
"Il est évident que Mme Rousseff a été destituée en grande partie par son inaptitude à établir des liens avec le Parlement. M. Temer devra obtenir des majorités fortes et faire des concessions pour y arriver", estime Sylvio Costa, du site "Congresso em Foco", spécialisé dans l'activité parlementaire.
La fragmentation des partis fragilisait déjà Mme Rousseff, qui devait convaincre 14 partis pour faire approuver par majorité simple un projet au Parlement.
"M. Temer prend ses fonctions après un procès qui laisse des séquelles et il devra s'entendre avec le Parlement et les secteurs économiques. Mais il devra aussi comprendre une société qui a démontré une grande insatisfaction envers les hommes politiques", a-t-il souligné.
Le vote des sénateurs, qui ont créé la surprise en ne retirant pas ses droits civiques à Dilma Rousseff - ce qui lui permet d'exercer une fonction publique et d'être candidate à des élections -, a mis en évidence les divergences dans la coalition de M. Temer.
Pour le sénateur social-démocrate Aecio Neves (PSDB, droite), cette décision y a "provoqué un énorme malaise".