Le chant des amateurs adoucit les mœurs

Le dossier de candidature du don ca tài tu (chants des amateurs) doit être soumis le 31 mars à l'UNESCO pour la reconnaissance comme patrimoine culturel immatériel de l'humanité.

Le don ca tài tu évoque la région des vergers du Sud, berceau de cet art. Il s'agit d'un type de "musique de chambre" spécifique du Sud, comme le ca trù (chants des courtisanes) du Nord ou les chants de Huê au Centre. Tous ceux qui vivent dans le Sud ou fréquentent régulièrement cette région ont certainement eu au moins une fois l'occasion de contempler cet art original, notamment durant les nuits de pleine lune bercées par un vent frais.

Selon le professeur, musicologue Trân Van Khê, conseiller scientifique de haut rang sur l'élaboration du dossier sur les chants des amateurs, tài tu (amateur) désigne dans ce cas un chanteur talentueux qui ne chante non pas pour gagner sa vie, mais pour la passion qu'il voue à cet art. Devenir un chanteur de don ca tài tu digne de ce nom demande du temps et de l'entraînement. Si l'on souhaite tutoyer les sommets de cet art, il faut développer son propre style. Les chanteurs se réunissent souvent chez quelqu'un pour exprimer leur talent sans aucune contrainte.

"Une connotation universelle"

Le professeur Trân Van Khê affirme qu'aucun document datant précisément la naissance de cet art n'a pour l'heure été retrouvé. Selon des études, il est apparu entre la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle au moment où les musiciens et mandarins chargés de la musique de la dynastie des Nguyên ont migré vers le Sud, suivant le mouvement Cân Vuong. Sur le trajet, ils ont fait étape dans les provinces du littoral du Centre. Ce qui explique pour quoi le don ca tài tu tire son inspiration à la fois des chants de Huê et des airs du Centre. Le don ca tài est apparu plus tard que le tuông (théâtre classique avec chants et gestes), le chèo (théâtre populaire), le quan ho (chants alternés) ou le ca trù (chants des courtisanes). Ce qui ne l'empêche pas de réunir de nombreuses valeurs culturelles vietnamiennes imprégnées de l'identité nationale et en fait un candidat crédible pour figurer au patrimoine culturel immatériel de l'humanité.

"En se basant sur les critères de l'UNESCO pour reconnaître un patrimoine culturel immatériel de l'humanité, le +don ca tài tu+ en comporte suffisamment pour postuler", souligne Lê Thi Minh Ly, directrice adjointe du Département des patrimoines culturels (ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme). Parce que le don ca tài tu a une représentativité nette, il lie étroitement à la vie quotidienne des habitants de 21 villes et provinces du Sud à tellement on le compare le souffle de la musique traditionnelle du Sud. De plus, il est transmis de génération en génération dans un espace culturel typique : cela peut être une maison, une cour ou encore un jardin. Cet art reflète clairement l'identité de la communauté des Vietnamiens et constitue une fraction à part entière de la vie culturelle. Selon les statistiques, le pays compte 2.019 clubs de don ca tài tu, lesquels réunissent plus de 22.600 membres dans 21 villes et provinces du Sud. Sans compter les 2.850 instruments de musique différents pouvant être utilisés et les 120 documents et imprimés relatant les spécificités de cet art. La province de Bên Tre abrite à elle seule 230 groupes et clubs de don ca tài tu avec 1.772 membres. Selon Mme Ly : "Il s'agit-là du plus important critère dans la définition d'un patrimoine immatériel représentatif".

Cet art traditionnel s'est non seulement répandu chez les Kinh (l'ethnie majoritaire au Vietnam) mais aussi dans d'autres ethnies sœurs comme les Chams et les Khmers. "De plus, l'introduction d'instruments de musique comme le violon et la guitare lui confère une connotation universelle" conclut-elle.

Partageant l'analyse de la directrice adjointe du Département des patrimoines culturels, le professeur Trân Van Khê fournit une explication. Dès 1972, l'UNESCO a envoyé des experts pour enregistrer et prendre des photos de spectacles de don ca tài tu interprétés par le Professeur et musicien Vinh Bao à Paris. Un an après, l'UNESCO a sélectionné des extraits de don ca tài tu pour les sortir sous forme de disques estampillés "UNESCO" et les diffuser dans le monde. "Pour le moment, il faut mettre en place un programme national d'action pour préserver les chants des amateurs", fait remarquer ce musicologue.

Diêu An/CVN

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