L'Allemagne, même si elle dit juger le débat prématuré, l'a toutefois relancé lors de la semaine écoulée, par l'entremise de son secrétaire d'État aux Affaires étrangères. Il ne serait pas "infondé" qu'Axel Weber, président de la Bundesbank, prenne les rênes de la BCE, a déclaré Werner Hoyer, dans un entretien au quotidien français Les Echos.
Le patron de la "Buba" ne veut pas commenter le sujet, fait savoir son service de presse.
Jusqu'ici, la première économie européenne s'était contentée de suggérer ses ambitions.
L'Italie, elle, avait posé ses jalons dès septembre. Le chef de la diplomatie Franco Frattini avait vanté les qualités de Mario Draghi, président de la Banque centrale du pays, et souligné l'honneur que sa nomination représenterait pour la Péninsule.
La bataille s'annonce serrée, jugent des experts interrogés par l'AFP. Les 2 pays ont récemment renoncé à briguer des postes importants au niveau européen, et veulent à l'évidence concentrer leurs efforts sur la présidence de la BCE. "Les Français, comme d'habitude, seront la clef de tout", estime Carsten Brzeski, économiste à la banque ING. "Car celui qui mettra Paris de son côté rendra pour son adversaire la tâche de rassembler une forte majorité en sa faveur très difficile", souligne-t-il.
Le président de la BCE est nommé d'un commun accord entre les chefs d'État ou de gouvernement des États de la zone euro. Il est sans doute le responsable européen doté des plus grands pouvoirs.
L'institution agit en toute indépendance des pouvoirs politiques quand il s'agit de décider de la politique des taux d'intérêt, dont le niveau détermine celui du crédit dans la zone euro. Cette prérogative est scellée dans le Traité de Maastricht.
Aussi bien le Néerlandais Wim Duisenberg que Jean-Claude Trichet ont défendu cette indépendance, garante de la crédibilité auprès des marchés de la jeune institution, née il y a 11 ans.
Le choix du successeur devrait se baser avant tout sur "sa capacité à inspirer le même respect", estime Stefan Gerlach, professeur à l'Université de Francfort et expert des questions financières. MM. Weber et Draghi sont tous 2 "d'excellents candidats", juge-t-il.
L'Allemand souffre toutefois d'une réputation de jusqu'auboutiste en matière de lutte contre l'inflation. M. Draghi, également président du Conseil de stabilité financière (FSB) chargé de renforcer la régulation financière mondiale, est jugé plus apte au consensus.
Si la BCE est indépendante, le choix de ses responsables est éminemment politique et fonctionne selon les principes des "chaises tournantes", souligne l'économiste d'ING. C'est pourquoi la nomination du vice-président de la BCE, dont la procédure est entrée dans la dernière ligne droite, est déterminante.
Le mandat du Grec Lucas Papademos arrive à échéance fin mai. Deux candidats se détachent pour le remplacer, le gouverneur de la Banque centrale du Luxembourg Yves Mersch et son homologue portugais Vitor Constancio.
Selon la logique prônant une répartition la plus équitable possible entre le Nord et le Sud, le choix du Luxembourgeois par exemple amoindrirait les chances d'Axel Weber.
La nomination de Mario Draghi sera aussi intimement liée à la santé financière de son pays, estime Thorsten Polleit, de Barclays Capital. "Si l'Italie venait à rencontrer des problèmes similaires à ceux de la Grèce, il serait très difficile de lui confier le poste".
AFP/VNA/CVN