Journal en fête !

Pour moi, habitué des bords de Seine, le 21 juin c’était le jour du solstice d’été. Le premier des trois jours les plus longs de l’année, qui annonçaient les prochaines vacances scolaires et les grandes transhumances des congés payés. Mais depuis que je suis au Vietnam, le 21 juin a rendez-vous avec l’histoire…

Journée de la presse révolutionnaire ! Autant dire, la fête des journalistes de ce côté-ci du monde. Un coup de projecteur porté à tous ceux qui jour après jour s’attachent à informer, décrire, expliquer les grands et les petits moments de la vie de l’humanité. Et, croyez-moi, ils en ont du grain à moudre avec cette humanité qui passe son temps à bouger dans tous les sens. D’ailleurs, il suffit de voir le nombre de titres de journaux, quotidiens, hebdomadaires, mensuels, qui étalent impudiquement leurs pages en papier glacé ou non aux éventaires des marchands installés au coin des rues. Et parmi eux, bien sûr, celui que vous lisez en ce moment ! D’ailleurs, à l’occasion de cette journée, je vous invite à me suivre derrière les colonnes qui font la Une…

La presse n’attend pas.


Relations publiques !
Révolutionnées, mes habitudes l’ont été quand j’ai pris contact pour la première fois avec Le Courrier du Vietnam - le seul journal francophone du Vietnam. C’était à mon retour de ce long périple en moto, avec Tuân, entre Hanoi et Hô Chi Minh-Ville, il y a 5 ans déjà. À mon habitude, j’avais pris des notes de voyage dans mon carnet à couverture de moleskine. Non que je me prenne pour Hemingway, mais j’aime poser sur le papier les émotions trop fugaces pour être emprisonnées dans la mémoire.
D’ailleurs, Tuân et moi nous complétons admirablement : lui c’est les photos, moi les mots. Quand il s’arrête pour saisir dans l’objectif le souffle du vent dans les sapotilliers ou un clin d’œil du soleil sur une rizière endormie, j’ouvre mon carnet pour écrire le rire d’un enfant ou la chaleur d’une rencontre. Alors, vous pensez bien qu’après avoir bourlingué pendant 12 jours sur plus de 2.500 km, à travers le pays, mon carnet était plein à déborder ! Et comme j’avais envie de faire partager ce plein de sensations, j’avais eu l’idée de proposer au Courrier du Vietnam de faire équipe avec moi : j’écris, il publie ! Chacun son métier…
Après l’échange classique de courriels (Tiens, voilà quelque chose qui a révolutionné la presse !), pour se présenter, pour transmettre les premiers articles, j’avais été invité à rencontrer la rédaction du journal. Je m’attendais à pénétrer dans un hall insipide, où une hôtesse aux canons irréprochables m’aurait fait patienter avant d’être reçu par un rédacteur en chef forcément débordé. D’ailleurs pendant mon attente, en me salissant les doigts avec l’encre à peine sèche des derniers exemplaires du quotidien mis à disposition des visiteurs, j’aurais vu passer en trombe des journalistes se hâtant d’aller rédiger le scoop de l’année…
Car je ne sais pas si vous l’aviez noté, mais jamais le mot «presse» n’a si bien été trouvé que pour cette profession. Les linguistes puristes me diront que presse vient de la presse qui sert à imprimer le journal. Mais moi, je pense que par osmose avec son homonyme, presse, qui signifie : courir, se hâter, et qui a donné le mot «se presser», les journalistes sacrifient autant à cette presse là qu’à l’autre, au risque parfois d’informer plus vite que la réalité ! Et bien, moi aussi, dans ma précipitation prédictive, je m’étais trompé...

Le journal en ligne du Courrier du Vietnam.


Des mots et des formes…

L’accueil fût on ne peut plus sympathique et amical. À peine l’ascenseur m’avait-il projeté au 5e étage d’un immeuble qui abrite nombre de journaux que je me trouvais sur un palier, où deux portes me faisaient signe avec leur panonceau : Le Courrier du Vietnam. Poussant celle de droite, j’entrais dans une ruche, où des abeilles aux longues chevelures brunes s’activaient devant des ordinateurs. Car une des particularités de ce journal, c’est que l’équipe qui travaille à la rédaction et la mise en forme des articles est essentiellement féminine !
Les rares spécimens de la gent masculine que je peux rencontrer sont, hormis un ou deux journalistes, les correcteurs français qui torturent les phrases et les mots pour qu’ils respectent à minima les règles de la syntaxe grammaticale… Le jour de mon arrivée, ce n’est pas un, mais une vingtaine de sourires qui m’ont accueilli, et toutes les autres fois que je suis retourné au journal depuis. On m’a offert le thé, proposé des fruits, entouré de sollicitude, comme si j’étais un ami de longue date. Je faisais déjà partie de la famille…
Depuis, j’ai eu maintes fois l’occasion de travailler aux côtés de cette équipe. Avec étonnement parfois, comme la première fois, où face à mon écran, je tentais de donner forme à des articles fâchés avec la langue de Molière, quand, après un repas sommaire pris sur le pouce, j’ai vu sortir des armoires des nattes, vite disposées sur le sol pour une sieste collective ! Avec amusement quand, gourmandise oblige, nous partageons des gâteaux au taux de sucre à faire pâlir un endocrinologue dans une joyeuse atmosphère d’écoliers ! Avec émotion, quand les courbes d’une collègue annonce une maternité prochaine, et comme nous sommes au Vietnam, les modifications morphologiques sont fréquentes ! Avec souffrance enfin, car j’ai découvert depuis que la presse, c’est aussi être pressé comme un citron pour que ma chronique soit écrite à temps, parce que je fais partie d’une chaîne, de l’idée au lecteur, et qu’il faut que le journal soit dans le kiosque au jour dit !
Quand je pense que le 21 juin a été choisi ailleurs pour fêter… la lenteur ! Allez, je vous laisse, car je suis pressé : il faut que j’aille acheter un énorme bouquet de fleurs à offrir à mes charmantes consœurs pour fêter ce 21 juin… Bonne fête aux journalistes du Vietnam !

Gérard BONNAFONT/CVN

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