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Un manifestant devant une voiture incendiée lors des manifestations devant le Parlement argentin, à Buenos Aires, mercredi 12 juin. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Pour les Argentins qui souffrent, qui attendent, qui ne veulent pas voir leurs enfants quitter le pays (...), mon vote est affirmatif", a déclaré Victoria Villarruel, la présidente du Sénat et également vice-présidente du pays, dont le vote a été déterminant, le parti de Javier Milei ne comptant que sept parlementaires sur 72 au Sénat.
Le texte, encore en discussion au Sénat, doit être approuvé définitivement jeudi matin par la chambre haute après quelques modifications à la marge. Il retournera ensuite entre les mains de la Chambre des députés qui se prononcera sur son adoption définitive.
En parallèle des discussions au Sénat le 12 juin, des affrontements entre forces de l'ordre et manifestants anti-Milei ont éclaté à Buenos Aires. "Nous ne pouvons pas croire qu'en Argentine, nous discutons d'une loi qui nous ramènera 100 ans en arrière", a résumé, parmi les manifestants, Fabio Nunez, un avocat de 55 ans.
Les violences ont débuté lorsque les manifestants ont tenté de déborder le cordon de sécurité mis en place autour de la Chambre des députés.
Sept personnes, dont cinq députés d'opposition, ont été soignées à l'hôpital, selon le ministère de la Santé, après avoir été aspergées de gaz lacrymogènes, tandis que des dizaines de personnes ont été prises en charge sur place après avoir inhalé les fumées.
Des voitures ont été incendiées et la police a riposté à des jets de projectiles par des tirs tendus de balles en caoutchouc et des lances à eau.
Au moins dix personnes ont été arrêtées et neuf policiers ont été blessés, a indiqué à l'AFP un porte-parole du ministère de la Sécurité. À la tombée de la nuit, les forces de l'ordre finissaient de reprendre le contrôle des rues.
La présidence argentine a dénoncé "les groupes terroristes qui, à l'aide de bâtons, de pierres et même de grenades, ont tenté de perpétrer un coup d'État".
"100 ans en arrière"
Les sénateurs débattaient depuis mercredi matin 12 juin de la nouvelle version de la loi phare du gouvernement Milei dite "omnibus", rejetée dans sa forme originale de 600 articles, et adoptée avec des changements majeurs en 238 articles par la Chambre des députés en avril.
Des policiers lors d’affrontements avec des manifestants devant le parlement argentin, à Buenos Aires le 12 juin 2024. |
Photo : AP/VNA/CVN |
Parmi les concessions d'un exécutif devenu plus pragmatique au fil des mois : le nombre des privatisations, passées d'une quarantaine dans la version initiale à moins de 10 dont celle toujours sur la table de la compagnie aérienne publique Aerolineas Argentinas.
Le projet de flexibilisation du marché du travail a aussi été débattu par les sénateurs. Et une réforme fiscale, initialement partie de la loi omnibus, a été dissociée pour être discutée à part, dans la même session.
Le sénateur d'opposition Mariano Recalde a estimé que ce projet de loi, les réformes du travail en particulier, "nous ramènent au siècle dernier lorsque l'employé n'avait aucun droit".
La loi est "un accélérateur, un catalyseur du redressement de la situation économique", a pour sa part plaidé le ministre de l'Économie Luis Caputo mercredi 12 juin, exhortant le Parlement à l'approuver.
Mais, se prémunissant contre un éventuel rejet, il a affirmé que le vote ou non de la loi "ne changera rien au fait que ce pays va se redresser quand même, car ce gouvernement ne changera pas de cap. L'ordre macroéconomique se poursuivra".
Car au-delà des tribulations législatives, la "thérapie choc" d'austérité promise -le "plus grand ajustement budgétaire de l'histoire de l'humanité" comme M. Milei aime à le répéter- produit déjà des effets depuis décembre : dévaluation brutale du peso (54%), prix et loyers libérés, fin des subventions aux transports, à l'énergie, gel des chantiers publics, coupes budgétaires tous azimuts, etc.
Pas de victoire parlementaire
Le président claironne régulièrement que l'inflation est "dominée", avec une décélération continue depuis cinq mois : de 25% mensuels à 8,8% en avril. Et un budget à l'excédent au premier trimestre sans précédent depuis 16 ans.
Un manifestant tente de frapper des policiers avec un bâton lors des manifestations devant le parlement argentin, à Buenos Aires le 12 juin 2024. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
En contrepartie, l'austérité étrangle la consommation, l'activité économique s'effondre, et la récession s'installe, avec une contraction de 5,3% de l'économie au premier trimestre. Sans signe imminent de rebond.
Et surtout "depuis le FMI jusqu'aux investisseurs étrangers, de nombreux acteurs affirment que, pour que la proposition (Milei) soit crédible, il faut des lois passées au Parlement, des accords, un État plus ou moins fonctionnel", estime Ivan Schuliaquer, politologue à l'Université de San Martin.
Mais six mois après son accession à la présidence, Javier Milei n'a pas encore fait approuver la moindre réforme au Parlement, victime d'une arithmétique contraire : son petit parti, la Libertad Avanza, n'est que la 3e force à la Chambre des députés, et il est aussi minoritaire au Sénat.
Outre le renvoi forcé en commissions de la loi "omnibus", le Sénat a en mars rejeté le "décret de nécessité et d'urgence", méga-décret publié au début de sa présidence et à ce jour partiellement en vigueur.
AFP/VNA/CVN