Égypte : 36 détenus islamistes tués dans une tentative d'évasion

Trente-six détenus islamistes ont été tués le 18 août par la police dans une tentative d'évasion selon les autorités égyptiennes, les partisans du président déposé par l'armée Mohamed Morsi annulant des manifestations au Caire par "sécurité" après près de 800 morts en cinq jours.

Des soldats et des policiers sont postés devant la mosquée Al-Fath, le 17 août au Caire.

Cette décision intervient alors que le chef de la toute-puissante armée, le général Abdel Fattah al-Sissi, a assuré que son pays ne "plierait" pas face à la violence des islamistes, leur promettant une riposte "des plus énergiques", devant des centaines d'officiers de l'armée et de la police.

Toutefois, dans ce qui apparaît être un geste d'apaisement, le gouvernement a interdit les "comités populaires", ces milices de jeunes armés prenant pour cible au Caire tous ceux dont ils pensent qu'ils sont des islamistes hommes portant la barbe ou femmes intégralement voilées ainsi que les journalistes étrangers qu'ils accusent de défendre le camp Morsi. Après les avoir laissés agir pendant des jours, le gouvernement les a accusés le 18 août de mener des actions "illégales".

La mobilisation des pro-Morsi a semblé marquer le pas le 18 août, les manifestants redoutant davantage de morts dans leurs rangs. Ils avaient annoncé neuf manifestations au Caire, mais les ont ensuite quasiment toutes annulées "pour raisons de sécurité" selon les organisateurs, l'Alliance anti-coup d'État.

Dans l'après-midi, 36 détenus islamistes ont été tués dans des circonstances encore peu claires lors d'un transfert du Caire à une prison de la banlieue. Les autorités assurent qu'ils ont péri en tentant de s'évader quand des inconnus ont attaqué le convoi de la police qui transportait plus de 600 prisonniers Frères musulmans, la confrérie de M. Morsi. 

Plus d'un millier de manifestants et cadres des Frères musulmans ont été arrêtés en cinq jours, selon le gouvernement.

Le pays était toujours sous état d'urgence et couvre-feu. L'armée bloquait avec ses chars les grands axes de la capitale, tandis que le ministère des Biens religieux a annoncé que les mosquées seraient désormais fermées en dehors des heures de prières, tentant ainsi d'éviter les rassemblements.

Les pro-Morsi avaient appelé le 17 août à une semaine de manifestations mais ils ne sont pas parvenus à mobiliser depuis, seuls quelques groupes de manifestants bravant le couvre-feu.

Deux camps irréconciliables

Depuis que l'armée a destitué et arrêté le président Morsi le 3 juillet, l'Égypte est ensanglantée par des scènes de guerre inédites et divisée en deux camps qui semblent désormais irréconciliables : d'une part les Frères musulmans, et de l'autre les partisans de la solution sécuritaire de l'armée, qui l'a emporté sur les rares voix prônant le dialogue au sein des nouvelles autorités.

Les violences ont atteint un niveau jamais égalé dans le pays, où les forces de l'ordre ont désormais l'autorisation d'ouvrir le feu sur les manifestants violents : mercredi 14 août, journée la plus meurtrière de l'histoire récente de l'Égypte, quelque 600 personnes avaient péri, notamment dans la dispersion de deux sit-in pro-Morsi au Caire. Deux jours plus tard, lors du "vendredi de la colère", 173 personnes ont été tuées, en majorité des manifestants. Au total, 70 policiers ont trouvé la mort en cinq jours dans ces violences.

Le pouvoir répète qu'il "combat le terrorisme" des Frères musulmans, la confrérie qui avait remporté haut la main les législatives de début 2012, un an après la révolte populaire ayant fait tomber Hosni Moubarak.

Réactions de la communauté internationale

L'épreuve de force n'a pas connu de répit ces derniers jours malgré les condamnations internationales, et l'Union européenne a averti qu'elle était prête à "réexaminer" ses relations avec l'Égypte si la violence ne cessait pas.

Alors que les télévisions publiques comme privées affichent désormais en permanence le logo "l'Égypte combat le terrorisme", en anglais à destination de la communauté internationale, et que la presse, unanime, dénonce un "complot terroriste" des Frères musulmans, le gouvernement continue d'assurer que les membres de la confrérie pourront participer au processus de transition prévoyant des élections début 2014, à l'exclusion de ceux qui ont "du sang sur les mains".

Les principaux dirigeants des Frères, dont leur Guide suprême en fuite Mohamed Badie, seront jugés à partir du 25 août pour "incitation au meurtre".

Londres et l'ONU ont dénoncé un "usage excessif de la force", alors que Berlin a appelé au "dialogue" pour éviter la "guerre civile", la chancelière Angela Merkel estimant qu'un arrêt des livraisons d'armes était un moyen de pression approprié.

Des sénateurs américains, dont l'influent républicain John McCain, ont demandé que les États-Unis coupent la substantielle assistance militaire 1,3 milliard de dollars par an à l'Égypte après le "massacre". En revanche, l'Autorité palestinienne, la Jordanie, l'Irak et surtout Ryad ont affirmé soutenir le pouvoir égyptien. Le Qatar, principal soutien des Frères musulmans, a dit aider l'Égypte et non la confrérie, affirmant vouloir corriger des "conceptions erronées".

AFP/VNA/CVN

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