Différend avec la Grèce : les Macédoniens répugnent à changer de nom

La perspective d'une adhésion à l'Union européenne et le volontarisme de leur gouvernement ont du mal à convaincre de nombreux Macédoniens des bienfaits d'un changement de nom pour leur pays, afin de résoudre leur différend avec la Grèce.

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Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg (gauche), et le Premier ministre macédonien Zoran Zaev, le 18 janvier 2018 à Skopje.
Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg (gauche), et le Premier ministre macédonien Zoran Zaev, le 18 janvier 2018 à Skopje.
Photo : AFP/VNA/CVN

Une manifestation de nationalistes grecs hostiles à tout compromis est prévue dimanche 21 janvier à Thessalonique. Mais les résistances sont aussi fortes dans l'opinion publique macédonienne. Pourtant, "il n'y a pas de plan B", a répété cette semaine à Skopje le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg.

Né avec l'indépendance en 1991 de cette ex-République yougoslave de 2 millions d'habitants, ce conflit doit être résolu avant d'envisager de rejoindre l'Alliance. C'est également vrai pour l'UE.

Membre de ces deux organisations, Athènes met son veto. Pour les Grecs, la Macédoine est le nom de sa province septentrionale, et en l'usurpant, Skopje dissimulerait des ambitions territoriales.

Autre point de friction, l'héritage historique d'Alexandre Le Grand que les deux camps revendiquent. L'éviction de la droite nationaliste et l'arrivée au pouvoir au printemps d'une coalition menée par les sociaux-démocrates, a relancé le dialogue. Cette semaine, l'ONU s'est dite "très optimiste", tandis que le Premier ministre Zoran Zaev table sur une solution "d'ici la fin du premier semestre 2018".

En Macédoine, la minorité albanaise (entre 20 et 25% de la population) applaudit. Les Macédoniens, des Slaves, sont plus partagés. "Je suis Macédonien ! Comment peut-on changer cela ?", s'étrangle Done Stojanoski, commerçant retraité de 67 ans. "Et pourquoi pas changer le nom des Américains ?", poursuit-il.

Les hypothèses sur un nouveau nom circulent : "Haute-Macédoine", "Macédoine du Nord", "Macédoine-Skopje", "Nouvelle Macédoine".

"Non, non !", s'indigne Vlatko Andreevski, fermier de 32 ans de Prilep (Centre) : "Comment pourrais-je me laisser appeler un +Nord-Macédonien ?".

Pragmatisme et prospérité

Mais dans un pays en butte à un exode massif, où le taux de chômage dépasse les 20% et où le salaire moyen n'excède pas 350 euros, beaucoup sont tentés par le pragmatisme et les promesses de prospérité portées par l'UE.

Accepter un changement de nom "nous mettrait en haut de la liste pour intégrer à la fois l'OTAN et l'UE. Les politiciens doivent régler ça", dit Gani Rahmani, serveur de 49 ans.

Les sondages sur le sujet sont rares. Mais une étude d'opinion de juin 2016 témoigne de cette ambivalence : sept Macédoniens sur dix se disaient favorables à l'adhésion à l'UE (66,7%) ou à l'OTAN (70,7%). Mais ils étaient une large majorité (64,8% contre 28,3%) à rejeter tout changement de nom.

Les plus ouverts à des concessions mettent des conditions : Liljana Stoilova, maraîchère de 43 ans, accepterait d'être citoyenne de "Macédoine du Nord, tant que nous restons des Macédoniens et que notre langue reste le macédonien".

"Nous sommes et nous resterons Macédoniens", a promis cette semaine le ministre des Affaires étrangères Nikola Dimitrov.

Le diable dans les détails

La statue d'Alexandre le Grand à Thessalonique, le 17 janvier 2018 en Grèce.
La statue d'Alexandre le Grand à Thessalonique, le 17 janvier 2018 en Grèce.
Photo : AFP/VNA/CVN

Si beaucoup regrettent le manque de transparence du gouvernement sur les pourparlers, le politologue Nano Ruzin, ancien ambassadeur de la Macédoine à l'OTAN, défend cette discrétion : "Rentrer dans les détails pourrait entraîner de nouveau un échec".

Exemple de ce qui pourrait bloquer : si un nouveau nom devait être accepté par les Macédoniens, sera-t-il à usage international, ou s'imposera-t-il aussi sur leur territoire, par exemple sur leurs documents officiels ?

Ce sujet est sans doute plus délicat que l'aéroport Alexandre Le Grand de Skopje. Nano Ruzin est convaincu que celui-ci "va changer de nom".

S'il n'évoque pas la monumentale statue du roi antique sur son cheval cabré, éclairée la nuit de néons sur la place centrale de Skopje, l'universitaire relève sobrement que "certains changements sont nécessaires d'un point de vue esthétique".

Pour Ali Ahmeti, chef historique de l'Union démocratique pour l'intégration (BDI en albanais, UDI en macédonien), il faudra "enlever certains monuments" néo-antiques érigés par l'ancienne majorité.

Favorable au changement de nom, il a aussi ses lignes rouges : "Pour les Albanais, les noms de République slave ou République nationale de Macédoine seraient inacceptables".

AFP/VNA/CVN

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