Deux «mères», une vocation : les enfants

Depuis 13 ans, deux femmes s’occupent de dizaines d’enfants, orphelins ou laissés pour compte. Étant devenues leurs mères adoptives, elles vivent avec eux dans une maison sur la steppe Tà Nung, ville de Dà Lat, province de Lâm Dông (hauts plateaux du Centre). Portrait.

 

Mme Hiên s’occupe de ses enfants.


Il y a 13 ans, Nguyên Thi Khoe, 44 ans, et alors enseignante dans la ville de Dà Lat, a décidé de partir enseigner au village de Tà Nung, à 15 km de là. Pourtant à quelques encablures de la capitale florale du Vietnam, ce village manquait de tout, avec nombre d’enfants ne sachant ni lire, ni écrire. Elle s’est aussi rendue au hameau Pang Tiên, district de Lac Duong, et d’autres dans les districts de Dam Rông et Lâm Hà pour y recueillir des orphelins afin de s’occuper d’eux.
Avec la même idée en tête, Nguyên Thi Hiên, 21 ans à l’époque et fraîche émoulue de l’École supérieure de médecine Lâm Dông, est venue aider son amie. Et depuis lors, leur maison sur la steppe Tà Nung tient lieu de domicile à 25 orphelins, dont certains n’ont que quelques mois à peine, comme ces deux jeunes frères qu’elles ont recueillis.
Elles ont aussi décidé de prendre en charge 25 autres marmots d’un à trois ans, qui souffrent de malnutrition. Mme Khoe a confié : «J’ai vu beaucoup de familles pauvres qui n’ont d’autre choix que de manger de la soupe et des légumes, sans apport carné. C’est pourquoi j’ai décidé de prendre en charge leurs enfants pour qu’ils ne souffrent plus de carences alimentaires».
Pour nourrir leur tablée de 50 enfants, ces deux «mères courageuses» doivent travailler d’arrache-pied pour acheter les vivres, mais aussi leur payer les frais d’études. Car si c’est une chose de les nourrir, c’en est une autre de leur assurer un avenir ! Dans leur jardin de deux hectares poussent caféiers, patates douces, maïs et autres légumes. Elles ont aussi appris la langue des ethnies minoritaires pour faciliter la communication avec leurs bambins.

De l’amour à revendre

Le temps passe, et les enfants grandissent, bercés dans les bras et l’amour de leurs mères. «Jusqu’à présent, sept de nos enfants ont terminé leurs études secondaires et quatre, leurs études à l’Université. Trois de nos filles se sont mariées. Chaque fois que nous avons besoin d’un coup de main, elles et leurs maris s’empressent de venir nous aider», exprime Mme Khoe, tout sourire.
De son côté, Mme Hiên ajoute : «Les enfants s’aiment comme les membres d’une même famille. Après les études, les plus grands nous aident à donner à manger aux petits».

Les enfants des mères Khoe et Hiên.


Krajang A Mi s’est retrouvé sans parents alors qu’il n’avait que deux semaines à peine. Et c’est à quatre ans que ses deux mamans de substitution l’ont pris en charge. Il est maintenant étudiant à l’École supérieure professionnelle de Dà Lat. Lorsqu’il n’a pas cours, il rentre à la maison pour les aider à entretenir le potager. A Mi nous dit qu’il ne veut pas trop s’éloigner de sa maison. Après ses études, il souhaite trouver un travail, se marier et continuer à vivre avec ses mères pour s’occuper des enfants.

Une vie dédiée aux enfants

Afin de se consacrer corps et âme à leur mission sacrée, Mme Khoe et Mme Hiên ont décidé de ne pas se marier. «Ce n’est pourtant pas les prétendants qui manquent, nous raconte Mme Hiên, d’un air amusé. Mais j’aime tellement mes enfants que je refuse de me marier».
Elle estime que si elle se marie, son amour pour les enfants ne sera plus complet. Ce qu’elle n’envisage, on l’a bien compris, évidemment pas, ne serait-ce qu’une seconde !
«Bien que célibataire, j’ai toujours des enfants et une famille dont je suis fière, car dans ma famille, c’est l’entraide qui compte. Nous pouvons venir à bout de toutes les difficultés pour que nos enfants deviennent des personnes utiles et trouvent leur place dans la société», partage-t-elle.
Et Mme Khoe d’ajouter, humblement : «Nos actions ne sont pas grand-chose, d’autres en font de beaucoup plus significatives que nous».

Vue panoramique de Tà Nung.


Selon Lê Quang Huy, président du comité populaire de Tà Nung, Tà Nung est une steppe où cohabite un grand nombre de minorités ethniques. Leurs conditions de vie sont difficiles et les autorités ne peuvent s’occuper de tous ces gens. Grâce à Mme Khoe et Mme Hiên, des enfants orphelins et handicapés ont un toit et un soutien. Le gouvernement local essaie, avec ses moyens, de les aider et leur présente des associations humanitaires.

Hà Minh/CVN

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