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Khang A Tua, l’un des 54 étudiants de la 1re promotion de co-créateurs de l’université Fulbright Vietnam. |
L’apparence de Khang A Tua est celle d’un jeune vietnamien de son temps. Rien ne le différencie de ses camarades, à l’exception de son pantalon ample en lin, costume typique des H’mông. Petit et grêle avec une touffe de cheveux attachée en arrière, le jeune H’mông a un visage qui respire l’intelligence. Il est le premier H’mông admis à l’Université polytechnique de Hanoï et l’un des 54 étudiants de la première promotion de co-créateurs de l’université Fulbright Vietnam (FUV) à Hô Chi Minh-Ville. Lors du gala Wechoice Awards 2019 (prix qui récompense les personnes et projets de l’année), il est devenu l’une des 18 personnes inspirantes.
Inspiration de son père
Khang A Tua est né en 1995 dans une famille paysanne pauvre de la commune de Chê Cu Nha, district de Mù Cang Chai, province septentrionale de Yên Bai. Son père est analphabète, parle peu le vietnamien et n’a pas jamais quitté son village natal.
"Ma famille disposait de très peu de terrains. À chaque récolte, nous ne récoltions que 20 sacs de paddy. Avec six bouches à nourrir, nous avions toujours faim. Pour avoir plus de nourriture, mon père devait travailler comme porteur dans les carrières", partage-t-il
Malgré leurs difficultés, ses parents se sont toujours très intéressés à l’éducation de leurs enfants. Ses frères et sœurs sont tous allés à l’école. Son père lui a souvent répété : "Tu dois aller à l’école si tu ne veux pas finir analphabète comme moi".
Pour se rendre à l’école, Tua devait emprunter des chemins étroits et sinueux, boueux et glissants à la saison des pluies. Pour différentes raisons, Tua a voulu plusieurs fois abandonner l’école. Afin de le motiver, son père s’était résolu à l’accompagner tous les jours et avait demandé à rester à côté de lui pendant plus d’un mois.
Lorsque sa famille a rencontré des difficultés croissantes à cause de mauvaises récoltes successives et a dû se déplacer plus profondément dans les montagnes, Tua a de nouveau voulu abandonner l’école. Grâce à la détermination de ses parents et au soutien et l’aide de son enseignante responsable, il a persévéré et gardé une grande motivation.
Répondant aux aspirations de son père et de sa famille, Tua s’est affirmé par ses résultats scolaires. Au collège, il a été l’un des cinq élèves de la commune de Chê Cu Nha à obtenir une bourse pour suivre les études à l’internat du district de Mù Cang Chai. Après le collège, il était aussi l’un des quatre élèves du district choisis pour poursuivre les études au lycée de la haute région du Viêt Bac, implantée dans la province de Thai Nguyên. En classe de seconde, le jeune H’mông a remporté le prix d’excellence en physique et le prix de niveau provincial de physique sur ordinateur de poche. En 2014, il a été le premier H’mông de la région de Mù Cang Chai à devenir étudiant à l’Université polytechnique de Hanoï.
Mais ce pas de géant pour un membre de sa communauté n’a pourtant pas été décisif pour Tua. Le grand tournant pour Tua est en fait survenu lorsqu’il s’est rendu compte qu’il n’était finalement pas vraiment passionné par la chimie. Il a alors, à la fin de sa deuxième année, décidé de suspendre ses études.
La dynamique du changement
La véritable passion et les aspirations de Khang A Tua sont en fait… son village natal. Photo : We25/CVN |
Photo : We25/CVN |
Sa véritable passion et ses aspirations étaient en fait… son village natal. Il a toujours souhaité préserver et promouvoir les valeurs culturelles traditionnelles des H’mông, aider les enfants à étudier, à participer au développement de la société et soutenir les habitants locaux dans leur développement économique.
En effet, dès son arrivée à Hanoï, Tua est resté obsédé par son village natal, inquiet notamment par la disparition de sa langue natale et de la culture traditionnelle de son ethnie. Il s’est alors impliqué dans les différentes associations d’étudiants H’mông des universités de Hanoï et participé à des activités sociales ainsi qu’à des projets de recherche sur cette ethnie menés par certaines organisations.
Près d’un an après avoir abandonné l’université, Tua et ses amis ont créé le projet "Action pour le développement H’mông". Dans le cadre de ce projet, de nombreuses activités de promotion, de présentation des valeurs de la culture de cette ethnie minoritaire ont été organisées.
En outre, ce jeune homme a profité de son temps libre pour aller dans toutes les régions montagneuses pour collecter des contes H’mông, rassembler un ensemble de livres bilingues (langues H’mông et vietnamienne) pour en faire profiter les élèves des districts montagneux. Il a également travaillé pour des organisations à but non lucratif comme l’ISEE avec l’objectif de soutenir sa communauté. Lors du dépôt de sa candidature à la FUV, le Conseil de cette école a souligné : "Tua a été choisi grâce à son parcours personnel qui témoigne des qualités souhaitées par la FUV chez les étudiants co-constructeurs. C’est-à-dire : être studieux, avoir l’esprit communautaire, être persé-vérant et innovant".
"La FUV cherche non seulement les meilleurs étudiants mais aussi ceux avec un potentiel brut qui ne demande qu’à se révéler", explique la présidente de la FUV, Dàm Bich Thuy.
Répondant à la question de la FUV "Si vous pouviez créer une nouvelle discipline pendant votre année de co-créateur, que suggéreriez-vous ?”, Tua a affirmé : "Une discipline sur la culture autochtone".
Lors de ses dernières vacances d’été, en dehors de son job de moto-taxi, Tua a réalisé le projet "Vuon Mo" (Jardin des rêves) avec l’objectif d’amener à Hanoï 22 enfants H’mông de la région montagneuse du Nord-Ouest pour leur transmettre les compétences nécessaires à la vie en milieu urbain. Il a également créé un projet appelé "Na Na, Me oi, me oi" (Na na, s’il te plaît maman, s’il te plaît maman) pour aider les mères H’mông à vendre leurs produits artisanaux.