Deux jours après le drame, le portrait dressé d'Aaron Alexis est celui d'un homme qui semblait profondément perturbé. Il possédait néanmoins une habilitation de sécurité délivrée par le ministère de la Défense et avait pu acheter en toute légalité un fusil à pompe. Grâce son habilitation, il pouvait travailler pour un sous-traitant de la Défense et a pu s'introduire lundi matin dans un immeuble de bureaux du complexe de la Marine de Navy Yard à Washington, où il a ouvert le feu et tué 12 personnes et blessé huit autres avant d'être abattu par la police.
Cet ancien de la Marine américaine avait pourtant des antécédents de problèmes comportementaux avec notamment au moins un épisode de délire psychotique survenu cet été.
La police est sur le lieu de la fusillade au siège de la Navy à Washington, le 16 septembre 2013 |
"Manifestement, il y a eu un problème quelque part", a admis le secrétaire à la Défense Chuck Hagel lors d'une conférence de presse le 18 septembnre. "Quand on regarde avec le recul, il y avait des signaux d'alerte, bien sûr qu'il y en avait".
"Pourquoi n'ont-ils pas été décelés, pourquoi les procédures d'habilitation n'en ont pas tenu compte, que faisait-il?... Ce sont des questions légitimes auxquelles nous allons devoir répondre", a affirmé le chef du Pentagone.
M. Hagel a annoncé l'ouverture de plusieurs enquêtes. L'une doit passer en revue "la sécurité et les procédures d'accès à toutes les installations du département de la Défense dans le monde", une deuxième revoir les procédures d'octroi des habilitations de sécurité, y compris pour les sous-traitants de la Défense.
Il entendait des voix
Présentant ses excuses aux familles des victimes, la mère du tireur, Cathleen Alexis, a confié son désarroi dans un bref communiqué lu sur CNN. "Je ne connais pas les raisons de son geste et je ne pourrai jamais lui demander", a-t-elle dit. "Aaron ne pourra plus jamais faire de mal là où il est aujourd'hui, et j'en suis heureuse".
Le président Barack Obama assistera le 22 septembre à une cérémonie à la mémoire des victimes, a de son côté fait savoir le 18 septembre la Maison Blanche.
Pendant son temps sous les drapeaux entre 2007 et 2011, le dossier d'Aaron Alexis n'était pas "lumineux" et était émaillé de problèmes de discipline mineurs, comme des cas d'insubordination ou de retard au travail, a reconnu le contre-amiral John Kirby, directeur de la communication de l'US Navy.
"Aucune des infractions qu'il a commises pendant son temps dans la Marine ne pouvait donner une indication qu'il était capable d'une telle violence", a toutefois plaidé l'officier.
Rien en tout cas qui l'ait empêché de bénéficier d'une habilitation de sécurité "valable 10 ans", selon lui. C'est ce sésame, octroyé en mars 2008, qui lui a permis d'être embauché par une filiale de Hewlett-Packard et d'accéder au complexe de Navy Yard.
Aaron Alexis avait tiré en 2004 dans les pneus d'un ouvrier garé devant chez lui puis en 2010 à travers le plafond de sa voisine pour se plaindre du bruit, mais ces violents accès de colère n'avaient pas fait l'objet de poursuites judiciaires.
Plus grave, Aaron Alexis semblait avoir récemment manifesté des symptômes de délires psychotiques. Début août, alors qu'il logeait dans un hôtel situé sur une base militaire, il a appelé en pleine nuit le commissariat de Newport, dans le Rhode Island, pour se plaindre de ne pas pouvoir dormir parce qu'il était "pourchassé" et "entendait des voix", selon un rapport de police dévoilé par le New York Times.
Le commissariat a prévenu la police militaire de la base mais aucune suite n'a été donnée, Aaron Alexis n'étant pas militaire et n'ayant enfreint aucune loi, a confié une responsable de la Marine sous couvert d'anonymat.
Fin août, Aaron Alexis s'est rendu à plusieurs reprises dans des centres médicaux dépendant du ministère des Anciens combattants pour se plaindre d'insomnies, indique le ministère dans un communiqué, selon qui "il n'a jamais demandé à rencontrer un spécialiste de la santé mentale".
AFP/VNA/CVN