Rafael Nadal s'est affirmé comme le meilleur joueur de tous les temps sur terre battue après sa victoire face à Novak Djokovic en finale du Roland-Garros, le 11 juin à Paris. Photo : AFP/VNA/CVN |
Rarement, sans doute même jamais, on avait vu l'Espagnol aussi ému qu'après cet onzième titre du Grand Chelem, le septième à Roland-Garros, un de mieux que Björn Borg avec qui il partageait le record de victoires à Paris. Lorsque Djokovic, No1 mondial fier et valeureux, a commis une double-faute sur la première balle de match, Nadal a craqué. Il est tombé à terre, dans un coin du Central chaud bouillant malgré le contexte humide, a fondu en larmes, avant de foncer dans les tribunes pour tomber dans les bras du basketteur Pau Gasol, de sa famille et de son oncle Toni, son entraîneur depuis toujours. "C'est un moment inoubliable pour moi. Il y a beaucoup d'émotion", a-t-il déclaré une fois redescendu sur le court, avant de remercier le public dans un français mélangé de quelques mots d'espagnol et d'anglais.
Il y avait beaucoup de joie chez Nadal. Il y avait aussi le soulagement d'avoir survécu à deux jours sous haute tension, aux interruptions et aux balles lourdes comme un melon. Soulagement d'avoir assumé l'étiquette de favori qui lui avait été collée à l'unanimité avant la finale. Soulagement surtout d'avoir mis fin à une série de trois finales du Grand Chelem perdues face à Djokovic, à Wimbledon, l'US Open et l'Open d'Australie.
Son énervement le 10 juin au soir au moment de l'interruption, alors que Djokovic avait le vent en poupe, montrait que Nadal avait conscience qu'il n'avait pas le droit de perdre ce match dans son jardin, sous peine de revivre ce que lui-même avait infligé à Roger Federer en battant le Suisse à Wimbledon en 2008 : un complexe quasi définitif et impossible à effacer par la suite.
Sans compter qu'il allait également perdre sa place de No2 mondial au profit de Federer justement en cas de défaite. Réussir le break d'entrée le 11 juin, pour revenir à 2-2 dans le quatrième set, l'a aidé à évacuer la pression, d'autant que sa mise en jeu solide lui a permis dès lors de faire la course en tête, sous la pluie, puis sous le soleil. Djokovic a fini par craquer au bout de 3h 49 min, dont 49 minutes le 11 juin, dans une ambiance inespérée vu les conditions, alors que la Fédération française avait rameuté ses licenciés pour remplir le Central.
Domination totale
Au final, la fête n'a pas été gâchée, au contraire. Sauf pour le camp serbe puisqu'il n'y aura donc pas de "Djoko Slam", c'est-à-dire le Grand Chelem à cheval sur deux ans, exploit inédit depuis 1969, malgré tout le courage et le mental de ce champion d'exception. Beau perdant, Djokovic a insisté sur le fait qu'il avait perdu "contre le meilleur de tous les temps sur terre battue", ajoutant : "ça ne fait même aucun doute et il n'a que 26 ans", depuis le 3 juin exactement.
Vu son âge et son pedigree, Nadal peut décemment espérer asseoir un peu plus sa légende avec quelques titres supplémentaires à Paris. Comment imaginer le contraire ? Le pirate majorquin en est désormais à 52 victoires en 53 matches à Roland-Garros où sa seule défaite, en 2009 face à Robin Söderling, était venue à une époque où il avait très mal aux genoux et au cœur puisque ses parents étaient alors en plein divorce.
Vu sa compétitivité sur les autres surfaces, le record de victoires en Grand Chelem de Federer (16) n'est, après tout, pas si loin non plus. Sur terre battue, sa domination est totale : 227 victoires en 236 matches depuis 2005 et un seul set perdu cette année sur terre rouge, dimanche face à Djokovic. Vainqueur pour la huitième fois à Monte-Carlo, la septième à Barcelone et la sixième à Rome, il est également monté au septième ciel à Paris, comme dans le temps Pete Sampras à Wimbledon ou Chris Evert à Roland-Garros.
Pour certains, cette domination peut paraître ennuyeuse. Djokovic, plus ambitieux que jamais, a promis de revenir l'année prochaine pour porter un projet d'alternative et faire vivre une rivalité qui est d'ores et déjà l'une des plus grandes que ce sport ait connu.
AFP/VNA/CVN