>>Castillo se dit vainqueur avant la proclamation officielle du résultat
>>Pedro Castillo et Keiko Fujimori au second tour de la présidentielle
Une affiche représentant le candidat de gauche Pedro Castillo revêtu de l'écharpe présidentielle devant le quartier-général de son parti à Lima le 10 juin. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
M. Castillo était crédité jeudi soir 10 juin de 50,20% des suffrages et sa rivale de la droite populiste Keiko Fujimori de 49,80%, soit un écart de 69.546 voix, selon l'Office national des processus électoraux (ONPE).
Mme Fujimori conteste cette avance et a demandé mercredi 9 juin l'invalidation de quelque 200.000 bulletins, issus de 802 bureaux de vote, devant le Jury national électoral (JNE). Elle avait dénoncé lundi 7 juin des "irrégularités", des "indices de fraude" et "une claire intention de saboter la volonté du peuple".
Une défaite aussi près du but serait pour Mme Fujimori une nouvelle désillusion, mais la priverait surtout de l'immunité présidentielle.
Début mars, trente années de prison ont été requises contre elle par le parquet et 22 ans contre son mari Mark Vito Villanella, dans le cadre de l'enquête sur le scandale Odebrecht, du nom du géant brésilien du BTP qui a reconnu avoir versé des pots-de-vin à de nombreux dirigeants latino-américains.
Jeudi 10 juin, le procureur en charge de l'affaire, José Domingo Pérez, a réclamé que la liberté conditionnelle dont jouit la candidate depuis mai 2020 soit "révoquée". Mme Fujimori a déjà passé 16 mois en détention provisoire dans cette affaire pour financement illicite de ses campagnes présidentielles passées.
"Il n'y a aucune crainte que se concrétise cette (demande de) prison préventive", a assuré jeudi 10 juin Mme Fujimori.
Le Jury national électoral ne s'est pas prononcé sur la demande d'annulation formulée par Mme Fujimpori, mais n'en a pas moins entamé le lent processus de révision des bulletins litigieux, qui, selon lui, pourrait prendre plusieurs jours avant la proclamation du résultat.
Pour l'heure ni les autorités électorales, ni les missions d'observation internationales, n'ont fait état de la moindre fraude.
Selon l'analyste Hugo Otero, la demande du camp Fujimori "donne l'impression qu'elle veut remettre en cause l'ensemble du processus électoral". Il dit à l'AFP craindre que l'"incertitude" soulevée n'influe sur "l'humeur dans le pays".
Le président du JNE, Jorge Luis Salas, s'est de son côté dit surpris de la demande de Mme Fujimori d'invalider les résultats dans plus de 800 bureaux de vote. Il a rappelé que lors des dernières élections de 2016, "seuls 29 bureaux de vote avaient été remis en question".
Sans attendre le résultat officiel, qui maintient le pays sous tension, le président argentin de centre-gauche Alberto Fernandez a surpris en félicitant M. Castillo, le "président élu du Pérou". Cette réaction a valu à l'Argentine une "note de protestation" de la part du gouvernement péruvien, remise à l'ambassadeur argentin à Lima.
Le Nicaragua par la voix de sa vice-présidente et porte-parole du gouvernement, Rosario Murillo, a également félicité M. Castillo pour sa "victoire", de même que le président bolivien Luis Arce sur Twitter. Les anciens présidents bolivien Evo Morales et brésilien Lula da Silva lui avaient eux aussi adressé leurs félicitations.
Keiko Fujimori, candidate de la droite populiste à la présidentielle, lors d'une conférence de presse, le 9 juin à Lima, au Pérou. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le président brésilien Jair Bolsonaro a lui regretté d'avoir "perdu" le Pérou et estimé que seul "un miracle pourrait inverser la tendance".
"Irresponsables"
Des centaines de partisans de Pedro Castillo s'étaient rassemblés mercredi soir 9 juin devant les bâtiments du JNE. "Nous sommes là de manière préventive pour que les votes contestés soient correctement vérifiés", a expliqué l'un d'entre eux, Juan Gustavo Diaz.
Des partisans de Keiko Fujimori se sont également rassemblés dans le centre de la capitale pour soutenir leur candidate. "Communisme non, démocratie oui" ou encore "Jusqu'au dernier vote" pouvait-on lire sur des banderoles.
Aucun incident n'a été déploré
"Ne tombons pas dans les provocations de ceux qui veulent voir ce pays dans le chaos. Par conséquent, nous appelons à la paix et à la tranquillité", a tweeté M. Castillo.
Le cardinal Pedro Barreto, qui lors dune cérémonie à 20 jours du scrutin avait solennellement fait promettre aux deux candidats de respecter les institutions démocratiques, a qualifié jeudi d'"irresponsables" les actions remettant en cause le processus électoral et a appelé les candidats à accepter "la volonté du peuple".
Les forces armées péruviennes ont exhorté mercredi 9 juin "tous les Péruviens à respecter les résultats du processus électoral" et se sont engagées "à respecter la volonté des citoyens exprimée dans les urnes".
Les deux vainqueurs surprise du premier tour le 11 avril, parmi 18 candidats, avaient tous deux assuré avant le scrutin qu'ils respecteraient le résultat du vote.
AFP/VNA/CVN